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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Syrie : pourquoi l’accord russo-américain risque (encore) d’échouer ?

L'accord pour une « cessation des hostilités » censée débuter vendredi soir contient trop de lacunes pour tenir durablement et sur l'ensemble du territoire.

Photo d’archives d’un combattant de l’Armée syrienne libre à Alep. Muzaffar Salman/Reuters

Encore une fois, un projet de trêve vient d'être annoncé en Syrie. Censé débuter dans la nuit de vendredi à samedi, à minuit heure de Damas, il est « parrainé » par les États-Unis et la Russie, ainsi que leurs partenaires respectifs. Cet accord survient une dizaine de jours après l'annonce, le 12 février, d'un cessez-le-feu prévu une semaine plus tard, mais qui a échoué avant même d'avoir commencé. Et comme le premier, l'accord actuel semble susciter plus de doutes que d'optimisme, d'après les diverses réactions de diplomates, militants, citoyens, combattants, exprimées depuis l'annonce russo-américaine lundi soir.

Pourquoi, en effet, ce nouvel accord aurait-il plus de succès que les précédents, alors que le communiqué conjoint publié lundi soir est – presque – le même que celui publié la semaine précédente ? La seule différence entre les deux textes est que, contrairement au premier, le second ne mentionne que très brièvement une transition politique en Syrie, sans plus de détails, et se concentre uniquement sur une « cessation des hostilités » généralisée sur le terrain. Entre-temps, le régime syrien et ses alliés, surtout l'aviation russe, ont enregistré des succès majeurs sur le terrain, notamment dans la province d'Alep. Il serait facile pour Moscou, à l'origine de l'accord, de refuser un arrêt des violences et poursuivre son offensive. Mais une pause, si brève soit-elle, sera probablement bien accueillie sur le terrain, après plusieurs semaines d'offensives intenses. En outre, sa crédibilité est en jeu, dans la région comme au sein de la communauté internationale. Après tout, il lui faut bien faire preuve de bonne volonté et montrer qu'il cherche réellement à trouver une solution au conflit syrien. Idem pour Washington, déjà passablement critiqué par ses alliés régionaux quant à son engagement insuffisant en Syrie.


(Lire aussi : Kerry évoque un « plan B » pour la Syrie en cas d'échec de la diplomatie)


Rien n'est donc moins certain que l'application et le maintien d'une trêve durable en bonne et due forme, la situation sur le terrain syrien étant plus compliquée que jamais. Le terme même de « trêve » est sujet à débat, alors que dans le communiqué conjoint de Washington et Moscou, l'expression utilisée est « cessation des hostilités ». Contrairement à une « trêve », une « cessation des hostilités » est avant tout généralisée, et non limitée à une région spécifique ; elle est aussi non contraignante, ne dépend que de la bonne volonté des belligérants, donne la priorité à l'humanitaire et surtout ne fait pas mention d'un abandon d'armes ou de territoires.


 

Quels groupes concernés ?
Le second point qui est sujet à débat dans la déclaration conjointe de Washington et Moscou concerne les groupes non inclus dans cette « cessation des hostilités », soit l'État islamique (EI), le Front al-Nosra (branche syrienne d'el-Qaëda), et « d'autres organisations terroristes désignées par le Conseil de sécurité de l'Onu ». Sauf que cette dernière phrase reste vague à souhait et ne précise aucunement quels sont ces groupes. En outre, si le Front al-Nosra n'est pas concerné par cet arrêt temporaire des violences, il fait en revanche partie de Jaïch al-Islam, coalition salafiste majeure et plus important groupe armé présent dans le Rif de Damas. Pour rappel, le négociateur en chef du Haut-Comité des négociations (HCN – représentatif de l'opposition syrienne dans le cadre des pourparlers de paix syro-syriens) s'appelle Mohammad Allouche et est issu de... Jaïch al-Islam. Il est de ce fait crucial de préciser quels groupes sont concernés par cette cessation des hostilités et qui ne l'est pas.

 

(Lire aussi : Les rebelles d’Alep s’unissent, contre Assad, sous la bannière de Jaych Halab)


Il serait ainsi plus facile de délimiter les régions de Syrie où opèrent les différents belligérants. Les zones contrôlées par l'EI – comme Raqqa, Deir ez-Zor, Palmyre –, par al-Nosra – particulièrement présent à Idleb, Alep, etc. – continueront d'être visées par les frappes de la coalition internationale et du régime syrien. En revanche, le sud du pays et la Ghouta orientale sont contrôlés par ce que certains considèrent comme des éléments plus modérés, comme l'Armée syrienne libre (ASL). Il est très possible, toutefois, que ces éléments ne soient pas épargnés par des raids ou autres violences. Mais quid des Kurdes et des territoires qu'ils contrôlent ? La Turquie a affirmé hier vouloir riposter à tout tir venant de Syrie, mais rien ne garantit qu'elle ne poursuivra pas ses tirs d'artillerie contre les positions kurdes dans la province d'Alep.

Une task force et une hotline
Troisièmement, le communiqué fait mention de la formation d'une « task force », ou groupe de travail, qui se chargera de contrôler le maintien de la cessation des hostilités, ainsi que la création d'une ligne directe de communication ou « hotline ». Rien n'explique dans le communiqué américano-russe les modalités de travail de ces deux entités. En outre, l'annonce de cet accord quelques jours seulement avant le début de son application ne permet pas d'espérer l'envoi d'observateurs indépendants soigneusement choisis. La dangerosité du terrain syrien ne le permettrait pas.

Il semblerait que seuls les convois humanitaires puissent profiter de cette pause. Ces dernières semaines déjà, plusieurs convois ont pu parvenir dans certaines localités assiégées par le régime comme par les rebelles ou l'EI. Et hier, deux localités ont reçu de nouvelles aides. Il n'en reste pas moins que, selon l'Onu, plus de 4 millions de personnes se trouvent dans des zones difficiles d'accès pour ces convois, qui n'arrivent à joindre que quelques dizaines de milliers de personnes.

En fin de compte, malgré le fait que l'accord ait été accepté par Damas comme par le HCN, trop d'intérêts divergents empêchent d'espérer un arrêt total des violences en Syrie. Chaque partie a trop perdu, trop avancé aussi, pour s'arrêter là, si près du but. C'est le cas du régime, de ses alliés, des Kurdes aussi. Il est donc quasi certain que si cette cessation des hostilités se concrétise vendredi soir, elle ne durera pas.

 

 

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Encore une fois, un projet de trêve vient d'être annoncé en Syrie. Censé débuter dans la nuit de vendredi à samedi, à minuit heure de Damas, il est « parrainé » par les États-Unis et la Russie, ainsi que leurs partenaires respectifs. Cet accord survient une dizaine de jours après l'annonce, le 12 février, d'un cessez-le-feu prévu une semaine plus tard, mais qui a échoué avant...
commentaires (2)

De la fumisterie! C'est exactement ce qui se passait au Liban au debut de la guerre. Trêve, puis combats, puis trêve, puis nouveau round, etc... Il n'en sont encore qu'au début, a présent les choses vont s’étendre a d'autres territoires et peut être au Liban meme... Que Dieu nous en preserve...

Pierre Hadjigeorgiou

12 h 24, le 24 février 2016

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Commentaires (2)

  • De la fumisterie! C'est exactement ce qui se passait au Liban au debut de la guerre. Trêve, puis combats, puis trêve, puis nouveau round, etc... Il n'en sont encore qu'au début, a présent les choses vont s’étendre a d'autres territoires et peut être au Liban meme... Que Dieu nous en preserve...

    Pierre Hadjigeorgiou

    12 h 24, le 24 février 2016

  • IL NE RISQUE PAS D,ECHOUER... IL VA ECHOUER ! LE REGIME... FORT DE L,APPUI RUSSE... ET DU COMPERAGE AMERICAIN JUSQU,AUJOURD,HUI... FAIT DE FAUX CALCULS ET REVE DE SOLUTION MILITAIRE... DANS CE CAS SOLUTION MILITAIRE IL Y AURAIT MAIS DANS LE SENS CONTRAIRE DE SON SOUHAIT ET DE SA REVERIE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 57, le 24 février 2016

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