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Diaspora - Diaspora

« Dites-leur quels sont les avantages d’obtenir la nationalité libanaise... »

L'Argentine compte des centaines de milliers de Libanais d'origine, mais des familles entières ont perdu tout contact avec le Liban. La diaspora serait-elle intéressée par la
perspective de recouvrement de la nationalité libanaise ? Elle est surtout sensible au message de paix et de coexistence...

Au studio de la chaîne de télévision CTC, en son siège à Mendoza.

En parcourant les longues routes de la plaine patagonienne au cœur de l'Argentine sous un beau soleil printanier, nos pensées se tournent vers les milliers d'ancêtres de Libanais qui ont effectué, à la fin du XIXe siècle, ce même chemin pour y construire une vie digne.
Lancés sur les pas de leurs descendants, nous découvrons une nature qui les avait souvent attirés par sa ressemblance avec le pays du Cèdre. Toutes proportions gardées, notre chemin à travers les lacs, dans les plateaux fertiles dominés par la chaîne de montagne andine faisant frontière avec le Chili, nous ramène aux paysages de la plaine de la Békaa et de l'Anti-Liban. Sauf qu'en Patagonie, les paysages sont magnifiquement conservés.
Par-ci par-là, nous trouvons des traces libanaises, comme la rue Gabriel Obeid, dans ce joyau de village qu'est San Martin de Los Andes, se terminant sur les rives d'un lac. La question qu'on nous pose souvent à Beyrouth, à juste titre, nous revient inlassablement : « Pourquoi ne laissez-vous pas ces jeunes tranquilles dans leur pays, que vont-ils venir faire au Liban ? » en référence aux voyages de retour aux racines effectués régulièrement par RJLiban.
En effet, les images idylliques captées en Argentine ne s'estompent pas facilement des esprits. Mais les rencontres, pour la plupart improvisées, avec des jeunes descendants de Libanais ayant perdu tout contact avec leur pays d'origine, confirment la justesse de notre mission : pouvoir assurer leur droit de retourner au Liban, ne serait-ce qu'une fois dans leur vie... Le destin décidera du reste !

Appartenir à un pays-message
En Argentine, pays qui compte plus d'un million et demi de personnes d'origine libanaise, le débat sur la nationalité, qui fait maintenant la une de l'actualité libanaise, paraît bien loin. Le journaliste Nakhlé Odaimé, qui nous accompagnait dans ce voyage, en a fait un reportage spécial diffusé dans le JT de la MTV le 16 décembre. Souvent, il nous a été pratiquement impossible d'aborder ce sujet en tombant nez à nez avec des jeunes de la quatrième génération, dont les familles, formées quelquefois de centaines de personnes, ne connaissant pas le Liban, étant coupées du pays de leurs origines. Un premier travail consiste à leur donner des points de repères avec le concours des jeunes ambassadeurs de l'association RJLiban, présents sur place.
Il est donc difficile de transposer les calculs confessionnels sur lesquels se basent nos hommes politiques sur la diaspora. Toutefois, le message de coexistence et de paix, dont le Liban continue d'être le vecteur contre vents et marées, est accrocheur.
Au début de l'interview télévisée réalisée le 9 décembre au siège de la chaîne câblée andine CTC à Mendoza, la présentatrice Denia Gomez nous a surpris avec ces mots : « Dites à nos téléspectateurs, fils d'émigrants, quels sont les avantages d'obtenir la nationalité libanaise. » Nous avons alors répondu avec conviction : « Nous œuvrons pour développer l'image du Liban et pour renforcer les liens entre les Libanais, les amis du Liban et les descendants de Libanais. Pour nous autres, les descendants d'émigrés sont très importants pour le Liban actuellement, ils contribueront à faire en sorte de laisser ce pays vivre en liberté et aider la population libanaise à rester dans le pays. Il est crucial que nous organisions des voyages parce que nous pensons que pour connaître le Liban, il faut le visiter pour s'en faire une idée différente. Le bénéfice du recouvrement de la nationalité, c'est qu'elle permet d'appartenir à un pays-message, un pays de paix, où règne la convivialité entre tous, entre communautés chrétiennes et musulmanes. Ce qui est complètement différent des violences dont nous sommes témoins actuellement dans le reste du monde. »

De nouveaux candidats pour le Liban
La réaction ne s'est pas fait attendre, avec les inscriptions de nouveaux militants pour le Liban à partir de l'Argentine, mais aussi du Mexique et de l'Uruguay où l'information a été relayée :
– Luis Gattás, 60 ans, est architecte à Mendoza, en Argentine. Ses grands-parents paternels sont issus des familles Gattás et Medauar, de la localité de Mtein au Mont-Liban.
– Eva Guadalupe Sodi, 26 ans, travaille dans les relations internationales à Mexicali, Baja California, au Mexique. Sa grand-mère maternelle est de la famille Majul, de localité inconnue.
– Evelyn José, 23 ans, est étudiante à l'Université de Mendoza. Son arrière-grand-père paternel est de la famille Nahim, et son arrière-grand-mère maternelle de la famille Marún.
– María Verónica Naman Elmelaj, 53 ans, est enseignante à Mendoza. Elle est originaire de Mazraat Yachouh et s'intéresse à l'histoire et à la philosophie.
– Aurelia Athié, 46 ans, travaille dans l'assurance à Mexico City. Ses grands-parents paternels (familles Athie et Saad) sont de Bkassine.
Citons aussi les Libano-Argentins Marcelo Morcos, 44 ans, et Sonia Elizabeth Juri, 55 ans, tous deux de Mendoza, María Jose Alberto Resuc, 44 ans, de Zapala, Juan Jose Naman, 29 ans, de Lujan de Cuyo, la Libano-Uruguayenne Catalina Yapor Miguel, 53 ans, de Treinta y Tres, les Libano-Mexicains de la famille Athié, Alberto, 61 ans, et Alejandra, 53 ans, de Mexico City, et Adzuira, 23 ans, de Naucalpan de Juarez.

Une approche culturelle plus adéquate
Toutes ces personnes pourront ainsi bénéficier des voyages à prix réduits vers le Liban qui vont débuter le mois prochain. Une attention particulière sera réservée aux talents : écrivains, poètes, chanteurs, musiciens et autres artistes, en préparation d'un festival culturel annuel de l'émigré au Liban. L'Amérique latine continue de figurer comme priorité, nos correspondants allant se concentrer, dans chaque ville, sur l'aspect culturel à donner aux
programmes de retour aux sources.
Les artistes d'origine libanaise sont le plus souvent intégrés dans le milieu où ils vivent, comme la chanteuse Paula Neder, rencontrée par hasard lors d'une soirée à Mendoza qui, accompagnée de sa guitare, a dans son répertoire des chansons andines traditionnelles ou de sa propre composition. Plusieurs groupes ont déjà été répertoriés dans les grandes villes, comme les musiciens Abi-Khalil à Mexico, ou le chanteur de samba Leandro Fregonesi à Rio de Janeiro. Et, bien sûr, il y a les célèbres Mika, Shakira, Fagner...

Juliana Awada, Première dame d'Argentine
Elle est libanaise de la 2e génération, issue d'une famille de la communauté musulmane chiite de Baalbeck, et milite pour le parti de son mari, le nouveau président argentin Mauricio Macri : voici la Première dame d'Argentine, Juliana Awada, paradant sur la célèbre Plaza de Mayo à Buenos Aires dans une voiture décapotable au côté de son époux, qui vient de prononcer son discours d'investiture salué par les ovations de tout un peuple.
Le hasard a voulu que nous soyons, en ce mémorable jeudi 10 décembre 2015 à midi, à dix mètres du convoi présidentiel, au milieu d'une foule en délire. Un concours de circonstances bienheureux y a contribué: il y eut au début le report de notre voyage en Argentine en raison des délais de visas. Nous nous y sommes rendus finalement du 29 novembre au 12 décembre. Le retour en bus de Rosario à Buenos Aires était prévu pour le 10 décembre dans l'après-midi. À la dernière minute, notre vol à Rosario a été annulé à partir de Mendoza, ce qui nous a fait manquer un grand dîner préparé par la communauté pour nous recevoir. Les Aerolineas Argentinas nous ont toutefois transportés à Buenos Aires, nous offrant une nuit d'hôtel près de l'obélisque, à quatre blocs de la Plaza de Mayo, où nous avons accouru à la fin de la cérémonie d'investiture diffusée en direct à la télévision.
La présidente sortante, Cristina Kirchner, venait de se retirer la veille du palais présidentiel pour se rendre à Calafate, où elle possède des chalets de luxe. Nous les avions visités une semaine auparavant, notre circuit commençant par cette étape singulière, à l'extrême sud du pays. Une région où les glaciers à la beauté immuable explosent au contact de l'eau, qu'ils atteignent en coulant à partir des montagnes de Patagonie, qui dominent les grands lacs.

Biographie
Juliana Awada est née le 3 avril 1974 dans la capitale Buenos Aires. Elle épouse en 2010 le gouverneur Mauricio Macri. Son père Abraham Awada, originaire de Baalbeck, et sa mère Elsa Esther Baker Yessi, d'origine syrienne, sont bien connus de la communauté libanaise et fréquentent régulièrement l'ambassade du Liban à Buenos Aires.
Juliana a beaucoup voyagé durant son enfance avec sa mère à Paris, Londres et New York, principalement à la recherche de collections de mode pour l'entreprise familiale qu'elle dirige actuellement avec son frère Daniel et sa sœur Zoraida. Son second frère, Alejandro, est acteur, et sa seconde sœur, Leila, artiste plasticienne. Juliana avait contracté un premier mariage en 1997 avec Gustavo Capello, duquel elle a divorcé, avant d'établir une relation avec Bruno Laurent Barbier, de nationalité belge, dont elle a eu une fille, Valentina. De son dernier mariage avec Mauricio Macri, elle a eu une fille, Antonella, née en 2011.
Son caractère jovial et son amour pour la mode en font aujourd'hui la coqueluche des revues argentines, qui profitent de cette belle occasion pour suivre les détails de la vie de couple de leur nouveau président.

Rencontres libanaises sur un parcours argentin
Il y a eu le magasin de glaces « Tufic », dont le propriétaire, de la famille Kairouz, a complètement perdu tout contact avec ses racines. Ou encore le snack « Sinior Shawarma », dont la vitrine affiche une tête avec le tarbouche (couvre-chef traditionnel) typiquement libanais, dans la capitale argentine. Mais c'est surtout à Mendoza, célèbre pour ses vignobles, que nous attendaient des rencontres inopinées.
À San Rafael, Nadim Saad, de notre équipe de voyageurs, fait la connaissance de sa cousine lointaine Salma Saad, venue nous accompagner lors de la visite de la Bodega las Abejas. Salma s'est avérée être originaire de Amioun, tout comme lui. Sa famille, l'une des plus connues de la région, compte près de trois cents personnes, dont aucune ne s'est jamais rendue au Liban.
Le lendemain, Rosarita Tawil, membre de RJLiban, se rend au salon de coiffure près de l'hôtel à Mendoza. Elle tombe sur deux jeunes coiffeurs libanais, Daniel et Luis Dominguez qui lui confient : « Nos grands-parents appartiennent aux familles Doumit et Moghayar, ce qui a donné dans la transcription Dominguez. Nous sommes près de 150 descendants d'émigrés d'une même famille, mais nous n'avons gardé aucun contact avec le Liban. »
Deux jours auparavant, le 6 décembre, en arrivant de Neuquén à Mendoza, nous allons à un dîner-concert animé par deux chanteuses et un guitariste classique. Intriguée par notre grand groupe, l'une d'entre elles nous demande, entre deux chansons traditionnelles andines, d'où l'on vient. Quand nous lui annonçons que nous sommes libanais, elle est agréablement surprise et déclare au micro que sa collègue, Paula Neder, est libanaise. Les trois artistes se portent immédiatement candidats pour le prochain Festival culturel de l'émigré au Liban, qu'ils ont hâte de découvrir.

En parcourant les longues routes de la plaine patagonienne au cœur de l'Argentine sous un beau soleil printanier, nos pensées se tournent vers les milliers d'ancêtres de Libanais qui ont effectué, à la fin du XIXe siècle, ce même chemin pour y construire une vie digne.Lancés sur les pas de leurs descendants, nous découvrons une nature qui les avait souvent attirés par sa ressemblance...