Sécurité renforcée près des lieux touristiques de la capitale française. Joel Saget/AFP
Après les attentats de Paris, le 13 novembre, revendiqués par le groupe État islamique (EI), mais aussi ceux de Beyrouth, de Bagdad et d'Ankara, ainsi que le crash, après l'explosion d'une bombe, de l'avion russe dans le Sinaï, le centre Carnegie Europe se penche sur les impacts de ces attaques sur l'équilibre entre sécurité et liberté dans les États de droit, ainsi que sur la position à adopter au niveau européen comme au niveau régional face à la menace terroriste. Les chercheurs Marc Pierini (ancien ambassadeur de l'Union européenne en Syrie et en Turquie), Jan Techau (directeur du centre Carnegie Europe), ainsi que Yezid Sayigh (chercheur principal au centre Carnegie pour le Moyen-Orient) répondent aux questions des journalistes lors d'une conférence téléphonique. En voici quelques-unes :
Va-t-il y avoir des débats concernant les nouvelles mesures sur les libertés civiles prises en France et en Belgique, ainsi qu'une possible remise en question des frontières Schengen ?
Jan Techau : Je pense que c'est une réaction naturelle. Cela a été extrêmement traité ces jours-ci par la presse belge qui se demande : « Allons-nous trop loin ? » La même chose doit se passer en Allemagne. Je ne suis pas assez expert de la sécurité intérieure pour affirmer si cela est justifié ou pas. Mais il est clair qu'il s'agit d'une tentative pour les autorités de recouvrer la confiance de la population.
Marc Pierini : L'extension de l'état d'urgence décrétée ce matin (hier) est un acte nécessaire décidé par le gouvernement, car nous nous trouvons de fait devant un « 11-Septembre français ». Personne ne comprendrait qu'aucune mesure ne soit prise. (...) L'EI a pris un avantage sur la liberté d'expression en utilisant les réseaux sociaux, les médias, ainsi qu'en circulant librement grâce à Schengen. Dans le futur proche, il y aura un grand soutien de la part de la population concernant ces mesures.
Que peut faire l'Europe pour anéantir l'EI ?
Marc Pierini : La première réaction tend à l'établissement de plus de contrôles à la déclaration de l'état d'urgence ainsi qu'un regain d'interventions militaires sur le terrain syrien. Il n'y a pas de « recette » pour vaincre l'EI, mais, depuis les attentats de Paris, on voit un changement d'attitude, pas uniquement de la part de la France et de l'Europe, mais aussi de la Russie et de la Turquie. Un revirement des positions turques comme russes, à l'égard de l'État islamique, a été constaté au sommet du G20 à Antalya, le week-end dernier. Il y a eu un moment embarrassant quand Poutine a brandi des photos satellite de tonnes de pétrole destinées à la Turquie. Cela a fait bouger la position turque. (Lors du sommet, Vladimir Poutine a évoqué la nécessité urgente d'empêcher la vente illégale de pétrole, incitant les pays finançant indirectement l'EI à arrêter cela).
Jan Techau : (...) L'EI ne peut être battu qu'au sol. C'est la région elle-même qui doit s'investir pour le combattre. (...) C'est pourquoi il est important que les Saoudiens, les Iraniens et les autres pays voisins s'investissent, car, sans cela, l'Europe et les États-Unis risquent d'échouer dans leur lutte contre le terrorisme.
Y a-t-il des possibilités que la Jordanie, l'Égypte et les pays du Golfe envoient des troupes ou leurs conseillers militaires sur le terrain, afin de contrer l'EI ?
Jan Techau : Les troupes irakiennes n'iront pas affronter l'EI. Je doute que les Saoudiens non plus n'envoient leurs troupes. Les Égyptiens pourraient envoyer des hommes en Syrie, dans un programme de maintien de la paix. Les ministres arabes de l'Intérieur se réunissent régulièrement et ont la possibilité de coordonner leurs efforts dans la lutte contre le terrorisme. Mais je reste dubitatif sur leur efficacité.
Y a-t-il des moyens pour parvenir à assécher les ressources financières de l'EI?
Yezid Sayegh : Les frappes américaines contre les citernes de pétrole étaient importantes, car c'était une première. Cela révèle qu'il y a cependant un dilemme, car le pétrole local n'est pas produit directement par l'EI, mais par des tribus locales. Les jihadistes prennent évidemment leur part. Et une grande partie du pétrole finit par atterrir chez des groupes de l'opposition, qui en ont terriblement besoin pour les hôpitaux ou autres. Le problème qui se pose est que si vous coupez cela entièrement, vous causez du mal à la population, pas seulement celle sous contrôle de l'EI, mais aussi celle (dans les autres zones) en Syrie. C'est le dilemme. Une chose peut cependant être faite : que la Turquie puisse faire attention à ce que rien ne soit exporté, comme les pièces archéologiques ou le pétrole, par-delà ses frontières. Parce que cela ne revient pas aux populations locales, puisque l'EI en dégage du bénéfice net.
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POUR VENIR À BOUT DE TOUS LES DAESCH... DES ORIGINAUX ET DES COPIES... IL FAUDRAIT BOMBARDER LES PAYS FINANCIERS ET POURVOYEURS DE TOUS LES EXTRÉMISTES... DES DEUX FACES DE LA MÊME MONNAIE...
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20 h 16, le 20 novembre 2015