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Moyen Orient et Monde - commentaire

L’absence de politique syrienne des États-Unis

Barack Obama pourrait s'engager à collaborer avec tous les pays (les alliés et les autres) ayant un intérêt dans la résolution de la crise syrienne. Jonathan Ernst/Reuters

L'entrée audacieuse de la Russie dans la guerre civile en Syrie pourrait avoir de fâcheuses conséquences pour son leadership. Mais au Moyen-Orient, tout le monde peut perdre de nos jours. Tout comme la Russie pourrait être perdante à cause de son entrée dans le conflit, les États-Unis pourraient être perdants pour vouloir rester en dehors (ou plus précisément, pour ne pas concevoir ni encore moins poursuivre une politique cohérente et ciblée dans le pays).
Pour le meilleur ou pour le pire, la politique russe en Syrie reflète non seulement un objectif, mais également une véritable stratégie visant à l'atteindre (une stratégie que le président russe Vladimir Poutine a dernièrement fait progresser en rencontrant le président syrien Bachar el-Assad lors d'entretiens à Moscou. Maintenant que la Russie a frappé au moins une partie des ennemis d'Assad sur leurs talons, le Kremlin a décidé que le moment est venu de discuter des arrangements politiques à venir (ou peut-être, plus précisément, que le moment est venu de dire à Assad ce qui va se passer ensuite).
Malheureusement, la politique du président des États-Unis Barack Obama n'a pas la même cohésion. Certes, une grande partie des critiques selon lesquelles les choix de politique étrangère de son administration (par exemple la décision de rester hors de Syrie) reflètent sa faiblesse ou son indécision sont inexactes. Ces accusations ne reflètent pas la réalité autant que la tendance (qui s'est intensifiée au cours de la campagne présidentielle américaine) à utiliser Obama comme bouc émissaire pour les problèmes du monde.
Les critiques feraient bien de se rappeler qu'il y a moins de dix ans, la communauté internationale appelait les États-Unis à prendre davantage de gants au moment de décider quand ils devaient agir ou non avec audace. Et c'est précisément ce qu'a fait Obama en Syrie : il a évalué les options et a conclu qu'il n'était pas dans l'intérêt des États-Unis d'intervenir sur le terrain en Syrie. À l'inverse, des frappes aériennes menées par les États-Unis contre l'État islamique préservaient ces mêmes intérêts.
Mais il y a une différence entre choisir de ne pas intervenir et être dépourvu de toute sorte de stratégie cohérente. Ce que l'on peut reprocher à Obama, c'est son échec à expliciter les raisons de son choix de non-intervention et à définir les autres mesures que les États-Unis peuvent prendre pour aider à atténuer la crise.
Il semble évident qu'une des principales raisons de cet échec est l'absence de consensus, non seulement au sein du gouvernement (interrogez cinq sénateurs sur ce qu'il faut faire en Syrie et vous obtiendrez probablement au moins six réponses), mais aussi au sein de l'administration. En fin de compte cependant, c'est Obama lui-même qui doit porter le chapeau dans cette histoire : un président qui, dans d'autres domaines a démontré une capacité impressionnante à reconnaître la complexité du problème et à montrer la marche à suivre.
Les difficultés de l'administration en Syrie ont émergé dès le départ, en partant du principe qu'Assad pourrait être évincé dans les semaines qui ont suivi le déclenchement du conflit. Ce fut une erreur de calcul comparable à celle de son prédécesseur George W. Bush, qui a lancé une invasion de l'Irak sur les hypothèses erronées selon lesquelles non seulement Saddam Hussein aurait possédé des armes de destruction massive, mais aussi, fait plus important, que l'Irak post-Saddam allait rapidement devenir une démocratie stable.
Une fois qu'il a été clair qu'Assad ne se rendrait pas sans combattre, l'administration Obama a limité ses efforts en vue d'obtenir son départ sous l'humiliation publique : une tactique aux antécédents douteux quand il s'agit de dictateurs. Et l'interdiction tactiquement stupide de la participation d'Assad à toute frappe menée par les États-Unis contre l'État islamique (sans parler des appels à des factions de l'opposition pour organiser des élections provisoires) appartient au registre de la création de slogan, pas à celui de la politique.
Certes, la crise syrienne est extrêmement complexe, si complexe qu'essayer de la comprendre excède la patience de l'opinion publique américaine. Mais s'il existe un président américain capable d'en expliquer les complexités, c'est bien Obama. Une fois cela fait, Obama doit donner une direction et s'y tenir.
Tout d'abord, Obama pourrait s'engager à collaborer avec tous les pays (les alliés et les autres) ayant un intérêt dans la résolution de la crise syrienne. Quelles que soient leurs différences, ces pays partagent un intérêt dans la restauration de la paix. Et la stabilité en Syrie pourrait fournir un terrain d'entente suffisant sur lequel bâtir une politique cohérente.
En outre, bien que l'avis des États-Unis selon lequel Assad ne doit pas rester au pouvoir puisse être moralement convaincant, la politique officielle des États-Unis vis-à-vis de la Syrie doit laisser cette décision au peuple syrien. Au lieu d'essayer d'imposer un nouveau leadership syrien, les États-Unis doivent convoquer des représentants choisis en interne pour les aider à rédiger une Constitution et à prendre d'autres dispositions politiques.
Enfin, Obama doit promettre de continuer à collaborer avec des entités qui partagent les mêmes idées de dégrader et détruire l'État islamique. Après tout, tant que les combattants de l'État islamique déstabiliseront le Moyen-Orient, la Syrie ne pourra jamais être en sécurité.
La Russie a fait le choix d'intervenir militairement dans la guerre civile en Syrie, alors qu'Obama a décidé que les États-Unis n'entreront pas en concurrence avec le Kremlin par le déploiement de leurs propres troupes. Mais les États-Unis n'ont pas besoin de forces terrestres pour faire la différence en Syrie. Ils ont simplement besoin d'une politique cohérente qui propose des objectifs concrets et réfléchis.

© Project Syndicate, 2015.

L'entrée audacieuse de la Russie dans la guerre civile en Syrie pourrait avoir de fâcheuses conséquences pour son leadership. Mais au Moyen-Orient, tout le monde peut perdre de nos jours. Tout comme la Russie pourrait être perdante à cause de son entrée dans le conflit, les États-Unis pourraient être perdants pour vouloir rester en dehors (ou plus précisément, pour ne pas concevoir ni...

commentaires (4)

JE CORRIGE : L'ABRUTOPOLITIQUE EST À L'HONNEUR...

LA LIBRE EXPRESSION

11 h 28, le 31 octobre 2015

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Commentaires (4)

  • JE CORRIGE : L'ABRUTOPOLITIQUE EST À L'HONNEUR...

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 28, le 31 octobre 2015

  • L'ABRUPOLITIQUE EST À L'HONNEUR...

    LA LIBRE EXPRESSION

    20 h 05, le 30 octobre 2015

  • "La Russie n'avait plus le choix que d'intervenir militairement dans la guerre civile en Syrie, alors que les États-Unis n'ont pas besoin de forces terrestres pour faire la différence en Syrie.". Clair comme bonjour ! Ciao, pantin Nain poutinien !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    15 h 17, le 30 octobre 2015

  • ....Washington a admis que les terroristes qui se sont introduits en Syrie et qui tentent de renverser le gouvernement élu de la Syrie, sont « nos gars. »Dans une interview à Fox « News », un haut fonctionnaire du gouvernement américain a déclaré: « Poutine a délibérément ciblé nos forces. Nos gars se battent pour leur vie « .Le professeur Michel Chossudovsky rapporte que «nos gars» signifie les conseillers militaires occidentaux, des agents du renseignement et des mercenaires recrutés dans des Sociétés de sécurité privées.Un fonctionnaire de la défense a déclaré à Fox « News » que les Russes sont « complètement fourbes dans leur désir de battre l’EI ». Selon le régime Obama, la totalité des centaines de frappes de missiles et de raids aériens contre l’Etat Islamique est dirigée contre les terroristes modérés formés par les Etats-Unis – tous les cinq ! – et contre les centaines de conseillers occidentaux.De toute évidence, le haut fonctionnaire de la défense avait oublié que le général Lloyd Austin, qui dirige le Commandement central de l’armée américaine, a récemment déclaré au Senate Armed Services Committee qu’il ne restait plus sur le champ de bataille que 4 ou 5 « terroristes modérés » formés par les Etats-Unis. Obama a arrêté le gaspillage des 500 millions de dollars payés par les contribuables Américains pour former des «terroristes modérés» pour renverser le gouvernement syrien. Les bénéficiaires de la formation ont pris l’argent et ont disparu.

    FRIK-A-FRAK

    11 h 33, le 30 octobre 2015

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