Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Irak

Face à la contestation, Abadi approuve des réformes majeures

La corruption instituée dans le pays, dont bénéficient les partis politiques depuis de nombreuses années, sera un obstacle difficile à surmonter.

Le Premier ministre irakien Haider al-Abadi durant une réunion extraordinaire avec les officiels irakiens à Bagdad dans le but de réformer le système politique. HO/Iraqi Prime minister’s office/AFP

Le gouvernement irakien de Haider al-Abadi a approuvé hier des réformes majeures prévoyant la suppression d'importants postes et de privilèges, à la suite d'une vague de protestations contre la corruption et la mauvaise gouvernance.
Mais ces réformes, dont certaines doivent normalement faire l'objet d'un amendement constitutionnel, devront être encore soumises à l'approbation du Parlement où la bataille risque d'être dure, avant leur mise en application. « Le gouvernement a approuvé à l'unanimité, lors d'une session extraordinaire, le premier plan de réformes présenté par le Premier ministre », a précisé un communiqué officiel quelques heures après l'annonce des mesures envisagées par M. Abadi. Parmi elles, la plus drastique est la suppression « immédiate » des postes des trois vice-Premiers ministres et trois vice-présidents. Ces derniers postes sont occupés par Nouri al-Maliki, le prédécesseur de M. Abadi et son principal rival, Oussama al-Noujaifi, ex-chef du Parlement, et Iyad Allawi, ex-Premier ministre. MM. Maliki, dont les huit années au pouvoir ont été entachées d'accusations de corruption, d'autoritarisme et d'aliénation de la minorité sunnite, et Noujaifi ont dit soutenir ces réformes, ce qui laisse supposer que les changements proposés ont été faits dans le cadre d'un accord qu'ils ont approuvé. « Je renouvelle mon soutien à ces réformes qui sont nécessaires », a déclaré M. Maliki. Le plan de réformes ambitieux annoncé par M. Abadi prévoit également une refonte majeure du système de nomination des hauts fonctionnaires, à savoir l'abolition « des quotas confessionnels ». Il propose aussi une révision de la façon dont les responsables sont nommés, dans un pays où les principaux postes publics sont attribués selon la confession ou l'ethnie.

« Suppression de quotas »
« Les quotas de partis et de confessions » doivent être supprimés, a indiqué M. Abadi, proposant que les candidats aux postes à haute responsabilité soient sélectionnés selon « leurs compétences, honnêteté et expérience » par un comité désigné par le Premier ministre. En Irak, où la communauté chiite est majoritaire, le chef de l'État est un Kurde, le Premier ministre est un chiite et le chef du Parlement un sunnite, en vertu d'un accord tacite. L'annonce des réformes survient après la multiplication ces dernières semaines de manifestations à Bagdad et dans le sud du pays contre la corruption et l'incompétence de la classe politique, sur fond de coupures quotidiennes de l'électricité sous une chaleur accablante avec des températures dépassant les 50 ° Celsius.
La plus haute autorité chiite d'Irak, l'ayatollah Ali al-Sistani, a ajouté à la pression vendredi en appelant M. Abadi à « être plus courageux et plus audacieux » dans la lutte contre la corruption et dénoncer publiquement les politiciens hostiles aux réformes. Reste que la corruption instituée en Irak, dont bénéficient les partis politiques depuis de nombreuses années, sera un obstacle difficile à surmonter.
De surcroît, le pays reste miné par les dissensions confessionnelles entre musulmans chiites et sunnites. Pendant le règne du sunnite Saddam Hussein, chiites et Kurdes ont été opprimés, ce qui a nourri un ressentiment qui perdure encore aujourd'hui, neuf ans après la mort du dictateur.

« Corrompu », « décrépite », « inadapté »
Ces rancœurs ont été mises à profit par le groupe jihadiste sunnite État islamique (EI) qui a pris de vastes régions du pays en juin 2014, s'appuyant sur une communauté sunnite qui s'estime aujourd'hui marginalisée par le pouvoir chiite.
Parmi les réformes proposées, figure aussi la « réduction immédiate et globale » du nombre de gardes du corps. Un problème récurrent en Irak, où des officiels ont de véritables escouades de protection, et d'autres en embauchent moins que permis, et empochent la différence de salaire. La suppression des « provisions spéciales » allouées aux hauts responsables, en poste ou à la retraite, est également prévue.
Les hauts salaires, les voitures de fonction et les très généreuses retraites des hauts fonctionnaires ont été conspués par les manifestants irakiens, alors que les finances du pays sont sévèrement touchées par la chute des prix du pétrole et les dépenses militaires.
Plusieurs dossiers de corruption, anciens ou récents, seront en outre rouverts, sous la supervision d'une commission dédiée, en vertu des réformes. « Le système est corrompu jusqu'à la moelle. La Constitution est décrépite, le cadre législatif est inadapté et la classe politique totalement corrompue et incompétente », fustige Zaid al-Ali, constitutionnaliste et auteur de La lutte pour le futur de l'Irak. Pour cet expert, « tous les partis politiques profitent directement du système en place, c'est pour ça que rien n'a changé depuis 2005 ».

Le gouvernement irakien de Haider al-Abadi a approuvé hier des réformes majeures prévoyant la suppression d'importants postes et de privilèges, à la suite d'une vague de protestations contre la corruption et la mauvaise gouvernance.Mais ces réformes, dont certaines doivent normalement faire l'objet d'un amendement constitutionnel, devront être encore soumises à l'approbation du Parlement...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut