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Moyen Orient et Monde - Débat

Faut-il abolir le drapeau des confédérés ?

Pour ses 21 ans, Dylan Roof avait reçu en cadeau une arme à feu qu'il a déversée dans une église en brûlant le drapeau américain et brandissant celui des confédérés, deux actes au relent très « White supremacy ». Et qui posent une question fondamentale : doit-on en finir définitivement avec cet étendard qui a accompagné l'indépendance US ?


Il se nomme Dylan Roof, c'est un Blanc de la Caroline du Sud, et il vient de tuer neuf paroissiens noirs dans l'enceinte de leur historique église méthodiste Emmanuel A.M.E. Un crime haineux que la justice a pris en main. Quant à son insulte à la bannière étoilée et son remplacement par le drapeau des confédérés, elle fait le sujet d'un très grave débat impliquant que la guerre civile n'est pas complètement terminée. Et que si l'État américain et sa Constitution ne sont absolument pas racistes, ce sentiment reste encore bien ancré chez certains individus. Et si Charleston demeure sous haute tension, malgré les appels au calme des leaders de tous les bords, le reste du pays n'en est pas moins très mal à l'aise.
Dylan Roof, paysagiste au chômage, ne souffre d'aucune maladie psychique. Il n'appartient à aucun groupe extrémiste connu, mais il cultive une colère sociale en solitaire qu'il a exprimée par sa tuerie dans une église fréquenté par des Noirs. Il apparaît que ceux qui se considèrent ainsi justiciers, à titre personnel, se font de plus en plus nombreux au pays de l'Oncle Sam. Et Roof n'a pas caché une telle volonté. Il a posté un manifeste sur la Toile ainsi rédigé : « Je n'ai pas le choix. Je ne suis pas en position d'aller dans le ghetto et de me battre. J'ai choisi d'intervenir à Charleston parce que c'est la cité la plus historique de mon État et, parce que, à un moment donné, la proportion des Noirs y était supérieure à celle des Blancs. Nous n'avons pas de skinheads, pas de réel Ku Klux Klan, et personne ne fait rien, à part parler sur Internet. Alors, quelqu'un devait avoir le courage de le faire au grand jour. Et je pense que c'est moi. »

Fierté ancestrale vs legs raciste
Il l'a fait sans hésitation, tuant de sang-froid, exécutant ainsi sa mission « sacrée » et endeuillant sa région, où le drapeau américain a été mis en berne alors que le drapeau des confédérés flotte toujours bien haut au-dessus du Parlement local situé à Columbia, capitale de la Caroline du Sud. Ce symbole de la lutte contre l'abolition de l'esclavage ne baissera la garde que par une décision des élus locaux qui n'ont pas encore bougé leur petit doigt. Ce sujet divise les leaders des deux partis. Plusieurs républicains, dont des candidats à la prochaine présidentielle (Mike Huckabee et Rick Santorum), ont évité de prendre position, alors que Jeb Bush avait déjà résolu ce problème en enlevant du siège gouvernemental de la Floride ce drapeau en 2001, lorsqu'il était le gouverneur de cet État. Hillary Clinton n'a pas abordé ce sujet de front, mais a invité, avec force, les Américains à discuter des divisions raciales.
Le week-end dernier, un grand rassemblement antidrapeau à eu lieu à Columbia, sachant qu'en Caroline du Sud, la politique du drapeau est bien complexe. En novembre dernier, les sondages étaient les suivants : 73 % des Blancs voulaient le garder et 61 % des Noirs voulaient l'ôter. Les premiers allèguent que c'est l'héritage de leurs « fiers » ancêtres qui ont combattu pour l'indépendance de leur État. Pour les seconds, cet héritage est haineux et raciste.

« From sea to shining sea »
D'autre part, des activistes viennent de lancer un appel sur Facebook pour que le 27 juin soit « le jour où l'on brûlera le drapeau confédéré ». Il y est dit : « La guerre civile est terminée et le drapeau des confédérés flotte toujours. Heureusement, le premier amendement de la Constitution nous donne la liberté d'expression. Nous allons l'exercer en brûlant le drapeau de l'esclavage "from sea to shining sea" (tiré de l'hymne patriotique America the Beautiful). »
Avant-hier, dans une interview podcast avec le comédien Marc Maron, le président Barack Obama jauge ainsi les actuelles tensions : « Le legs des lois discriminatoires, appliquées dans toutes les institutions, jette encore son ombre sur nous et fait partie de nos gènes. En clair, nous ne sommes pas encore guéris du racisme. Ce n'est pas seulement pour être poli qu'on ne dit pas Nègre en public. Ce n'est pas ainsi que l'on mesure l'existence ou pas du racisme. Les sociétés ne peuvent pas, du jour au lendemain, effacer tout ce qui s'est passé 200 ou 300 ans auparavant. »

Le cas Earl Holt III
Pour preuve, il y a deux décennies, la statue d'un soldat confédéré qui était placée dans une grande artère de la ville d'Alexandria (à 20 minutes de Washington) avait créé une grande discorde entre les habitants, les uns la voulant, les autres pas. Un matin, elle avait disparu. On n'a jamais su qui avait joué les Salomon pour rendre la paix à cette pittoresque ville.
En attendant, c'est demain vendredi que le président Barack Obama se rendra à Charleston pour participer aux obsèques du pasteur, Clementa Pickney, tué dans sa propre église et pour faire son éloge funèbre. Il sera accompagné de son vice-président Joe Biden (tous deux sont des amis du pasteur) et de la Première dame, Michelle Obama.
À noter qu'est venue se greffer à cette tragédie la révélation qu'un leader suprématiste, Earl Holt III (dont le jeune tueur se serait inspiré), avait offert des milliers de dollars pour soutenir la campagne présidentielle du Parti républicain. Ce qui a poussé trois des candidats se présentant sous cette bannière à restituer la partie de leur budget provenant de cette source, dont ils affirment n'avoir pas connu l'identité. Il s'agit de Ted Cruz, Rick Santorum et Rand Paul.
Tout cela a nettement augmenté l'inquiétude de beaucoup de voir la trame du tissu social américain commencer à s'élimer.

Il se nomme Dylan Roof, c'est un Blanc de la Caroline du Sud, et il vient de tuer neuf paroissiens noirs dans l'enceinte de leur historique église méthodiste Emmanuel A.M.E. Un crime haineux que la justice a pris en main. Quant à son insulte à la bannière étoilée et son remplacement par le drapeau des confédérés, elle fait le sujet d'un très grave débat impliquant que la guerre civile...
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