Depuis le 7 janvier, aujourd'hui date-clé dans l'histoire, le terme « liberté » revient sans cesse dans les débats : « liberté d'expression », « liberté de culte », « liberté de pensée », liberté, liberté, liberté... Au point que ce mot en perd tout son sens. Le massacre du 10 rue Nicolas-Appert a fait resurgir, pour le moment en tout cas, la peur d'un débat qu'on se refuse obstinément à lancer. Et depuis, tout un chacun se veut le pourfendeur de l'empêcheur de tourner en rond. Tout le monde est « avec » la liberté d'expression, cela semble incontestable. Mais certains lui posent des conditions. Alors où se situe exactement la limite entre la liberté d'expression et l'offense ? Le blasphème ? Y en a-t-il ?
Pour le cheikh Mohammad Noukkari, juge dans un tribunal chérié et enseignant à l'Université Saint-Joseph de Beyrouth (USJ), « dès qu'il s'agit de la religion juive, tout le monde s'indigne, comme on l'a vu avec l'affaire Dieudonné. Mais quand les chrétiens et les musulmans sont dépeints de manière insultante, on laisse passer... C'est du deux poids, deux mesures ». Et de renchérir : « Il y a bien une loi pénalisant la négation de la Shoah ; s'il faut partir du fameux principe d'égalité, il faut une loi pénalisant l'insulte à l'islam et à la chrétienté », plusieurs fois visée par les caricatures de Charlie Hebdo, des pièces de théâtre, etc. Mohammad Noukkari tempère néanmoins ses propos en affirmant être « sans aucune hésitation » contre l'attentat qui a visé le journal satirique la semaine dernière. Il propose, au lieu de la violence, une loi contre les critiques, « infondées et gratuites » nuance-t-il quand même, des trois religions monothéistes.
Faut-il donc croire que la religion, et plus précisément l'islam, est incompatible avec la liberté d'expression ? « Pas quand elle se fait de manière académique et constructive », explique le professeur. « Dans ce cas précis, l'insulte est allée au-delà du dessin. On ne critique pas les athées (en Occident en tout cas...), alors pourquoi l'inverse est-il permis ? » s'interroge-t-il.
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La polémique remonte à loin. La loi française sur l'interdiction du port de signes religieux ostentatoires avait déjà fait d'énormes vagues, nombreux étant ceux qui s'estimaient visés dans leur liberté de culte. Leurs détracteurs affirment, eux, qu'il faut vivre selon la loi du pays d'accueil. « Il faut respecter la loi, concède à contrecœur Mohammad Noukkari, même en ce qui concerne le port du niqab ou de la burqa. Je ne suis pas d'accord avec cette loi, mais la France est un pays fondé sur la laïcité, aussi agressive que soit cette dernière. »
« Commerce pur et simple »
Certains articles ont également paru sur l'interdiction de la représentation du prophète Mohammad dans l'islam, se référant à certains passages du Coran n'interdisant pas « formellement » l'image du Prophète et de ses compagnons, mais les idoles en général, à une époque où les représentations païennes étaient légion. Toutefois, assène le cheikh Hassan Chahhal, le directeur beaucoup plus conservateur et rigoriste du Maahad al-Dawla al-Islamiyya à Tripoli, au Liban-Nord, « les signes religieux sont interdits dans l'islam, et le Coran dit explicitement qu'il est interdit d'insulter une religion et de représenter un prophète, quel qu'il soit. Et ces caricatures ne sont pas une simple plaisanterie, elles sont une insulte grave à toute une civilisation ancienne, une nation, une oumma », ajoutant que les activités du journal « ne relèvent pas du journalisme, mais du commerce pur et simple ; pour vendre, ils insultent ».
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Condamnant fermement, bien entendu, la tuerie de Charlie Hebdo, le cheikh affirme en outre que la marche historique de dimanche dernier, qui a rassemblé des millions de personnes, n'est en fait « qu'un moyen comme un autre de regagner de la popularité », en allusion à la chute dans les sondages du président français François Hollande depuis son élection. Quant aux imams ayant participé à la marche, « veulent-ils réellement être associés à l'interdiction d'une religion ? Car si c'est cela que recherche en fait la France, qu'elle le dise franchement ».
Tout comme Mohammad Noukkari, le cheikh Chahhal appelle à faire la différence entre la recherche scientifique, constructive, et l'insulte gratuite. « Il y a une peur certaine en France que l'islam se répande », estime-t-il. « La provocation engendre la rancœur qui engendre la violence ; c'est pour cette raison qu'il faut un dialogue honnête, ouvert entre religions, et même avec les laïcs et les athées, et l'affrontement des idées dans un cadre propice est le bienvenu », affirme le cheikh, soulignant que les médias ont pour rôle d'encourager ces échanges.
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Ben comme ça la france insulte l'Islam. Ce que la france doit craindre c'est l'extrémisme religieux musulman, juif et autre. Elle doit craindre aussi d'alimenter les terroristes qui finissent inéluctablement de se retourner contre elle, comme elle a fait ces dernières 4 années pour des fins politiques en l'occurrence décider à la place des Syriens qui doit les gouverner. La france n'a AUCUNE leçon à donner à ce sujet et que presse corrige le tire au lieu de lancer des titre bruyants et farfelus.
15 h 22, le 15 janvier 2015