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Moyen Orient et Monde - Polémique

« Il y a une peur certaine en France que l’islam se répande »

Deux cheikhs, l'un progressiste et l'autre rigoriste, appellent à un dialogue ouvert et constructif entre les différents courants religieux et les athées.

La présidente de l’association Imad en France (à droite), et mère d’un soldat tué en 2012 par Mohammad Merah, dans la Grande synagogue de Paris. Matthieu Alexandre/AFP

Depuis le 7 janvier, aujourd'hui date-clé dans l'histoire, le terme « liberté » revient sans cesse dans les débats : « liberté d'expression », « liberté de culte », « liberté de pensée », liberté, liberté, liberté... Au point que ce mot en perd tout son sens. Le massacre du 10 rue Nicolas-Appert a fait resurgir, pour le moment en tout cas, la peur d'un débat qu'on se refuse obstinément à lancer. Et depuis, tout un chacun se veut le pourfendeur de l'empêcheur de tourner en rond. Tout le monde est « avec » la liberté d'expression, cela semble incontestable. Mais certains lui posent des conditions. Alors où se situe exactement la limite entre la liberté d'expression et l'offense ? Le blasphème ? Y en a-t-il ?


Pour le cheikh Mohammad Noukkari, juge dans un tribunal chérié et enseignant à l'Université Saint-Joseph de Beyrouth (USJ), « dès qu'il s'agit de la religion juive, tout le monde s'indigne, comme on l'a vu avec l'affaire Dieudonné. Mais quand les chrétiens et les musulmans sont dépeints de manière insultante, on laisse passer... C'est du deux poids, deux mesures ». Et de renchérir : « Il y a bien une loi pénalisant la négation de la Shoah ; s'il faut partir du fameux principe d'égalité, il faut une loi pénalisant l'insulte à l'islam et à la chrétienté », plusieurs fois visée par les caricatures de Charlie Hebdo, des pièces de théâtre, etc. Mohammad Noukkari tempère néanmoins ses propos en affirmant être « sans aucune hésitation » contre l'attentat qui a visé le journal satirique la semaine dernière. Il propose, au lieu de la violence, une loi contre les critiques, « infondées et gratuites » nuance-t-il quand même, des trois religions monothéistes.
Faut-il donc croire que la religion, et plus précisément l'islam, est incompatible avec la liberté d'expression ? « Pas quand elle se fait de manière académique et constructive », explique le professeur. « Dans ce cas précis, l'insulte est allée au-delà du dessin. On ne critique pas les athées (en Occident en tout cas...), alors pourquoi l'inverse est-il permis ? » s'interroge-t-il.

 

(Lire aussi : « Je ne suis pas Charlie » : à l'étranger et sur le Net, la liberté d'expression fait débat)


La polémique remonte à loin. La loi française sur l'interdiction du port de signes religieux ostentatoires avait déjà fait d'énormes vagues, nombreux étant ceux qui s'estimaient visés dans leur liberté de culte. Leurs détracteurs affirment, eux, qu'il faut vivre selon la loi du pays d'accueil. « Il faut respecter la loi, concède à contrecœur Mohammad Noukkari, même en ce qui concerne le port du niqab ou de la burqa. Je ne suis pas d'accord avec cette loi, mais la France est un pays fondé sur la laïcité, aussi agressive que soit cette dernière. »

 

« Commerce pur et simple »
Certains articles ont également paru sur l'interdiction de la représentation du prophète Mohammad dans l'islam, se référant à certains passages du Coran n'interdisant pas « formellement » l'image du Prophète et de ses compagnons, mais les idoles en général, à une époque où les représentations païennes étaient légion. Toutefois, assène le cheikh Hassan Chahhal, le directeur beaucoup plus conservateur et rigoriste du Maahad al-Dawla al-Islamiyya à Tripoli, au Liban-Nord, « les signes religieux sont interdits dans l'islam, et le Coran dit explicitement qu'il est interdit d'insulter une religion et de représenter un prophète, quel qu'il soit. Et ces caricatures ne sont pas une simple plaisanterie, elles sont une insulte grave à toute une civilisation ancienne, une nation, une oumma », ajoutant que les activités du journal « ne relèvent pas du journalisme, mais du commerce pur et simple ; pour vendre, ils insultent ».

 

(Lire aussi : Le "vivre ensemble" à la française est-il en danger ?)


Condamnant fermement, bien entendu, la tuerie de Charlie Hebdo, le cheikh affirme en outre que la marche historique de dimanche dernier, qui a rassemblé des millions de personnes, n'est en fait « qu'un moyen comme un autre de regagner de la popularité », en allusion à la chute dans les sondages du président français François Hollande depuis son élection. Quant aux imams ayant participé à la marche, « veulent-ils réellement être associés à l'interdiction d'une religion ? Car si c'est cela que recherche en fait la France, qu'elle le dise franchement ».


Tout comme Mohammad Noukkari, le cheikh Chahhal appelle à faire la différence entre la recherche scientifique, constructive, et l'insulte gratuite. « Il y a une peur certaine en France que l'islam se répande », estime-t-il. « La provocation engendre la rancœur qui engendre la violence ; c'est pour cette raison qu'il faut un dialogue honnête, ouvert entre religions, et même avec les laïcs et les athées, et l'affrontement des idées dans un cadre propice est le bienvenu », affirme le cheikh, soulignant que les médias ont pour rôle d'encourager ces échanges.

 

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commentaires (5)

Ben comme ça la france insulte l'Islam. Ce que la france doit craindre c'est l'extrémisme religieux musulman, juif et autre. Elle doit craindre aussi d'alimenter les terroristes qui finissent inéluctablement de se retourner contre elle, comme elle a fait ces dernières 4 années pour des fins politiques en l'occurrence décider à la place des Syriens qui doit les gouverner. La france n'a AUCUNE leçon à donner à ce sujet et que presse corrige le tire au lieu de lancer des titre bruyants et farfelus.

Ali Farhat

15 h 22, le 15 janvier 2015

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Commentaires (5)

  • Ben comme ça la france insulte l'Islam. Ce que la france doit craindre c'est l'extrémisme religieux musulman, juif et autre. Elle doit craindre aussi d'alimenter les terroristes qui finissent inéluctablement de se retourner contre elle, comme elle a fait ces dernières 4 années pour des fins politiques en l'occurrence décider à la place des Syriens qui doit les gouverner. La france n'a AUCUNE leçon à donner à ce sujet et que presse corrige le tire au lieu de lancer des titre bruyants et farfelus.

    Ali Farhat

    15 h 22, le 15 janvier 2015

  • IL NE SE RÉPAND PAS... ON L'IMPORTE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 34, le 14 janvier 2015

  • La personne interroger ne connsait rien de la politique de la France. Le gouvernement tssent des liens avec les communautés juives et musulmanes mais ignore le plus souvent les chrétiens de tous horizons. Les musulmans de France ont quitte leur pays d'origine pour vivre plus librement et y trouver un travail mieux remunere. Les membres des communautés musulmanes exercent toutes les professions certains, par leur travail, ont réussi socialement, ils sont Ingenieurs, avocats, architectes… et meme ministres. Il est honteux et totalement inexact de dire que la France veut eliminer les musulmans. Mais c'est avec de pareils slogans que l'on lance le jihad. Ayant longtemps travaille a l'étranger, lorsque je faisait des remarques on me répondait invariablement : Si c'est mieux chez toi, retournes y". La civilisation arabe a eu son apogée, comme celle de Rome, d'Athene, ou celle des Mayas ou de la Chine ancienne. Si la civilisation arabe veut reprendre le dessus, qu'elle développe des trésors de littérature, d'art, d'ingénierie. Mais la violence ne mène qu'a la dictature et l'histoire nous apprend que les dictatures tiennent un temps, longtemps mais pas tout le temps. Il faut choisir.

    DUTAILLY Catherine

    13 h 59, le 14 janvier 2015

  • La France est un pays laïque où le confessionnalisme est proscrit. La déclaration des droits de l’homme précise : Art. 4. La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. En conséquence chacun est libre de pratiquer la religion qu’il veut. Les Français ne craignent pas plus les musulmans que les chrétiens ou les israélites dans la mesure où ils ne causent pas de troubles et n’entravent pas la liberté individuelle. Or, dans les pays où ils sont majoritaires, les musulmans obligent les non musulmans à se convertir à l’Islam et les massacres s’ils refusent. Les femmes n’ont aucun droit et sont traitées en esclaves. Ils n’arrivent même pas à s’accorder entre eux, se faisant la guerre entre autre entre sunnites et chiites. Les attentats qu’ils viennent de commettre démontrent qu’ils cherchent à déstabiliser la France pour pouvoir s’imposer. C’est normal dès lors que les français deviennent islamophobes. On aura beau déclarer qu’il ne faut pas faire d’amalgame, les français ne voient pas inscrit sur leur front s’ils sont des terroristes potentiels ou non. Heureusement, ils sont encore assez peu nombreux en France et ils ne sont pas, comme l’imagine Michel Houellebecq, près de prendre le pouvoir.

    Jacques MARAIS

    12 h 18, le 14 janvier 2015

  • Je ne reviendrais pas sur les propos ineptes des personnes interrogées. Concernant le sujet de cet article, repris dans le titre, il est évident qu'il existe une peur puisque l'idéologie a une vocation à se propager (l'islam sunnite surtout) et donc à s'imposer, voire à se substituer, à toute autre forme de culture. Il faut donc pour toutes les communautés européennes à laisser la place que mérite l'islam: une simple religion qui peut être respectée et suivie dans le cadre privé exclusivement

    Olivier Georges

    10 h 57, le 14 janvier 2015

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