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Moyen Orient et Monde - Le point

La guerre des sous-chefs

Front al-Nosra ? Dites plutôt front des perdants, des traîtres. L'État islamique ? Une farce...
La guerre fait rage entre les frères ennemis issus tous les deux du défunt État islamique d'Irak et de Syrie. Et pas seulement sur le terrain : sur la Toile aussi où les RPG et les rafales de mitrailleuse lourde sont remplacés par des noms d'oiseau. On l'aura compris, ces temps-ci il ne fait pas bon, aux yeux d'un autre combattant d'Allah, de prétendre se battre au nom du Tout-Puissant. Résultat : en Syrie, l'avenir n'inquiète plus outre mesure Bachar el-
Assad; en Irak, la contre-attaque des peshmergas a toutes les chances de réussir ; en Libye, c'est tout juste si la population de Benghazi n'en est pas encore à regretter les jours (mal)heureux où Mouammar Kadhafi régnait en potentat absolu, condamnée qu'elle est à subir deux jougs au lieu d'un, celui de la Choura des Frères musulmans et celui de la Choura des révolutionnaires.
Ainsi va le monde arabe, mal remis d'un printemps précoce, générateur d'une multitude d'allergies à décourager tous les antihistaminiques mis au point dans les laboratoires d'Europe et d'Amérique – sans compter les contrefaçons made in China.
L'histoire, vieille comme le monde, est née avec le premier des Capétiens (en l'an 987). Rappelez-vous le bref échange entre Hugues Ier et l'un de ses vassaux :
– Qui t'a fait comte ? lui rappelle-t-il.
– Qui t'a fait roi, rétorque l'interpellé.
Il n'est pas tout à fait exact que « l'histoire ne repasse pas les plats ». Elle le fait, et plus souvent qu'à son tour, mais en modifiant les noms et l'origine desdits plats. Ainsi, il était une fois deux chefs de guerre qui s'appelaient l'un Abou-Bakr el-Baghdadi, l'autre Abou-Mohammad el-Joulani. Il serait quelque peu exagéré de dire qu'ils s'aimaient d'un amour tendre. Tout déjà allait cahin-caha mais sans trop de dégâts. Jusqu'au jour où le grand manitou – comprendre Ayman el-Zawahiri – leur intima l'ordre de créer dans les régions sous leur contrôle un État islamique. Mais tandis que le chef de l'EIIL (la dernière lettre étant pour le Levant) s'exécutait illico, allant même jusqu'à s'introniser calife du nouvel État, le second faisait valoir que, dans son ordre de priorité, il plaçait en tête l'éviction du président syrien. Zawahiri, dans son incommensurable sagesse, émit alors un jugement de Salomon : Baghdadi fut condamné pour s'être montré impulsif et Joulani pour avoir porté le débat sur la place publique.
Depuis, les hostilités sont ouvertes, avec des bilans de plus en plus lourds, ce qui donne loisir au chef de l'État syrien de trouver son second souffle, à Barack Obama de prendre (enfin !) la décision de passer à l'action, au vent de changer de direction et, accessoirement, aux virils combattants de s'en prendre aux plus faibles, chrétiens et yazidis de préférence, en Irak, avec, pour l'EI, une propension à recourir à des méthodes héritées de l'ère médiévale et, pour les deux camps, à franchir la ligne rouge censée les séparer.
Depuis quelque temps, la guéguerre a pris des allures de bataille à trois, l'Armée syrienne libre de Salim Idriss jouant le rôle d'outsider, ce qui lui a coûté la perte de l'un de ses chefs, Abdel Moneim Halimi (Abou Bassir al-Tartoussi). L'autre couac
s'est produit le mois dernier à Deir ez-Zor, avec la mort d'Abou-Hazem (al-Nosra), surpris alors que, déguisé en femme et assis sur une chaise roulante, il tentait de fuir la ville qui venait de tomber aux mains de l'EI. On devait retrouver sur lui, selon celui-ci, des liasses de billets de banque. Mise en scène grotesque, selon ses partisans, indignés. Toujours est-il que le tomahawk de guerre est désormais déterré, avec des épisodes incroyables dans leur cruauté, comme, la semaine dernière, cette exécution de 700 membres d'une tribu syrienne.
Ces dernières semaines, les fronts internes semblent s'être démultipliés jusqu'à dénaturer la nature même du conflit et nourrir les appréhensions des bailleurs de fonds. À l'opposé, c'est d'un œil tout neuf que les grandes puissances commencent à regarder les Kurdes, ragaillardis par les frappes aériennes déclenchées depuis le 8 août par les États-Unis et reconnus, par Washington surtout, comme principale force susceptible de faire pencher la balance dans un sens favorable à un Occident peu enclin à remettre les pieds en terre mésopotamienne.
Désolé pour l'auteur de la constatation, mais non il n'est pas vrai que les loups ne se mangent pas entre eux. Ce qui n'est pas une mauvaise chose pour peu que la conséquence en soit un assainissement, même relatif, de la jungle arabe.

Front al-Nosra ? Dites plutôt front des perdants, des traîtres. L'État islamique ? Une farce...La guerre fait rage entre les frères ennemis issus tous les deux du défunt État islamique d'Irak et de Syrie. Et pas seulement sur le terrain : sur la Toile aussi où les RPG et les rafales de mitrailleuse lourde sont remplacés par des noms d'oiseau. On l'aura compris, ces temps-ci il ne fait...

commentaires (2)

Et dire que chez nous au Liban on a un dirigeant de l'opposition qui nous disait " fa yehkoumou etc... " et que persistent encore certains libanais a voir en lui un potentiel president de la republique . Dieu leur pardonne ils ne savent pas ce qu'ils disent . Ni ce qu'ils font .

FRIK-A-FRAK

10 h 52, le 19 août 2014

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Commentaires (2)

  • Et dire que chez nous au Liban on a un dirigeant de l'opposition qui nous disait " fa yehkoumou etc... " et que persistent encore certains libanais a voir en lui un potentiel president de la republique . Dieu leur pardonne ils ne savent pas ce qu'ils disent . Ni ce qu'ils font .

    FRIK-A-FRAK

    10 h 52, le 19 août 2014

  • Vous avez dit le Printemps arabe ? Dîtes plutôt le printemps de la barbarie qui couvait dans les entrailles arabes.

    Halim Abou Chacra

    10 h 39, le 19 août 2014

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