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Économie - Énergie

L’expert Nicolas Sarkis dénonce les « anomalies désastreuses » de la politique pétrolière libanaise

Dans une lettre ouverte adressée au président de la République, au Premier ministre et au président de la Chambre, l'économiste pétrolier, fondateur et ex-président de l'Arab Petroleum Research Center, Nicolas Sarkis, a fait part d'un rapport exhaustif portant sur les « anomalies désastreuses » de la politique pétrolière et gazière libanaise.
Notant que le développement possible d'une production pétrolière et gazière au large du Liban serait un événement positif pour le redressement de l'économie nationale, M. Sarkis a mis en garde contre « certains effets pervers plus ou moins semblables à ce qui est appelé en économie la "maladie hollandaise" : inflation, corruption, régression des activités économiques traditionnelles, etc ».
« Il devient de plus en plus urgent d'être vigilant pour éviter les dérapages et corriger les graves anomalies qui se manifestent déjà, et qui sont loin d'être rassurantes », a-t-il ajouté dans sa lettre.
Ces anomalies, qui font l'objet du rapport détaillé, ont été résumées par M. Sarkis à l'adresse des trois présidents dans les points suivants :

1 – Régime d'exploitation hybride et équivoque
« Parmi les principaux régimes d'exploitation d'hydrocarbures pratiqués dans le monde, les responsables libanais ont préféré procéder à une espèce de panachage entre celui des concessions et celui du partage de la production », a-t-il indiqué. « Au lieu toutefois de combiner les avantages des deux régimes évoqués en termes très généraux dans la loi pétrolière de 2010, les auteurs des deux premiers décrets d'application y relatifs ont en fait largement dénaturé et vidé de leur substance les avantages de l'un et de l'autre, à travers : a) Pour les redevances, propres au régime des concessions, des taux abusivement bas par rapport aux normes internationales, et b) Pour la participation effective et active de l'État dans les activités industrielles, propre au régime de partage de la production, une renonciation pure et simple à une telle participation », a-t-il déploré.

2 – Perte de 14 milliards de dollars à cause des rabais sur les redevances
« S'il y a une norme connue et généralement appliquée dans l'industrie pétrolière et gazière, c'est bien celle d'une redevance de 12,5 % au moins de la valeur de la production payable par l'opérateur au pays hôte. Aussi surprenant que cela puisse être, les auteurs de l'un des deux premiers décrets d'application, non encore approuvés, ont curieusement fixé la redevance pétrolière à un taux de 5 à 12 % seulement en fonction du volume de la production », a relevé M. Sarkis. « Plus étonnant encore, la redevance retenue pour le gaz naturel est tout simplement la plus basse au monde et reste figée à 4 % seulement. La simulation faite dans le rapport ci-joint montre que cette espèce de décote complètement injustifiée par rapport aux normes internationales se traduit pour le Liban par des pertes annuelles de 238 millions de dollars par an pour le gaz, et de 325 millions de dollars pour le pétrole, soit, pour des accords d'exploitation de 25 ans, un total d'environ 14 milliards de dollars. Ce sont là des estimations faites a minima qui pourraient être en réalité bien plus importantes encore », a-t-il détaillé.

3 – Détournement des prérogatives du pouvoir législatif
« Avec ses 27 pages portant sur des principes très généraux, n'indiquant aucun chiffre et aucun pourcentage, la loi pétrolière de 2010 fait franchement pâle figure à côté des dizaines de pages des deux premiers décrets d'application (en attendant une vingtaine d'autres), qui détaillent en long et en large les dispositions légales, financières et autres du régime d'exploitation pétrolière et gazière qui est envisagé », a dénoncé M. Sarkis. Et d'ajouter : « Tout se passe comme si les 128 membres du Parlement avaient donné aux 6 fonctionnaires membres de l'Autorité du pétrole (...) une procuration pour légiférer à leur place dans un domaine d'une importance aussi vitale pour le pays. Cela ressemble à s'y méprendre à un hijacking déguisé d'un pan très important des prérogatives du Parlement et constitue une grave atteinte à la séparation des pouvoirs (...) ».

4 – Opacité et manœuvres politiques
« Une autre anomalie de taille à signaler réside dans le fait qu'une main invisible braque le projecteur sur l'argent du pétrole qui viendrait inonder notre économie, alors qu'un silence étonnant entoure les mesures qu'il faut à tout prix prendre dès maintenant pour maximiser nos revenus (...) Aussi surprenant que cela puisse être, seuls quelques initiés ou ceux qui ont le bras assez long ont pu voir les textes de ces décrets dont on parle depuis des mois », a noté M. Sarkis.
« Il n'est pas étonnant que cette situation pose de nombreux points d'interrogation et suscite, à tort ou à raison, de graves soupçons. Des soupçons que seul un débat franc et transparent, mené au Parlement surtout, peut dissiper », a-t-il ajouté. Et de conclure : « À défaut de ce débat et de cette transparence, les rêves suscités par le pétrole et le gaz risquent de finir en cauchemars appelés : corruption, dilapidation d'une importante richesse nationale, exacerbation des tensions sociales et politiques, etc. »

Dans une lettre ouverte adressée au président de la République, au Premier ministre et au président de la Chambre, l'économiste pétrolier, fondateur et ex-président de l'Arab Petroleum Research Center, Nicolas Sarkis, a fait part d'un rapport exhaustif portant sur les « anomalies désastreuses » de la politique pétrolière et gazière libanaise.Notant que le développement possible...

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