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Face aux considérations des différentes religions, ce que pense la justice libanaise

Pour maître Nizar Saghieh, avocat et directeur exécutif du Legal Agenda, l’appareil judiciaire libanais « n’est pas indépendant dans la mesure où il est rattaché au système politique ». Celui-ci serait donc, concernant les lois en lien avec les droits de la femme, en train de s’opposer à ce que la femme libanaise obtienne ses droits. Ainsi, même si la femme libanaise aujourd’hui a acquis par exemple ses droits politiques ou économiques, on lui refuse toujours son droit le plus légitime qui est celui de donner sa nationalité à ses enfants. Le comité ministériel qui s’est penché sur la question en décembre 2012 a invoqué, comme prétexte à ce refus, la nécessité de maintenir l’équilibre démographique entre les confessions. Or il est inacceptable que des considérations d’ordre politique ou religieux prévalent sur le droit à l’égalité inhérent à tout individu.


Selon Me Saghieh, « aucune force politique au Liban ne peut prétendre être pour l’égalité entre l’homme et la femme ». « Octroyer à la femme ses droits (y compris le droit à ne pas être battue par exemple) résonne dans le discours populiste de certains leaders politiques comme une menace à l’unité de la famille, ce qui ébranlerait la force et la légitimité de la tradition », déplore-t-il, en observant que « ce discours populiste est différent du discours vrai et rationnel, mais il plaît aux citoyens et maintient les hommes politiques dans leur statut féodal ».


« Par ailleurs, les hommes politiques ont toutes les ressources de l’État à leur disposition (les emplois, les moyens financiers, etc.). Le citoyen devient par conséquent asservi ; comblé soi-disant de droits politiques, il n’obtient en définitive aucun droit personnel notamment les droits de l’homme reconnus et validés internationalement », relève-t-il.
Si au niveau de la société civile le discours a évolué, rares sont les changements qui ont été fait au niveau de la promulgation des lois qui protègent effectivement la femme. Il faudrait donc, selon Me Saghieh, assurer l’indépendance de la justice par rapport au politique et laisser au juge la possibilité de proclamer les droits (des femmes, entre autres) à partir des plaidoiries. « Les droits de la femme au Liban devraient s’inscrire dans un projet social avec des idées de droit et de justice. La classe politique devrait savoir que le compromis confessionnel ne peut pas perdurer sans l’existence d’un centre, en l’occurrence la justice, qui protège les droits de tous les Libanais », note-t-il.


Pour résumer, la violence familiale est culturelle, sociale, légitimée par le silence du politique et l’asservissement du système judicaire. La femme qui encaisse les coups portés à son amour-propre et à son corps a été éduquée dans l’idée que sa rébellion serait une offense à Dieu. Mais Dieu lui-même, aux dires des hommes de religion, en aurait pleuré. La femme victime de violence n’a pas toujours pensé interroger la loi ou osé consulter pour connaître ses droits. Pourtant la hotline de Kafa 03-018010 est à son service 24h/24 pour lui fournir des réponses. Peut-être que l’homme asservit-il la femme aussi parce qu’il est asservi lui-même, autrement, par son chef politique féodal. Il l’applaudit depuis au moins 30 ans comme son père avant lui applaudissait le père de cet homme-là. Quel intérêt aurait alors l’homme politique à accorder à la femme ses droits ? Il ferait de l’homme bourreau, qui maltraite la femme, un homme carencé sans souffre-douleur, un homme qui aura à se redécouvrir pour apprendre à penser, un homme qui voudra un jour sortir de prison, la prison de la soumission politique nourrie par la peur de l’autre.


Mais un jour, en avril 2010, le juge John Azzi a donné aux enfants de Samira Soueidan, nés de père égyptien, la nationalité libanaise et, un autre jour, en septembre 2013, la juge Arlette Tabet a protégé une femme et ses petites filles contre les agissements abusifs du mari (en lui rétribuant le domicile conjugal vendu à son insu et ses affaires personnelles confisquées). Cet homme et cette femme juges, ce couple de la justice, un homme et une femme, n’auraient-ils pas fécondé ensemble une justice de droits, indépendante et intègre, qui fait prévaloir le droit au politique, affranchissant par conséquent la société libanaise d’un Parlement affolant où des hommes quasi exclusivement accouchent les lois ?

Pour maître Nizar Saghieh, avocat et directeur exécutif du Legal Agenda, l’appareil judiciaire libanais « n’est pas indépendant dans la mesure où il est rattaché au système politique ». Celui-ci serait donc, concernant les lois en lien avec les droits de la femme, en train de s’opposer à ce que la femme libanaise obtienne ses droits. Ainsi, même si la femme libanaise...

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