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Agenda

Hommage à Liliane Germanos Ghazali

Lilo – tout doucement...

 

Lilo ! Maman universelle. Donneuse universelle. Généreuse universelle. Pour tous ceux et toutes celles que tu aimais. To2bor 3damé : ces deux mots résonnent encore et encore, on dirait que tu les as taillés dans le silex, qu’est-ce qu’ils nous faisaient (sou)rire. Lilo ! Si ces concepts un peu éculés, ces gros mots qui finissent par té : liberté, dignité..., n’existaient pas, tu les aurais (ré)inventés. J’avais 8 ans, en pleine guerre civile, à Hamra, sur le balcon. Moi : Lilo, j’ai envie de faire un truc, mais je n’ose pas... Toi : Sois libre ; fais toujours ce que tu veux sans jamais gêner l’autre. Moi : Je n’ai pas compris. Toi : Regarde... Et tu t’es couchée à même le sol sale de ce balcon qui n’en revient toujours pas pour m’expliquer que tu avais envie de prendre le soleil et que, par conséquent, tu le fais. Ici et maintenant. Et mes yeux béa(n)ts. D’admiration pour toi. Lilo ! Révolutionnaire. Tu as dé-testostéronisé le monde de la psychanalyse libanaise comme toi seule sais le faire : doucement, gentiment, fermement – dieux, qu’est-ce que tu vas manquer à ce monde-là : tu as tout appris à 90 % de ceux qui, aujourd’hui, analysent et dissèquent au Liban, plus ou moins ingrats, plus ou moins loyaux... Tel7asso deynté ; idem : ces deux mots résonnent encore et encore, on dirait que tu les as taillés dans le silex, qu’est-ce qu’ils nous faisaient (sou)rire. Lilo ! Ton éclat de rire impérial d’autodérision quand tu me faisais comprendre avec tout l’amour du monde que tu n’étais pas d’accord avec ce que je disais, quand je t’appelais Sigmunda, quand tu pestais contre les hommes politiques de ce pays, quand tu me parlais de ton métier. Lilo ! Les pommiers de Akoura pleurent doucement en te tissant un hamac pour tes siestes, et, entraînés, inspirés par Tony, si grand et si beau Tony, les chevaux, en colère contre les dieux, te font déjà une somptueuse haie d’honneur. Immortelle Lilo.

Ziyad MAKHOUL

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Chère Liliane Ghazaly

 

À travers ces mots, c’est la Société libanaise de psychanalyse qui t’exprime sa grande peine et son regret de te voir partir, toi, qui a été la première femme analyste à y entrer et qui y est demeurée jusqu’à ce que la vie t’appelle ailleurs.
Nous, qui avons partagé et profité de ta pensée dont la clarté faisait des concepts psychanalytiques des choses simples et quotidiennes, comme quelques grands noms de la psychanalyse ont su le faire, nous te sommes reconnaissants de ta présence et de la qualité de tes efforts pour que se réalisent les objectifs de notre société : former et transmettre.
Tu n’as jamais cessé de participer à nos projets par tes nombreuses interventions dans des colloques, des conférences et dans tes séminaires. Tu as, aussi, toujours été présente dans les moments houleux de notre association, affirmant tes convictions en propos ajustés et respectueux envers tous.
Comme tu as été avec tes patients qui en témoignent, tu as été avec tes collègues, sans autre prétention que d’être à nos côtés pour parler, réfléchir, tenter de comprendre et avancer.
Pour tout cela, nous te disons merci et... Bon voyage.

Maud SAÏKALI
Présidente de la SLP

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My lady, Liliane Ghazali : une dame de cœur

Je l’appelais la « dame en blanc » ; elle était belle en blanc. Elle était une grande dame, une dame dont l’intelligence, l’humour, l’engagement et l’humilité vous percutaient. Elle me faisait penser à Andrée Chedid ou à Laurice Schéhadé... Une dame au regard perçant et clair, au sourire doux et tendre. Alors que je me trouvais à mal avec ma propre fragilité, elle m’offrait un livre intitulé La fragilité, richesse ou faiblesse. « La fragilité est une richesse », me disait-elle, pour me rassurer, mais sans doute aussi parce qu’elle le pensait. Car telle est la force de l’esprit, et Liliane Ghazali venait de là...
Nous échangions des livres ; souvent, très souvent, pour nous dire des choses. Elle lisait de longues heures le matin, à l’heure où le soleil se lève ; de la psychanalyse surtout. Sa passion. Lorsqu’elle aimait un livre, elle en commandait cinq exemplaires pour les offrir à ses collègues, pour faire partager... Généreuse, exploratrice passionnée de terres lointaines : celles de l’inconscient comme celles d’Amazonie – elle était ethnologue – ou celle proche, mais tout aussi étrange, du Liban. De ce Liban qu’elle aimait et qui avait fait l’objet de ses livres. Avant-gardiste, affranchie des diktats sociaux tout autant que de ceux de sa profession qu’elle exerçait avec ardeur, elle me disait : « Osez » ; elle répétait : « Ose ». « Écrivez, vous avez du talent. » Alors, je lui dis qu’un jour j’écrirai sur elle. Elle me dit : « Faites vite, avant que je ne parte. » C’était il y a quelques années. Je ne m’attardai pas sur ces mots, mais je m’étais promis d’écrire : autre chose, un roman ; pas ceci. Aujourd’hui My lady, vous êtes partie, et j’« ose » écrire ceci... pour vous. Pour vous qui me touchiez tant, pour vous que j’admirais, pour vous à qui je pouvais m’identifier. Pour vous la femme sensible et droite.
Un jour, silencieuse, vous avez joint vos mains en une prière, pour moi, me disiez-vous – nous ne devions plus nous voir pour un moment –, ce geste m’avait touchée. Aujourd’hui, c’est moi, Liliane, qui joint les mains pour vous. Pour la dame en blanc qui lisait La pesanteur et la grâce, pour vous là-haut. Votre regard bienveillant m’accompagne ; quelque part, vous ne serez pas partie.

N.H.

Lilo – tout doucement...
 
Lilo ! Maman universelle. Donneuse universelle. Généreuse universelle. Pour tous ceux et toutes celles que tu aimais. To2bor 3damé : ces deux mots résonnent encore et encore, on dirait que tu les as taillés dans le silex, qu’est-ce qu’ils nous faisaient (sou)rire. Lilo ! Si ces concepts un peu éculés, ces gros mots qui finissent par té : liberté,...