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Liban - Le commentaire

Des armes et de leur pouvoir de corruption

L’absence de solution autour de la crise du monopole de la violence légitime aux mains du pouvoir légal empêche non seulement l’édification d’un État fort, capable d’étendre sa souveraineté sur l’ensemble de son territoire et de faire appliquer la loi à tous également et sans distinction, mais rend également impossible l’établissement de tout régime et de tout pouvoir ne bénéficiant pas de la bénédiction de ceux qui détiennent ces armes. Ce constat affligeant, mais néanmoins réaliste, est celui de l’un des pôles du 14 Mars.
Pour ce pôle, l’existence d’armes hors du giron de l’État a en effet conduit à la mise en place de zones géographiques autonomes et autosuffisantes gouvernées par un pouvoir local, où la justice ne règne pas et où prévaut la coutume des réconciliations sur le mode clanique pour prévenir la loi du talion.
Partant, aucune élection ou nomination n’échappe au diktat des armes illégales. Quel que soit le degré de démocratie et de transparence du scrutin législatif, les armes finissent par s’imposer et modifier les résultats à leur avantage. Vainqueurs et vaincus sont donc voués à demeurer sur le même pied d’égalité, l’équaliseur de choc étant l’arsenal du Hezbollah. Au mieux, les institutions sont paralysées puisque vainqueur et vaincu doivent coexister ensemble au pouvoir, comme ce fut le cas à l’issue des scrutins de 2009 remportés par le 14 Mars. Et, en cas de victoire du camp qui détient les armes, c’est ce dernier qui gouverne seul... et qui s’arroge le droit de décider d’entrer en guerre de manière unilatéral, et de préserver la stabilité sécuritaire, ou pas, à sa convenance. De même, le gouvernement qui bénéficie de l’aval de ce camp reste en place aussi longtemps qu’il le faut, en vertu du bon vouloir du propriétaire des armes. Sinon, si le camp des armes en vient à le désavouer, le cabinet tombe illico presto, à la Chambre ou dans la rue.
Le Liban se trouve dans cette situation anormale depuis 2005. Si les armes du Hezbollah n’existaient pas, le président de la République aurait été élu à la majorité absolue, le président Émile Lahoud n’aurait pu finir son mandat après la révolution du Cèdre, le sit-in du 8 Mars au centre-ville n’aurait pas tenu de 2006 à 2008, et le 7 mai 2008 n’aurait pas vu le jour. Partant, quels que soient les résultats du scrutin de 2013, rien ne changera vraiment au pays du Cèdre. Par souci de lucidité, il faut savoir que les armes continueront à peser, non pas uniquement sur le déroulement du scrutin en tant que tel, mais sur ses résultats également, surtout si le 8 Mars ne l’emporte pas. Ce sera, sur le plan institutionnel, un goût amer de déjà-vu. Une victoire du 14 Mars, et nous serons de nouveau face à un cas de figure d’une majorité incapable de gouverner. Un triomphe du 8 Mars, et ce sera le pouvoir par la force des armes. Quant au vide institutionnel, le troisième cas de figure, l’expérience du passé prouve que ce serait la situation la plus dangereuse pour le pays.
Il est donc inutile d’entreprendre quoi que ce soit au plan local sans trouver d’abord une solution éliminant le pouvoir de nuisance des armes sur la scène politique. D’autant que ces armes n’ont aucun fondement légitime : plus de la moitié des Libanais ont prouvé par les urnes, en 2005 et 2009, qu’ils sont contre cet arsenal, et aussi bien la Constitution que l’accord de Taëf n’en font aucune mention. Sans oublier, bien sûr, leur énorme pouvoir de corruption sur le système politique démocratique...
À méditer.
L’absence de solution autour de la crise du monopole de la violence légitime aux mains du pouvoir légal empêche non seulement l’édification d’un État fort, capable d’étendre sa souveraineté sur l’ensemble de son territoire et de faire appliquer la loi à tous également et sans distinction, mais rend également impossible l’établissement de tout régime et de tout pouvoir ne...
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