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« Les femmes, première étincelle de la révolution libyenne » - Transition

Les femmes laïques veulent faire entendre leur voix en Tunisie

Au cœur des inquiétudes des militantes, une éventuelle réforme du code du statut personnel légiféré durant le mandat de Habib Bourguiba en 1956, et qui abolit notamment la polygamie et accorde aux femmes les mêmes droits que les hommes en cas de divorce et de mariage.

Alors que les Tunisiennes laïques réclament des garanties sur le fait que le port du voile ne deviendra pas obligatoire, les islamistes, elles, demandent à l’inverse à pouvoir continuer à le porter à tout moment. Bettaieb/AFP

Les Tunisiennes laïques sont bien décidées à faire entendre leur voix et à défendre leur mode de vie occidental face à la montée du parti islamiste Ennahda, arrivé largement en tête des premières élections libres organisées dans le pays.
Réunies au sein d’organisations, ces femmes ont entamé une intense campagne de lobbying auprès des partis politiques pour défendre les droits des femmes et notamment une loi de 1956 qui consacre l’égalité entre les hommes et les femmes en Tunisie.
Au début du mois de novembre, elles étaient nombreuses à manifester devant le siège du gouvernement à Tunis pour défendre leurs acquis, menacés selon elles par certains mouvements fondamentalistes musulmans. Elles ont même été brièvement reçues par le Premier ministre par intérim, Béji Caïd Essebsi.
Les acquis de la femme remontent à longtemps et personne ne pourra les confisquer, a affirmé Hosnia Eloujoud, 38 ans, en rendant compte de la teneur de sa conversation avec le Premier ministre.
Selon ce dernier, tous les partis politiques représentés à la nouvelle Assemblée se sont mis d’accord pour ne pas dépasser cette ligne rouge, a pour sa part rapporté Ahyet Ayarai, une infirmière d’une quarantaine d’années.
Jeunes ou âgées, voilées ou non, issues de toutes les classes sociales, les manifestantes sont demeurées pendant près de deux heures sur la place du gouvernement. Elles on entonné des chants, scandé des slogans (dehors les rétrogrades) et brandi des pancartes réaffirmant que les femmes en Tunisie sont des femmes libres et que la prochaine Constitution à laquelle va s’atteler l’Assemblée devra se porter garante de leurs droits.
« Nous sommes ici pour dénoncer toutes les formes d’extrémisme et d’entraves aux libertés des femmes, a expliqué l’une des manifestantes, Madiha Bel Haj. Nous voulons une Constitution qui respecte les droits des femmes et ne revienne pas sur les acquis que nous avons obtenus. »
En attendant, et malgré les promesses répétées des principaux partis politiques qui se sont engagés à ne pas rogner sur les droits des femmes, les organisations ne baissent pas la garde et restent vigilantes face à toute forme de dérive.
Plusieurs professeurs d’université ont ainsi observé une grève pour protester contre l’agression d’enseignantes par certains fondamentalistes qui les jugeaient trop peu vêtues.
Selon des sources syndicales, deux enseignantes ont été agressées pour leur tenue vestimentaire jugée indécente par un groupe de jeunes gens. L’une a été secourue par un vendeur ambulant alors qu’elle recevait des coups de poing au visage dans un parking. La seconde a dû être évacuée par ses étudiants quand des jeunes, dont certains étaient barbus, l’ont empêché de terminer le cours en chahutant, sa jupe ayant été jugée trop courte.

Code du statut personnel
Au cœur des inquiétudes de ces militantes laïques, une éventuelle réforme du code du statut personnel, une série de lois introduites par le père de l’indépendance, Habib Bourguiba, en 1956. Ce code abolit notamment la polygamie et accorde aux femmes les mêmes droits que les hommes en cas de divorce et de mariage.
« Je suis venue ici pour soutenir l’idée que le code du statut personnel et les droits des femmes devraient être inscrits dans la nouvelle Constitution », a indiqué Mounira, lors de la manifestation.
Face aux inquiétudes internationales et intérieures sur une domination de l’intégrisme islamiste, Ennahda et les autres partis politiques siégeant au sein de la nouvelle Assemblée ont assuré que la défense des droits de l’homme serait renforcée dans la nouvelle Constitution.
Mais certaines voix s’élèvent déjà parmi les laïcs pour s’inquiéter du nombre d’élues issues d’Ennahda.
Sur les 49 femmes siégeant dans la nouvelle Assemblée constituante, 42 sont membres de la formation islamiste réputée modérée. Rachid Ghannouchi, qui a fondé Ennahda en 1989, assure que sa formation respecte la parité hommes-femmes plus que n’importe quel autre parti politique du pays. « Le principe d’égalité est plus respecté à Ennahda que dans les partis laïcs, a-t-il dit. Ces femmes (les élues d’Ennahda) vont se battre pour défendre leurs droits. Les femmes laïques ne monopoliseront pas la définition des droits des femmes. »

Le voile, encore et toujours
Le voile islamique, qui a été interdit dans les écoles et les administrations publiques sous le régime de l’ancien président Zineddine ben Ali, est devenu le symbole de la forte divergence des points de vue entre femmes laïques et islamistes.
L’interdiction du voile a été levée depuis la révolution de janvier qui a chassé l’ancien président du pouvoir. Depuis, les Tunisiennes laïques réclament des garanties du pouvoir sur le fait que son port ne deviendra pas obligatoire. Les islamistes, elles, demandent à l’inverse à pouvoir continuer à le porter à tout moment.
Présentes dans tous les secteurs d’activité, les Tunisiennes représentent 26 % de la population active, plus de 50 % des étudiants, 29 % des magistrats et 24 % des diplomates. L’ancien Parlement était le plus féminin de la région depuis un demi-siècle.
Sur fond de chômage, la présence des femmes au travail est souvent mise en accusation par des religieux fondamentalistes sur des chaînes satellitaires religieuses arabes.
(Sources : agences)
Les Tunisiennes laïques sont bien décidées à faire entendre leur voix et à défendre leur mode de vie occidental face à la montée du parti islamiste Ennahda, arrivé largement en tête des premières élections libres organisées dans le pays.Réunies au sein d’organisations, ces femmes ont entamé une intense campagne de lobbying auprès des partis politiques pour défendre les droits...