C'est ainsi qu'entre violence de la touche et fulgurante délicatesse du dessin, cet artiste exigeant a fini par trouver son style. Une patte singulière marquée - cela est évident - par la double influence d'Egon Schiele et de Francis Bacon. La chair est creuse, mais sa présence est forte dans la peinture de Shawki Youssef qui, d'une certaine façon, met à nu l'intérieur de la carcasse humaine.
C'est ce qui se dégage du moins de la vingtaine de mixed-medias, en grands et petits formats, sur toile ou sur papier, que Shawki Youssef expose, pour la première fois en solo, à la galerie Agial*.
Autant dire que ses œuvres axées autour du corps ne font pas dans la dentelle. Car c'est un corps humain, représenté non dans sa régularité anatomique mais dans sa chair tuméfiée, son ossature disloquée, ses humeurs éparses, qu'aborde, comme matière à dissection... des émotions, Shawki Youssef. Un corps espace béant de tensions, de solitude, de finitude. Lieu de toutes les luttes, les déchirures, les souffrances, les désirs, les déchéances... Un corps d'une présence lourde qui vient contrarier cette tendance à l'immatérialité et à la virtualité induite par les nouvelles technologies que dénonce cet artiste attaché à la matière artistique: pigments, fer, encre, acrylique et fusain qu'il mélange dans ses œuvres. Une matière qu'il traite par succession de traits nerveux et d'« éclatements » de couleurs grises, ocres, verdâtres, brunes ou vermillon sur l'espace de sa toile. Et qui en se superposant forment, au final, des compositions d'un surprenant équilibre.
L'ensemble évoque tout un maelström de sentiments, de sensations, d'émois, de troubles, de saisissements d'une criante humanité. Mais, surtout, dans la lignée des « Vanités », les peintures de Shawki Youssef rappellent la fragilité de l'être humain.
* Rue Abdel-Aziz, Hamra. Tél. 01/345213.
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