La Mouneh de Barbara Abdeni Massaad, ce sont des centaines de rencontres emmagasinées dans sa mémoire visuelle et émotionnelle durant des années, des mois, des journées entières à sillonner le pays. Et autant d'ingrédients découverts et redécouverts, de villages et de visages souriants. Ce sont les produits naturels d'un Liban méconnu, des saveurs, des coutumes de manière agréable jalousement préservées par une poignée d'individus qui ne savent pas vivre autrement qu'attachés à la tradition, à la terre, et évoluent au gré de la nature et de ses humeurs. C'est également une nostalgie, le besoin de retenir un patrimoine, de le transmettre aux jeunes générations, presque une mission. « Pour que nos enfants, dit-elle, puissent continuer à sauvegarder notre passé. »
Ce livre ressemble à son auteure. Rousse, comme les épis de blé au soleil, la caméra au cou, le stylo au bout du doigt, les lunettes rivées sur un monde extérieur qu'elle perçoit dans ses moindres recoins. Il rassemble ses convictions et ses contemplations.
Hymne à la nature
La couverture de Mouneh, preserving foods for the Lebanese pantry est une belle entrée en matière, des mains orientales usées par le temps, et des tomates séchées heureuses de s'offrir. Le reste de l'ouvrage est dans ce même esprit joyeux. « J'ai lu toute la documentation qui existait sur le sujet, confie-t-elle, j'ai été partout, souvent accompagnée de mes enfants, pour qu'ils apprennent aussi. Nous avons rencontré des gens dans tous les villages libanais qui nous ont acceptés, parlé, montré la manière. J'ai rempli une vingtaine de classeurs et puis j'ai tout recomposé comme un puzzle et d'une manière artisanale. Je voulais que tout soit parfait. » Les chapitres sont divisés en saisons, ponctués de rencontres. À chaque saison ses réserves à faire, réparties par catégories, fruits, légumes, produits animaliers. Barbara a choisi de commencer par le printemps ! Le lecteur saura ainsi que mars est le mois des réserves de cornichons, de chou, d'amandes vertes, de thym. Qu'avril est consacré à celles du miel, du fromage de chèvre, des fleurs d'orangers. Que mai préfère les artichauts et l'ail. Juin les fruits secs, les abricots, la menthe, les fleurs et le thym sauvages. Que juillet est idéal pour les concombres, maïs, tomates cerises, melon. Août pour la basilique, les pêches, les tomates séchées. Et septembre, pour les pommes, les figues, les olives vertes et la viande. Il saura également comment profiter d'octobre pour sa réserve d'olives noires, de dattes, de poires et de tomates. Des betteraves, raisins, coings et citrouilles de novembre. Et qu'enfin décembre est bon pour les carottes, les pamplemousses, janvier pour les mandarines et février pour les oranges amères et le citron. Il apprendra comment faire les cornichons, l'arak, le miel, les sirops et autres confitures, et partagera les histoires de toutes ces personnes derrière ce savoir-faire.
Et puis il y a les photos. Belles. Saisies au naturel, en extérieur, sans retouches. Un des aspects le plus important du livre, selon Massaad, photographe d'abord. Une photographe gourmande, qui aime autant la cuisine et perçoit de nombreux points communs entre ses deux passions. « Et surtout cette sensibilité pour quelque chose de vivant. »
Il faudrait également saluer la mise en page du livre qui baigne dans une douce harmonie, le choix du papier et une qualité d'impression qui donnent au travail l'éclat qu'il mérite.
(*) Une première signature de « Mouneh, preserving foods for the Lebanese Pantry », accompagnée d'une exposition des photos de Barbara Abdeni Massaad a eu lieu jeudi 18 novembre à Tawlet Souk el-Tayeb. L'exposition se poursuivra jusqu'au 2 décembre.
L'auteure signera à nouveau son ouvrage aujourd'hui à la Librairie Antoine, ABC Achrafieh, de 17h00 à 20h00.
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