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Liban - Éclairage

En ligne de fond, toujours cette opposition entre deux projets politiques

Comme lors d'innombrables précédents, le sujet de l'heure n'est qu'un support d'un bras de fer portant sur l'opposition entre deux grands projets pour le devenir politique de ce pays. Les échanges du dernier Conseil des ministres le démontrent amplement. En effet, le 8 Mars affirme avec constance que la ligne suivie depuis 2005 par le 14 Mars a divisé les Libanais et ne leur a apporté que malheurs et destructions. Assertions qui semblent culottées, quand on songe à juillet 2006... À ce propos, du reste, les opposants soutiennent que leurs adversaires ne cherchent qu'à neutraliser l'armement de la résistance, sur pression des États-Unis, et font ainsi le jeu de l'ennemi israélien. Ils leur imputent la dégradation occurrente, en les pressant de renoncer à un projet voué à l'échec au Liban, mais également ailleurs dans la région.
Ce à quoi les loyalistes répliquent par un attachement encore plus prononcé à leurs options. Rendant à leurs vis-à-vis la monnaie de leur pièce, question suivisme, ils leur reprochent de permettre à l'axe syro-iranien de se servir du Liban non seulement comme carte de pression mais aussi, ce qui est bien malheureux, de lice d'affrontement interposée, face aux Américains.
Cependant, sous l'ombrelle syro-saoudienne, les choses restent plus ou moins sous contrôle. C'est ce que souligne un ministre du 8 Mars, pour qui l'on ne va atteindre ni rupture définitive ni dislocation du pays politique. Ce cadre reconnaît au président Michel Sleiman, homme de consensus et d'entente, le mérite de maintenir assez de jonction entre le 8 Mars et le 14 Mars pour espérer une sortie de crise par le dialogue, dans le respect mutuel de l'esprit de Taëf et de Doha. Donc en écartant toute velléité de recours à la rue et à la violence, qui conduirait à l'irréparable. Il convient de signaler que lors de l'ouverture des travaux du Conseil consultatif de son pays, l'émir de Qatar a appelé les Libanais à négocier à tête reposée au sein du gouvernement d'union, loin de tout trouble sécuritaire, pour contrer les tentatives de discorde.
Cependant, un député de la majorité estime que les développements actuels reflètent une claire volonté des opposants d'imposer un agenda déterminé au chef du gouvernement, pour contrôler l'ordre du jour du Conseil des ministres, en y faisant inscrire, comme premier sujet, le dossier des présumés faux témoins. Même si cela signifie que les problèmes socio-économiques de la population, objets des autres questions à étudier, seraient négligés.

Fermeté
De fait, l'opposition l'avance ouvertement : aucun débat, aucun exposé, aucun traitement de problème ou de projet avant qu'on en ait fini avec la question des faux témoins. Elle affirme que c'est indispensable, parce que ce volet est, à l'en croire, la seule vraie passerelle menant à la découverte des assassins de Rafic Hariri, exécutants et commanditaires.
Mais son fils, répète le parlementaire loyaliste cité, rejette catégoriquement cette logique, parce qu'elle dénature la justice et la quête de la vérité. Et aussi parce qu'elle porte atteinte aux prérogatives de la présidence du Conseil, seule habilitée à établir l'ordonnancement de l'ordre du jour, à choisir donc le sujet qui doit passer en premier, après avis des membres du cabinet et consultation du chef de l'État. Lequel, pour sa part, garde le droit de soulever en séance, au titre de l'urgence ou de l'intérêt national, toute question qui ne serait pas inscrite à l'ordre du jour. Saad Hariri, ajoute le député, refuse de capituler et continuera à faire comme si de rien n'était. Et s'il y a torpillage de l'étude de l'ordre du jour, par suite de l'obstination de l'opposition, elle en porterait seule la responsabilité.
Mais des efforts sont déployés au-dehors, dans plus d'une capitale arabe, pour aider le Liban à se dégager de sa présente crise. Un observateur averti confirme ainsi que les parties locales ont été informées des idées de solutions forgées dans ces capitales. Le scénario le plus en vue conviendrait parfaitement à l'opposition. Il consisterait en effet dans une proclamation anticipée par le président du Conseil du rejet de l'acte d'accusation, au cas où le texte se fonderait sur des données découlant des dépositions de personnages que l'opposition considère comme étant de faux témoins. Dans la foulée, le chef du gouvernement déclarerait son refus que le TSL soit utilisé pour cibler expressément le Hezbollah.
Une pilule difficile à avaler. Ou même à présenter : selon des loyalistes, les capitales arabes seraient loin d'être d'accord sur le scénario évoqué, tissé dans l'une d'elles, on imagine facilement laquelle. En fait, précisent des observateurs, il semble que le traitement concerté de la question libanaise donne lieu à des conditions et à des contre-conditions de la part de conciliateurs dont chacun se soucie de promouvoir ses propres intérêts, à travers cette opération. Bref, encore une fois, un bazar sur le dos des Libanais. Ce qui se répercute négativement sur la scène locale. L'entente entre joueurs étrangers tardant à se dessiner, les fractions du cru ne peuvent que durcir leurs positions et accentuer l'escalade.
Il reste qu'après son saut à Damas, Walid Joumblatt a prié les ministres le représentant de se ranger aux côtés du chef de l'État. Et, partant, de rejeter, comme le président Sleiman, le recours au vote, demandé par l'opposition, pour ce qui est de la saisine de la Cour de justice au sujet des faux témoins. Ce choix de Joumblatt, retour donc des rives du Barada, est considéré comme un message clair de restriction adressé par la Syrie à ses bons amis du 8 Mars.
Dans le prolongement, du reste, de sa relance des Français, de la sonnette d'alarme qu'elle a tirée, à propos de la gravité et de la dangerosité de la situation au Liban. À cause, cela est aussi implicite qu'évident, d'une influence iranienne qui se fait de plus en plus concurrente, après la visite d'Ahmadinejad. En d'autres termes, la Syrie bat le rappel de tous ses amis, de tous ses alliés potentiels, au Liban comme en Occident, pour ne pas se laisser marcher sur les pieds par l'allié iranien.
Comme lors d'innombrables précédents, le sujet de l'heure n'est qu'un support d'un bras de fer portant sur l'opposition entre deux grands projets pour le devenir politique de ce pays. Les échanges du dernier Conseil des ministres le démontrent amplement. En effet, le 8 Mars affirme avec constance que la ligne suivie depuis 2005 par le 14 Mars a divisé les...
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