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Culture - Festival al-Bustan

Notes bleues et ensoleillées pour deux virtuoses

Fanion aux couleurs italiennes flottant toujours jusqu'aux derniers concerts avant la clôture du dimanche 21 mars au Festival al-Bustan. De tarentelle en suite italienne, en passant par des pages de Tartini, Respighi et Vitali, voilà des notes bleues et ensoleillées pour deux virtuoses de l'archet, Sami Merdinian, et du clavier, Enrico Pace. Un duel sonore de titans pour le plaisir des festivaliers parfaitement tout ouïe.

Le violoniste Sami Merdinian. (DR)

Salle presque remplie pour le duo de musiciens inspirés qui croisent et décroisent, en tout sentiment, harmonie et technique imparable, les cordes du clavier et l'archet du violon. Un Argentin et un Italien, tous deux venus de pays de la lumière et de la joie de vivre, font retentir, avec brio et émotion, les pages de Guiseppe Tartini, Ottorino Respighi, Tomaso Antonio Vitali, Igor Stravinsky et Henryk Wieniawsky.
Cheveux lisses d'ébène, veste luisante noire avec col Mao pour Sami Merdinian au profil de hidalgo séducteur, et ensemble gris bleu pétrole avec veste trois quarts entre mode de dandy romantique ou d'aristocrate indien pour Enrico Pace arborant une barbichette sel poivre, tous les deux faisant la révérence au public sous la flaque de lumière.
Ouverture avec la sage sonate de Didone Abandonata de Tartini, éminent violoniste de l'époque baroque où le violon s'illustre entre un grain de mélancolie, quelques cadences rapides et un presto à la vivacité vite maîtrisée. Non sans quelques failles du violon qui, peut-être, a besoin de quelques mesures pour mieux s'échauffer.
Plaintes profondes de la boîte à magie avec la Sonate op 110 de Respighi avant de plonger dans une agitation passionnée aux éclats ardents. Véhémence aux chromatismes incandescents où piano et violon rivalisent d'un lyrisme emporté et vif pour trois mouvements (moderato, andante espressivo et passacaille) laissant libre cours à des volutes sonores à la fois lumineuses et tourmentées.
Petit entracte et toute la force et l'impétuosité de la Chaconne de Vitali charriant les pièges stylistiques du violon les plus extrêmes et dont Sami Merdinian triomphe avec superbe et doigté, par un coup d'archet, juste et net, à fendre l'âme des pierres.
Âme russe à travers une œuvre de Jean-Baptiste Pergolèse revisitée par Igor Fiodorovitch Stravinsky. Cette Suite italienne pour violon et piano, inspirée de Pulcinella du compositeur de La serva padrona, est un bijou d'écriture pour le duo de deux instruments qui se lâchent à fond.
De la tendre et plaintive Sérénade au Minuetto final pétaradant de vivacité, en passant par cette sémillante et vibrionnante Tarentelle et ce sautillant Scherzando, toute la fougue, l'originalité, la modernité du compositeur de Petrouchka et de l'oiseau de feu sont là. Tout en éclats scintillants et dorés.
Pour terminer, place à un opus remarquablement flamboyant pour le violon, le Scherzo-tarentelle op 16 pour violon et piano du Polonais Henryk Wieniawski, illustre professeur d'Eugène Ysaye à qui la postérité prête les dons incantatoires d'un Paganini.
Superbe prestation pour ce morceau tout en trémolos languides ou bondissants, angéliques ou diaboliques, avec des phrases coulées en laves incandescentes ou en brises douces. De la colère au murmure à peine audible, du sifflement des langues bifides aux caresses les plus dissolvantes, violon et piano donnent, avec une incroyable vitalité, toutes les pleines mesures et démesures d'une narration souvent déchaînée.
Sous les salves d'applaudissements d'un public littéralement transporté, voilà un bis inattendu, celui du retour aux sources argentines de Merdirian, avec le vibrant Libertango d'Astor Piazzolla. Sensualité, nuits d'insomnies, liberté des plages et douceur de la nuit, voilà ce que le violon murmure aux oreilles enchantées des auditeurs. Nouvelle trombe d'applaudissements et un second encore. Retour aux vraies origines, cette fois-ci arméniennes, de Merdinian, avec le Groung de Komitas. Déchirante mélodie que celle de cette «cigogne» (la Groung), qui voyage à travers l'espace et le temps pour parler d'un pays béni par Dieu et où l'esprit de l'arche de Noé flotte sur son Ararat. Mélodie suave et chavirante pour un violon aux tirades qui ont la tendresse des fleurs, qui ferment leurs paupières à la tombée de la nuit et dont le cœur a la pulsation des pétales qui frissonnent au vent contre la tristesse et l'oubli.
Salle presque remplie pour le duo de musiciens inspirés qui croisent et décroisent, en tout sentiment, harmonie et technique imparable, les cordes du clavier et l'archet du violon. Un Argentin et un Italien, tous deux venus de pays de la lumière et de la joie de vivre, font retentir, avec brio et émotion, les pages de Guiseppe Tartini, Ottorino Respighi, Tomaso Antonio...

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