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Liban - Rencontre

Le Centre Carnegie de Beyrouth, meilleur « think tank » de la région

Au début du mois de février, le Centre Carnegie pour le Moyen-Orient, basé à Beyrouth, a été élu meilleur « think tank » de la région à l'issue d'une étude de l'Université de Pennsylvanie qui s'est penchée sur les 6 302 « think tank » du monde.

Paul Salem : « Les régimes totalitaires arabes ont tenu bon et tout laisse croire qu’ils se maintiendront, à l’aune de la radicalisation des mouvements d’opposition arabes. »

Paul Salem, directeur de Carnegie Moyen-Orient, ne cache pas sa fierté. Le centre de recherches qu'il préside vient d'être élu meilleur think tank de l'année. Pour lui, il y plusieurs clés derrière ce succès. D'abord, le fait pour ce centre d'être basé à Beyrouth est primordial, car cette localisation géographique lui permet d'avoir « une liberté de mouvement qui n'existe pas dans les autres pays de la région », déclare d'emblée M. Salem à L'Orient-Le Jour. « Cette liberté n'existe ni dans les autres pays arabes ni encore moins en Israël où les avis sont forcément biaisés et les études objectives rares », ajoute-t-il. « Notre centre est un modèle pour la région où de nombreuses tentatives similaires ont vu le jour », mais dont aucune n'a réellement réussi. « Il y a beaucoup de chercheurs dans les pays arabes », note-t-il, mais ce qui leur manque principalement, c'est la possibilité de poursuivre leurs recherches en toute liberté.
Le deuxième atout de Carnegie « est les langues que nous utilisons pour nos publications. Nous avons fait le choix de l'arabe et de l'anglais, simultanément, de manière à pouvoir toucher la région mais également l'international », explique aussi Paul Salem. Dernier élément qu'il convient de ne pas négliger, la « stratégie de communication » de Carnegie. Comme l'explique M. Salem, « nous faisons de notre mieux pour tirer profit au maximum des outils que la technologie met à notre disposition pour communiquer et nous faire connaître le plus possible. Nous utilisons les e-mails, mettons à jour constamment notre site Internet et écrivons souvent dans les journaux ».

Le Liban et les enjeux régionaux
Carnegie Moyen-Orient s'emploie à analyser la situation régionale, notamment « les changements majeurs qui ont eu lieu dans la région récemment », souligne M. Salem ainsi que toutes les questions ayant trait aux « réformes politiques et démocratiques » dans le monde arabe.
« Depuis les événements qui ont secoué l'Irak ou l'Afghanistan en 2007, en passant par la situation au Liban », toutes ces questions sont passées au peigne fin par le centre de recherche, en particulier « les relations syro-saoudiennes, syro-américaines et, bien sûr, le dossier du nucléaire iranien ». Ce dossier est l'un des rares à ne pas avoir évolué positivement, note M. Salem et la situation au Liban est bien sûr sensible à toute dégradation sur ce plan, pour la simple raison que le soutien de l'Iran au Hezbollah est « largement à but défensif et en lien avec le nucléaire ». « Le Liban figure donc dans l'équation, quelle que soit l'évolution de la situation », insiste-t-il.

L'impasse des réformes dans les pays arabes
Pour Paul Salem, les réformes de même que le processus de démocratisation dans les pays arabes sont tous deux dans l'impasse. Depuis la fin de la guerre froide et malgré la fin du communisme, « les régimes totalitaires arabes ont tenu bon et tout laisse croire qu'ils se maintiendront, à l'aune notamment de la radicalisation des mouvements d'opposition arabes ». Une radicalisation qu'il faut imputer à deux éléments : d'abord les efforts des régimes arabes tendant à détruire tout embryon d'opposition ont porté leurs fruits et « seuls les mouvements en lien avec la religion ont tenu bon parce que la religion, et en l'occurrence l'islam, fait partie de la nation arabe et qu'il est très difficile d'en éloigner le peuple », relève M. Salem. D'autre part, il y a un effort insidieux des autorités tendant à renforcer indirectement ces mouvements islamistes car celles-ci savent pertinemment bien qu'ils font peur aux populations arabes qui leur préfèrent toujours le pouvoir en place ». De plus, « les dirigeants font exprès d'opérer une certaine uniformisation de ces mouvements en les présentant tous sous un même jour, celui du fanatisme religieux, alors qu'ils sont en fait très différents et pas forcément tous radicaux », explique-t-il. Enfin, « en les isolant totalement du pouvoir, ces mouvements se radicalisent inévitablement de plus en plus », alors que s'ils sont intégrés au pouvoir, ils sont « obligés de s'adapter et de rentrer dans le système, l'exemple de la Turquie est à cet égard probant ».
Quid du Hezbollah, sachant que ce parti a bel et bien intégré le système politique libanais mais qu'il continue de s'attacher à des fondements politiques de facto en contradiction avec les principes démocratiques ? « Le Hezbollah reste un cas à part, car il a mis de côté ses idéaux religieux » et cela s'est exprimé récemment par le biais d'un discours de son secrétaire général, Hassan Nasrallah. « Ce parti est loin de l'attitude agressive islamiste », note-t-il.
De manière générale, le Moyen-Orient connaît trois exceptions au totalitarisme rampant : le Liban, l'Irak et la Palestine. « Bien sûr, chacun de ces pays souffre de problèmes nombreux et divers, mais il reste qu'ils bénéficient d'une certaine liberté, surtout le Liban ».
Sur le plan national, le directeur de Carnegie souligne d'abord « la stabilité qui règne au niveau sécuritaire depuis 2008, depuis l'élection du président de la République ». Certes, « nous avons des problèmes, comme l'absence de souveraineté réelle », mais il faut relever cette stabilisation.
Quid du débat sur les élections municipales ? Paul Salem met l'accent sur la « sacralité » des élections et sur la nécessité de les organiser « dans les délais, même si un report d'un mois n'est pas vraiment problématique ». « Il ne faut pas que les réformes servent de prétexte pour ajourner ces élections », ajoute-t-il, mêmes si celles-ci sont très importantes. « Il n'est pas permis, sous quelque prétexte que ce soit, de retirer au peuple son droit d'octroyer ou non un mandat à ses dirigeants », souligne-t-il. « Je suis pour l'abaissement de l'âge des électeurs, le vote des émigrés. Je suis pour le fait que le président de la municipalité soit élu directement par le peuple, pour la proportionnelle et le quota féminin, même si seule cette dernière proposition a été retenue par le gouvernement », ajoute M. Salem qui, il faut le rappeler, faisait partie de la commission présidé par l'ancien ministre Fouad Boutros et dont la mission était de proposer une nouvelle loi pour les élections législatives.
Pour ce qui est de la proportionnelle, le directeur de Carnegie affirme que celle-ci est tout à fait adéquate dans les grandes villes. « Pourquoi ne pas appliquer la proportionnelle dans les grandes agglomérations et le système majoritaire dans les petites villes, les petits villages ? » se demande-t-il. Prochaine étape après les municipales, indique M. Salem, « la mise en route de la décentralisation administrative » qui est, elle aussi, nécessaire à la bonne marche du système démocratique national.

Pour lire l'intégralité du rapport, rendez-vous sur le blog de L'Orient-Le Jour :
www.lorientlejour-leblog.com
www.carnegieendowment.org
Paul Salem, directeur de Carnegie Moyen-Orient, ne cache pas sa fierté. Le centre de recherches qu'il préside vient d'être élu meilleur think tank de l'année. Pour lui, il y plusieurs clés derrière ce succès. D'abord, le fait pour ce centre d'être basé à Beyrouth est primordial, car cette localisation géographique...
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