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Culture - Correspondance

Bach et le taï chi sublimé

Faire circuler l'énergie et se réapproprier harmonieusement son corps et son esprit, ou tout l'art centenaire du tai chi sublimé par une troupe de danse moderne taïwanaise.

Jeux de miroirs et de corps.

Sur la scène de l'un des théâtres du Centre Kennedy à Washington, un danseur, enchaînant des mouvements fluides, semble se laisser emporter par un courant invisible. Son corps se plie et se déplie avec une flexibilité faisant fi des lois de la pesanteur et des diktats de toute morphologie humaine. Puis une quinzaine de danseurs et de danseuses se joignent à cette gestuelle dont la virtuosité, d'une extrême élégance, coule de source, ne laissant transparaître aucun effort. À la manière de l'art martial au ralenti qu'est le taï chi, qui a inspiré ce très beau spectacle intitulé Moon Water et interprété par la troupe taïwanaise, Cloud Gate Dance theater, au son des Six suites pour violoncelle seul de Bach.
À la clarté et à l'envol de cette œuvre musicale répond la précision des mouvements de cette troupe qui fait fusionner le taï chi, la méditation, le ballet et la danse moderne. Le Cloud Gate Dance Theatre de Taïwan s'est taillé une place parmi les meilleures compagnies de danse du monde. Il a été fondé en 1973 par Lin Hwai-Min, à l'origine un romancier chinois qui, assistant à une classe de ballet à l'université d'Iowa où il prenait des classes d'écriture, a réalisé que la silencieuse expression physique pouvait porter autant que le mot. Ce qui le mène à fréquenter les studios de Merce Cunnigham et Martha Graham, avant de retourner à Taïwan pour y fonder sa troupe de danse qui célébrera la riche essence du mouvement. Il cherche d'abord «l'impulsion de la danse», sa raison d'être, plus que sa forme.

Flux moderne et reflux millénaire
Ensuite, il s'inspire des philosophies orientales pour bâtir ses chorégraphies qui, selon lui, n'embrassent pas les mêmes principes de danse que ceux qu'adopte une direction de danse occidentale. «La danse occidentale travaille contre la gravité, contrairement à ce que nous faisons: elle est extravertie, alors que nous nous concentrons sur notre énergie intérieure», a-t-il expliqué dans un documentaire récent sur sa compagnie. «Nous ne dansons pas pour un public, nous invitons simplement un public à nous regarder danser. Nous gardons pour nous nos mouvements et notre respiration.»
Ainsi, son ballet, Moon Water, relève d'une esthétique de l'expression corporelle d'un fini suprême et d'un raffinement idéal fait d'équilibre, d'harmonie et de spiritualité. Sous-jacente aussi, l'ancienne pratique du taï chi où la sérénité est l'unique forme du pouvoir. Le nom Moon Water est une référence au proverbe bouddhiste qui dit que «le reflet des fleurs dans le miroir ou celui de la lune sur l'eau ne sont qu'illusoires». D'où une chorégraphie dont les séquences visent à faire ressurgir les notions de réalité et d'irréalité, d'effort et d'absence d'effort, du yin et du yang. Dans une scénographie poétique en noir et blanc, les interprètes, enroulés de voiles blancs, se déplacent de façon fluide sur la scène, comme les vagues léchant le rivage, alors que des miroirs suspendus renvoient des images éthérées et que la scène se recouvre d'un véritable filet d'eau. Une danse mue par des flux d'énergie modernes et un reflux d'intensité méditative millénaire. À noter que le nom de la troupe, «Cloud Gate», est celui d'un rituel chinois, vieux de cinq mille ans, qui serait la plus ancienne danse du pays.
Sur la scène de l'un des théâtres du Centre Kennedy à Washington, un danseur, enchaînant des mouvements fluides, semble se laisser emporter par un courant invisible. Son corps se plie et se déplie avec une flexibilité faisant fi des lois de la pesanteur et des diktats de toute morphologie humaine. Puis une quinzaine de danseurs et de danseuses se...

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