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Législatives : juin 2009 - Pour aller plus loin - La situation

Derniers ajustements dans chaque camp avant le début des nouvelles consultations parlementaires

À deux jours des résultats des consultations parlementaires obligatoires au palais de Baabda, il n'y a pratiquement aucun suspense sur l'identité du Premier ministre qui sera désigné. Non seulement Saad Hariri est le grand favori, mais il risque fort d'obtenir le même nombre de voix que 80 jours auparavant lors de sa première désignation. Comme si rien ne s'était passé et qu'il n'y avait pas eu des déclarations incendiaires et une tension grandissante dans le pays. Un rapide sondage auprès des blocs parlementaires montre en effet que le vote s'annonce sensiblement identique à celui des précédentes consultations. Même si aujourd'hui, les différents blocs comptent se réunir pour décider de leur position définitive.
En principe, Saad Hariri devrait obtenir l'ensemble des voix de la majorité parlementaire en plus de celles du bloc du président de la Chambre et du parti Tachnag. Le virage politique du chef du PSP ne devrait donc avoir aucune incidence sur le vote de son bloc parlementaire, de même que les remous au sein du bloc de Zahlé ne devraient pas modifier le vote de ses membres. Même le bloc des députés Kataëb, qui avait exprimé des réserves sur la formule présentée par Saad Hariri, devrait aussi voter en sa faveur. Seuls donc les blocs de Aoun, du Hezbollah et de l'ancien ministre Sleiman Frangié devraient s'abstenir de donner leurs voix à Saad Hariri, mais on ignore encore s'ils comptent désigner quelqu'un d'autre. S'ils le font, cela signifierait que le CPL et ses alliés souhaitent montrer qu'ils ont un projet de rechange, même s'ils sont conscients que faute de nombre de voix suffisant, ce projet n'a aucune chance d'être adopté. Il s'agirait simplement d'une démarche de pure forme destinée à démentir les accusations des députés du bloc du Futur selon lesquelles le CPL souhaite le vide... Les différents blocs ont en tout cas 24 heures pour fixer leur position définitive avant le début des consultations parlementaires demain mardi.
Au cours de l'iftar d'hier et en présence des députés et des notables du Nord, Saad Hariri a d'ailleurs donné le ton, rappelant qu'il a tendu la main à l'opposition pour qu'elle participe au gouvernement, non pour qu'elle impose ses conditions. Il a affirmé qu'il ne compte pas accepter des conditions qu'il juge illogiques, assurant que chacun est libre de le désigner ou pas lors des consultations parlementaires. Il a ajouté qu'il compte traiter ceux qui ne le nommeront pas par la réciprocité, mais qu'ils devraient avoir le courage de dire qui ils veulent... Hariri a encore précisé qu'il décidera ou non d'accepter la désignation en temps voulu, précisant qu'il a été clair et sincère et qu'il ne faut plus se cacher derrière son doigt... Il a répété que sa main reste tendue de manière à servir les intérêts du pays et si cet intérêt exige qu'il se rende en Syrie en tant que Premier ministre, il le fera...
Si donc Hariri est désigné et s'il accepte cette nomination, sur quelles bases devrait-il entamer ces secondes concertations parlementaires ? Les opinions sont divergentes et la polémique bat son plein. Nabih Berry et Walid Joumblatt, qui semblent avoir retrouvé leur complicité d'antan, affirment qu'il n'est pas question de renoncer à la formation d'un gouvernement d'entente, seul garant de la stabilité du pays. Walid Joumblatt a même été jusqu'à préciser, au cours d'une cérémonie hier, que Saad Hariri reste favorable à la formule de 15-10-5, qui avait d'ailleurs fait l'objet d'un accord tacite entre Damas et Riyad, alors que le chef des Forces libanaises Samir Geagea a déclaré de son côté que l'Alliance du 14 Mars n'a pas l'intention de se retourner contre cette formule. Mais dans le bloc du Courant du futur, des voix s'élèvent pour affirmer qu'il n'est pas possible de reprendre les négociations là où elles s'étaient arrêtées mercredi dernier, lorsque la formation présentée par Saad Hariri avait été rejetée par l'opposition, et qu'il serait sans doute bon de réfléchir à de nouvelles formules comme celle d'un gouvernement de technocrates ou encore celle d'un gouvernement de pôles politiques. Saad Hariri lui-même avait annoncé au cours de l'iftar de samedi qu'il choisirait de nouvelles bases pour la négociation, sans donner d'autres précisions. Cette attitude a suscité des réactions assez vives de la part du chef du CPL, Michel Aoun, qui a affirmé que si Saad Hariri rejette la formule 15-10-5, il reviendra à sa précédente revendication d'adopter le système proportionnel dans la distribution des parts gouvernementales. Et le ministre des Télécommunications Gebran Bassil, principale cible des critiques de la majorité, a souhaité que « Hariri 2 » (selon ses propres termes) soit plus efficace et plus réussie que la première.
Le Hezbollah, lui, ne s'est pas clairement prononcé, les déclarations du week-end appelant généralement au dialogue et à la recherche d'une solution dans le respect des ententes déjà conclues.
Les milieux politiques se demandent toutefois pourquoi ce qui n'a pas été possible au cours des 80 derniers jours pourrait le devenir soudainement alors que rien n'a changé dans le paysage politique interne et régional.
La timide médiation du Qatar qui commence à pointer à l'horizon franco-syro-libanais a ainsi suscité des réactions mitigées, l'opposition l'accueillant favorablement, alors que la majorité se montrait bien plus réticente.
En l'absence de « visibilité régionale et internationale », le soudain réchauffement au Sud est loin d'être rassurant. Les menaces adressées au Liban par le Premier ministre israélien Netanyahu sont considérées par les uns comme une ingérence directe dans les affaires libanaises, alors que d'autres estiment qu'elles correspondent à une volonté du Hezbollah d'exercer des pressions militaires pour servir les intérêts de l'Iran. C'est en tout cas une difficile mission qui attend l'émissaire du président Obama, George Mitchell, qui a entamé une nouvelle tournée dans la région.
Et, si comme le croient certains, Israël choisissait l'escalade militaire au Liban pour détourner l'attention américaine de la poursuite de la construction de colonies et profitait ainsi de la crise gouvernementale ?
À deux jours des résultats des consultations parlementaires obligatoires au palais de Baabda, il n'y a pratiquement aucun suspense sur l'identité du Premier ministre qui sera désigné. Non seulement Saad Hariri est le grand favori, mais il risque fort d'obtenir le même nombre de voix que 80 jours auparavant lors de sa première désignation....