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Législatives : juin 2009 - Tout le monde en parle

Voter, oui, mais être élues aussi

«On n'a jamais entendu un homme, fût-il médiocre, douter de ses capacités, au contraire. »
Simone Veil
Il est scandaleux de constater, dans un pays aussi politisé que le Liban, soi-disant cultivé et civilisé, que sur 701 candidatures aux élections du 7 juin, six seulement sont des femmes.
Pour ne citer que les pays voisins, le Koweït, à titre d’exemple, qui n’a octroyé le droit de vote et d’éligibilité aux femmes qu’en 2005, c’est-à-dire 53 ans après le Liban, comptait seize femmes parmi les 210 candidats aux élections législatives de mai 2009. Malgré la présence de parties extrémistes et conservatrices, quatre parmi ces candidates, dont trois indépendantes, ont réussi à se faire élire pour la première fois au parlement koweïtien.
D’autre part, sur 475 candidats iraniens pour la présidentielle du 12 juin, 48 sont des femmes.
Alors que la moyenne des femmes parlementaires dans le monde se situe autour des 16 %, dans les meilleures conditions elles  ne dépasseront pas dans le futur Parlement libanais le taux de 3%, soit bien moins que la moyenne des certains pays arabes, qui atteint déjà 7 %. Pourtant, le Liban est à l’avant-garde parmi ces pays pour la démocratie, pour l’égalité des droits civils, pour l’accès des filles à l’éducation et à l’activité professionnelle.
Pour quelles raisons les Libanaises, malgré leur réussite dans tous les domaines, public et privé –  de la magistrature aux professions libérales, aux médias, aux universités, aux institutions financières, aux associations sociales et caritatives – , ne participent-elles pas activement à la vie politique du pays ? Est-ce une question de mentalité, de culture politique ou d’estime de soi qu’il faut renforcer ? En fait, de nombreux obstacles culturels, économiques, sociaux et familiaux rendent difficile l’entrée des femmes dans l’arène politique. Car c’est aux femmes qu’incombe la responsabilité principale de la vie de tous les jours. Elles doivent assumer plusieurs vies à la fois : professionnelle, politique ou associative, et privée.
En outre, aux raisons historiques de l’exclusion des femmes dans le monde, s’ajoutent les caractéristiques du système politique libanais, qui concentre à l’extrême le pouvoir entre les mains de quelques-uns et perpétue un féodalisme doublé de confessionnalisme aigu, peu propices à l’entrée des femmes dans la vie politique.
«La moitié du pays ne peut rester durablement en dehors des responsabilités politiques ou n’y participer que de manière symbolique ! » selon Simone Veil.
Pourquoi les femmes, plus de la moitié du corps électoral, ne se rebellent-elles pas contre cette marginalisation ? Seraient-elles découragées par les menaces, les querelles byzantines et les discours vaniteux ? Le narcissisme, l’autosatisfaction et la suffisance chez certains hommes politiques sont tournés en dérision par les femmes qui ont « le sens de la relativité des choses ». Elles sont, pour leur part, guidées avant tout par un souci d’efficacité et par la volonté d’atteindre des objectifs concrets. Elles rêvent d’agir, de construire un monde meilleur dans lequel les sociétés sont moins violentes, plus équilibrées, plus humaines.
Les femmes ne constituent pas une communauté sociale, religieuse ou sexuelle à part ; avec les hommes, elles forment l’humanité universelle, avec ses droits et ses obligations. Mais il faudra encore des générations pour que le principe de l’égalité des sexes convainque dans notre tiers-monde et que les différences soient assumées équitablement.
Quoi qu’il en soit, les femmes représentent l’espoir d’un renouveau de la politique. Laquelle, presque exclusivement représentée par les hommes, est aujourd’hui fortement discréditée. L’agressivité des face-à-face télévisés, les promesses non tenues, la corruption, la mégalomanie, le mépris des autres, l’arrogance, l’exclusion des femmes… tous ces facteurs ont miné la vie politique libanaise et la crédibilité des élites en général.
Pour terminer sur une note optimiste, il reste à souhaiter aux quatre candidates, qui seront probablement élues le 7 juin et qui sont toutes de qualité, de faire leurs preuves en matière de compétence, d’efficacité et d’intégrité pour imposer leur autorité et entamer la marche vers l’accession de la Libanaise à la légitimité réelle en politique.

Alia Berti Zein
Avocate à la Cour
Présidente du Comité national libanais de
l’Union internationale des avocats
Il est scandaleux de constater, dans un pays aussi politisé que le Liban, soi-disant cultivé et civilisé, que sur 701 candidatures aux élections du 7 juin, six seulement sont des femmes. Pour ne citer que les pays voisins, le Koweït, à titre d’exemple, qui n’a octroyé le droit de vote et d’éligibilité aux...