Scène de la vie quotidienne (sur les routes)

Imaginez-vous un jour de pointe (c'est-à-dire un jour comme les autres) au carrefour du Musée, devenu depuis l'achèvement du nouveau tunnel une véritable foire d'empoigne. La circulation est bloquée de tous les côtés, à cause notamment de la proximité du siège de la Sûreté générale. Soudain, tremblement de terre dans votre petite voiture que vous considérez comme un petit bijou de sophistication et d'élégance. Un énorme 4x4 vous emboutit de devant, du côté du conducteur. Le chauffeur, qui pèse au moins autant que sa voiture, vous abreuve d'insultes, votre mère et toute votre lignée y passe. Il voulait passer en diagonale et naturellement, il est ultrapressé. Sans prendre la peine de descendre, il poursuit son chapelet d'insultes, appelant à la rescousse le policier de faction pour lui donner l'ordre d'ouvrir la voie à la circulation et donc de vous obliger à partir. N'ayant pas un répertoire aussi sophistiqué que celui de votre agresseur, vous appelez vous aussi le policier à l'aide pour qu'il fasse taire le moulin à insultes. Totalement débordé et sans doute effrayé par le monstre en 4x4, le policier vous demande de circuler. Vous osez alors un timide « Il faut attendre l'expert. » Mais harcelé par l'agresseur, le policier vous prie de vous écarter et de lui remettre vos papiers. Agressée verbalement et physiquement puisque votre voiture est amochée, c'est pourtant à vous que l'on s'en prend. Vous préférez vous enfuir, au bord de la crise de nerfs.
Moralité de cette histoire somme toute banale : que vaut un Liban souverain, indépendant, résistant et autres grands mots si la dignité du citoyen y est sans cesse bafouée ? Et si les forces de l'ordre, censées être un recours, craignent plus les monstres ambulants que les lois ? À moins de deux mois des élections législatives, et alors que les programmes s'étalent en long et en large dans les médias, un seul mot fait cruellement défaut, le respect...