Éclairage La trêve enclenche une féroce bataille électorale en Israël

À peine le fracas des canons s’est-il tu à Gaza que la bataille électorale a commencé à faire rage hier en Israël, l’opposition de droite ouvrant les hostilités en présentant comme un « échec » le cessez-le-feu décrété par le gouvernement sortant d’Ehud Olmert. Pendant toute l’opération « Plomb durci » lancée par l’armée israélienne le 27 décembre, les partis politiques avaient mis une sourdine à leurs querelles, malgré l’approche des législatives du 10 février, afin de ne pas être accusés de briser le « consensus national ». Mais quelques heures après l’entrée en vigueur officielle du cessez-le-feu, cette retenue a volé en éclats. Selon les commentateurs, le bilan des 22 jours de l’offensive israélienne à Gaza va être au centre de la campagne. D’ores et déjà, le Likoud, principal parti d’opposition de droite, qui a le vent en poupe dans les sondages, a critiqué le gouvernement en l’accusant d’avoir bridé l’armée dans son élan. Le Kadima, le parti centriste d’Ehud Olmert dirigé par Tzipi Livni, et Ehud Barak, le ministre de la Défense et chef du Parti travailliste, avaient d’avance répondu à ces critiques. Ils ont ainsi justifié le cessez-le-feu en proclamant que « tous les objectifs de l’opération ont été atteints et au-delà ». Un bilan contesté par Sylvan Shalom, un des chefs du Likoud. « Nous n’avons rien obtenu », a déploré cet ancien ministre des Affaires étrangères en énumérant une liste de ce qu’il considère comme des échecs. « Israël n’a pas levé la menace du Hamas qui va pouvoir continuer à tirer des roquettes et se livrer à la contrebande d’armes car l’Égypte reste seule à contrôler ce qui se passe à sa frontière avec la bande de Gaza et on a vu ce qui se passe lorsque les Égyptiens sont seuls à l’œuvre », a ajouté M. Shalom. M. Shalom a ainsi accusé l’Égypte d’avoir fermé les yeux sur le trafic d’armes organisé par le Hamas grâce à des centaines de tunnels reliant le territoire égyptien au sud de la bande de Gaza. La reprise des tirs de roquettes hier vers le sud d’Israël, si elle se poursuit, devrait donner de l’eau au moulin de l’opposition. M. Shalom a également critiqué le fait que Gilad Shalit, un soldat franco-israélien enlevé en juin 2006 par le Hamas et détenu dans la bande de Gaza, n’ait pas été libéré avant qu’un cessez-le-feu intervienne. Le sort de ce soldat, auquel l’opinion publique israélienne est très sensible, a été très longuement évoqué par les médias. Avant le cessez-le-feu, tous les sondages donnaient comme grand favori le Likoud mené par Benjamin Netanyahu, un ancien Premier ministre. Ce parti qui dispose de 12 députés sur 120 devrait plus que doubler le nombre de ses parlementaires. Les sondages prévoient également une percée du parti d’extrême droite, Israël Beitenou, dirigé par le député d’opposition Avigdor Lieberman, partisan déclaré de la manière forte. « Le peuple est fort, les habitants du sud d’Israël ont fait preuve de leur résistance aux tirs de roquettes, seul le gouvernement empêche l’armée d’achever le travail », a affirmé M. Lieberman. Le Shass, le principal parti ultraorthodoxe, membre de la coalition actuelle, qui est prêt à nouer une alliance avec le Likoud, a également adopté une ligne « dure ». Son représentant au cabinet de sécurité, Eli Yishaï, ministre du Commerce et de l’Industrie, a ainsi voté contre le cessez-le-feu. Nahum Barnéa, un éditorialiste très influent, souligne pour sa part dans le quotidien Yediot Aharonot que le « consensus national en Israël qui prévalait durant les combats est mort avec l’entrée en vigueur du cessez-le-feu ». « Les élections du 10 février approchent, tous les partis doivent désormais partir à la chasse aux électeurs », ajoute le journal. Jean-Luc RENAUDIE (AFP)