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Actualités - CHRONOLOGIE

Exposition La caricature, sous plusieurs coutures, à la LAU Maya GHANDOUR HERT

À voir leurs airs innocents, on leur donnerait le bon Dieu sans confession. Et pourtant. Steve Bell, Yazid el-Harithy et Armand Homsi n’ont nullement leur plume dans la poche. Les trois caricaturistes luttent à coups de crayons féroces et exposent leurs dessins, jusqu’au 18 janvier, au Sheikh Zayed Hall de la LAU, à l’initiative du British Council et sous le titre de « Lighting Lamps ». Outre celles des trois invités, l’exposition regroupe les œuvres du Syrien Ali Ferzat, des Jordaniens Imad Hajjaj et Jalal el-Rifaï, du Palestinien Amer Chomaly et de l’Égyptien Moustafa Hussein. Ces artistes animent les pages des quotidiens et hebdomadaires de la région, mais autre point commun : ils ont participé au programme Media in Society initié par le British Council en collaboration avec le BBC World Service Trust. Couvrant les Proche et Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, ce projet vise à rapprocher les professionnels des médias (presse écrite, presse on-line, télévision, radio et arts visuels) pour une meilleure sensibilisation aux enjeux sociaux et culturels de l’actualité. « Ce projet œuvre également à rapprocher les journalistes du monde arabe avec ceux de Grande-Bretagne pour une meilleure compréhension de leurs mondes respectifs », a souligné Amanda Burrell, directrice du British Council, lors d’une présentation à la presse où étaient également invités des étudiants de l’université libano-américaine. C’est au cours de cette mini-conférence à plusieurs voix que se sont exprimés « les trois mousquetaires » du dessin de presse invités chacun à donner son avis sur les véritables pouvoirs de cet art. Faire rire et toucher, voilà le but de la caricature. Et voilà aussi la conclusion que l’on pourrait tirer des différentes interventions même si les artistes eux-mêmes se défendent d’être en possession d’une arme. Car la caricature est bien une arme. Une arme puissante, bien qu’ancienne déjà, puisque l’on s’accorde à la faire naître, sous sa forme actuelle, au XVIe siècle. Steve Bell en a tracé un bref historique et a souligné que, dès le départ, la caricature s’est attaquée à tout et a fait peur aux pouvoirs. Malgré la police qui l’a souvent traquée, elle a fait entendre durant des siècles, et jusqu’à aujourd’hui, le cri révolutionnaire. Les premières caricatures sont reprises sur des feuilles volantes largement diffusées. Rois, princes et prélats y sont vilipendés. En Angleterre, c’est le roi George III qui est la première cible de William Hogarth qui, en 1730, dessine les premières scènes de caricature en donnant au genre une nouvelle dimension : celle d’une étude de mœurs et d’une critique sociale. Un fait social Agressive par nature, la caricature déforme les visages, « animalise » parfois, exagère les caractéristiques physiques de la personne ciblée ; au-delà du plaisir graphique, elle est aussi un fait social car elle rappelle, à ses débuts tout au moins, les punitions par contumace exécutées publiquement. Mais elle n’affecte que l’apparence d’une personne et suscite ainsi le rire. Toujours en Angleterre, puisque c’est le pays de Steve Bell, le dessinateur Gillray va créer sa représentation satirique graphique, « Boney », un personnage aux facettes grotesques, parfois tout petit, parfois gigantesque, mais toujours monstrueux. Les dessins participent au combat polémique et à la propagande. La censure entre parfois en scène et l’artiste a plusieurs fois maille à partir avec les autorités. Si aucune censure ou presque n’existe dans la plupart des pays démocratiques, il existe une autocensure que nombre de dessinateurs revendiquent. Le dessin est fait pour lancer un pavé dans la mare, mais il s’inscrit dans un contexte journalistique et doit donc respecter le regard proposé aux lecteurs par ce journal. De nos jours et sous nos latitudes, la caricature reste, selon Armand Homsi, un moyen de parler de l’actualité du jour, de se moquer des hommes en place, de faire sourire sur des sujets qui ne sont pas intrinsèquement drôles et, enfin, de donner envie de s’intéresser à ce qui est essentiel dans un journal, c’est-à-dire l’écrit. Pour le Saoudien Yazid el-Harithy, le caricaturiste ou « cartoonist » n’est pas là pour opérer un changement dans la société. « Il souligne les problèmes d’une manière drôle ». Les œuvres exposées au Sheikh Zayed Hall (une sélection personnelle des artistes) traduisent en un langage universel les grandes préoccupations du moment et de la région : conflits internationaux, crise pétrolière, inflation, George W. Bush, la guerre israélo-palestinienne, la corruption, le militarisme, l’hypocrisie, l’oppression de la femme, l’obscurantisme religieux, les relations conjugales… Ressemblante et exagérée, la caricature demeure fidèle à sa vocation moderne : elle amuse et révèle à la fois. Et peut-être nous révèle-t-elle à nous-mêmes.
À voir leurs airs innocents, on leur donnerait le bon Dieu sans confession. Et pourtant. Steve Bell, Yazid el-Harithy et Armand Homsi n’ont nullement leur plume dans la poche. Les trois caricaturistes luttent à coups de crayons féroces et exposent leurs dessins, jusqu’au 18 janvier, au Sheikh Zayed Hall de la LAU, à l’initiative du British Council et sous le titre de...