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Actualités - REPORTAGE

REPORTAGE Les Ouïghours du Xinjiang veulent d’abord survivre au jour le jour

Comme l’immense majorité des habitants ouïghours du Xinjiang, Yusup est davantage préoccupé par sa survie quotidienne que par les revendications séparatistes et les tensions avec l’ethnie han, majoritaire en Chine. « C’est dur d’être ouïghour. Ce n’est pas une question de politique ou de religion. Nous voulons seulement nous en sortir », affirme cet homme de 36 ans habitant Aksu, une bourgade perdue de cette province autonome qui s’étale sur un sixième du pays. Yusup conduit son véhicule sur une autoroute déserte, dans un paysage brûlé par le soleil. Contrairement à de nombreux locaux, il parle parfaitement le mandarin. Il est musulman, mais pas très pratiquant. D’ailleurs, il n’est pas coiffé de la calotte musulmane traditionnelle, largement utilisée ici. Sa principale préoccupation, explique-t-il, est de trouver un moyen de subsistance pour lui, sa femme et leur fils âgé de 10 ans. Il touche donc un peu à tout, se livre à de petits négoces, donne dans la production de coton et, de temps à autre, conduit le taxi d’un ami pour arrondir ses fins de mois. Tout compris, il gagne environ 1 000 yuans (144 dollars) par mois. Son cas personnel met à mal certains clichés répandus à l’étranger, selon lesquels les Ouïghours du Xinjiang, entre deux brochettes de mouton, ne penseraient qu’à l’insurrection islamique contre les forces « colonialistes » de Pékin et contre l’ethnie allogène han. « Le Turkestan oriental ne verra jamais le jour », assure Yusup en utilisant une appellation interdite par le gouvernement central. « La Chine ne l’accepterait jamais », ajoute-t-il en refusant par précaution de donner son nom de famille. Dans les campagnes autour d’Aksu, la fièvre des Jeux olympiques semble ne pas avoir pris. Rien, ou très peu, n’a changé depuis longtemps sur le plan économique. L’agriculture est vivrière. Les villageois élèvent des bovins ou récoltent des fruits. L’inflation est source d’inquiétude. Ailleurs, la situation est différente. « Depuis 1997, on assiste (au Xinjiang) à un taux de croissance à deux chiffres et à un développement jamais vu », décrit James Millward, un spécialiste du Xinjiang de l’Université de Georgetown. Certains en profitent indéniablement. Tel Abdulkerim, qui gère une agence de voyages. Ses revenus ont triplé en cinq ans grâce à l’afflux de touristes nationaux venus admirer les montagnes majestueuses de la région. « L’économie n’a jamais été aussi bonne », se félicite-t-il. Mais d’autres se plaignent d’être tenus à l’écart de ces perspectives florissantes. « C’est comme si des personnes étaient dans un train à grande vitesse flambant neuf, tandis que nous autres avançons en haletant », estime une jeune femme habitant Aksu. Elle accuse l’ethnie han de pratiquer des discriminations. « Si nous allons dans une banque, les Chinois qui y travaillent nous parlent très mal et se méfient de nous », dit-elle. Dan MARTIN (AFP)
Comme l’immense majorité des habitants ouïghours du Xinjiang, Yusup est davantage préoccupé par sa survie quotidienne que par les revendications séparatistes et les tensions avec l’ethnie han, majoritaire en Chine.
« C’est dur d’être ouïghour. Ce n’est pas une question de politique ou de religion. Nous voulons seulement nous en sortir », affirme cet homme de 36 ans...