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Actualités - CHRONOLOGIE

LA situation Les armes du Hezbollah continuent de bloquer la déclaration ministérielle, le Nord s’embrase de nouveau

Au Liban, la théorie du complot est une gymnastique intellectuelle très prisée qui permet aux Libanais de se disculper d’office, de s’autorassurer, de vivre tranquilles sans avoir besoin de réfléchir. Et surtout de rejeter la responsabilité de leurs faits et méfaits, de leurs misères et de leurs tribulations à d’hypothétiques « autres » dont on ne connaît rien à part qu’ils veulent le « mal » au pays. Deux groupes de malotrus appartenant à deux communautés adverses décident-ils de s’entretuer, mettant leurs quartiers à feu et à sang ? Et voilà que l’on accuse une « cinquième colonne », de vagues « étrangers » d’avoir fomenté un complot, tout en occultant la moindre responsabilité des factions belligérantes, de ceux qui les arment et de ceux qui se contentent d’observer les combats sans bouger, malgré la mort d’enfants, d’hommes et de femmes et la destruction des maigres biens de la population. Il reste qu’il y a des coïncidences qui, à force de répétition, finissent par perdre tout caractère fortuit, accréditant la théorie du complot. Tel est le cas des combats à répétition qui déclenchent – que l’on déclenche ? – entre Bab el-Tebbaneh et Jabal Mohsen à chaque fois que le bras de fer entre le 8 et le 14 Mars se durcit. Les heurts intercommunautaires dans le Nord ont en effet éclaté lorsque la crise de la répartition des maroquins entre les deux camps avait atteint son faîte, pour se renouveler ensuite avec le problème de la distribution des portefeuilles au sein de la majorité avant de reprendre de plus belle hier, sur fond de blocage du processus d’élaboration de la déclaration ministérielle. Les échauffourées sémantiques entre les représentants du 14 et du 8 Mars au sein de la commission de rédaction auraient-elles attisé automatiquement les ardeurs guerrières des miliciens de Bab el-Tebbaneh et Jabal Mohsen où la pauvreté et l’illettrisme battent des records vertigineux ? Ou bien le député Mohammad Kabbara aurait-il raison en affirmant que certains cherchent à engranger des bénéfices politiques en attisant la discorde confessionnelle dans le Nord – une discorde meurtrière mais qui ne risque pas de s’étendre, du fait de la faiblesse des effectifs de la communauté alaouite au Liban ? Quoi qu’il en soit, force est de reconnaître que l’affaiblissement de l’autorité de l’État, du fait de la léthargie de ses institutions, n’est pas pour immuniser la situation contre certaines initiatives pyromanes. Le corollaire immédiat de cette observation est que seul le démarrage de l’action gouvernementale, après l’élaboration de la déclaration ministérielle, pourrait faire cesser l’hémorragie à Tripoli. Néanmoins, la commission de rédaction de la déclaration qui s’est réunie hier pour la huitième fois n’a enregistré aucune percée en ce qui concerne le dossier épineux des armes du Hezbollah et a exclusivement évoqué la politique sociale, économique et financière, comme l’a indiqué Tarek Mitri. Et les deux camps restent fortement partagés sur la question de l’arsenal du parti de Dieu. En effet, de source proche de Aïn el-Tiné, on indique que le président de la Chambre Nabih Berry a convenu avec le ministre Mohammad Fneich et avec le conseiller politique de Hassan Nasrallah, Hussein Khalil, qu’il a reçus jeudi, de « réclamer une formule concernant la Résistance qui conjugue les dispositions de l’accord de Doha, de la 1701, de Taëf, du dialogue national et de la déclaration ministérielle du précédent gouvernement ». « Le 14 Mars reconnaît que des parcelles de notre territoire sont occupées. Pourquoi dénie-t-il alors à la Résistance le droit de libérer le territoire par les armes ? » se sont interrogées ces sources, tout en saluant « les positions positives de Saad Hariri et Walid Joumblatt », contactés par Nabih Berry hier. De son côté, le front majoritaire refuse tout retour à la précédente déclaration ministérielle, aux dires d’une source proche du 14 Mars, et refuse « toute allusion, dans la déclaration ministérielle, à la Résistance avec laquelle les armes du Hezbollah n’ont plus rien à voir », comme l’a souligné Amine Gemayel. Jusqu’à quand les tractations au sein de la commission de rédaction pourraient-elles donc durer ? Bien que l’article 64 de la Constitution n’accorde que 30 jours au cabinet pour soumettre sa déclaration ministérielle à l’Assemblée, un éminent juriste explique que ce délai «n’est qu’optatif ou indicatif». Et le constitutionnaliste de préciser: « Comme la Loi fondamentale ne fixe pas de sanctions en cas de dépassement de ce délai, le gouvernement ne sera pas astreint à se démettre. Mais cela ne veut pas dire que les choses peuvent s’éterniser, car le législateur a défini un délai qu’il a jugé raisonnable. » La raison cartésienne aurait-elle encore une place dans le pays des sempiternels complots et des victoires « divines » ? Mahmoud HARB
Au Liban, la théorie du complot est une gymnastique intellectuelle très prisée qui permet aux Libanais de se disculper d’office, de s’autorassurer, de vivre tranquilles sans avoir besoin de réfléchir. Et surtout de rejeter la responsabilité de leurs faits et méfaits, de leurs misères et de leurs tribulations à d’hypothétiques « autres » dont on ne connaît rien à...