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SOCIÉTÉ - Devenu le dernier endroit à la mode, le Meatpacking District est aujourd’hui inabordable Fermeture de Florent, restaurant symbole de la transgression new-yorkaise

Symbole de la transgression new-yorkaise, le restaurant Florent ferme fin juin parce que le Meatpacking District, le quartier des boucheries qu’il a contribué à lancer il y a 23 ans, est devenu inabordable et encombré de jeunes milliardaires au volant de 4x4. Au 69, rue Gansevoort, entre la 12e et la 13e rue, au sud-ouest de Manhattan, l’ambiance n’a pas changé : la peinture du « L » sur la vitrine est effacée, mais le néon rose est toujours là, et à l’intérieur, la décoration mi-bistrot parisien mi-cafétéria américaine est immuable, avec ses petites tables en formica, sa banquette en skaï rouge et son comptoir derrière lequel s’affairent des serveurs plus souvent acteurs ou peintres que professionnels de la restauration. Mais les signes de la fin prochaine sont partout, sur les ardoises où on indique à la craie comment se procurer carafes et toiles cirées sur le site d’enchères e-bay, ou sur les panneaux qui annoncent les cinq soirées à thème qui vont marquer les « étapes de la perte » du 1er au 29 juin, le jour de la fermeture coïncidant avec la prochaine parade de la « Gay Pride ». Les soirées costumées à thème sont une des marques de fabrique de l’établissement, et Florent Morellet avoue volontiers qu’il préfère qu’on l’appelle « la reine » que « le maire » du quartier. « On était la lumière dans un quartier sombre, on est devenu un point sombre dans le quartier de la lumière », résume dans une interview à l’AFP le restaurateur, qui aura 55 ans le 23 juin et se dit « un Américain né en France par erreur géographique ». « Au début je payais un loyer d’un peu plus de 1 000 dollars par mois, actuellement je paye 6 000 dollars, maintenant la propriétaire en demande 30 000 par mois », raconte-t-il. « Je ne regrette pas de partir, on ne peut pas regretter quelque chose d’impossible », ajoute-t-il. Dans la salle du restaurant, où l’on sert moules-frites, boudin noir et bière à une faune hétéroclite d’étudiants, d’artistes, de célébrités comme le styliste Calvin Klein, le chanteur Lou Reed, ou la chanteuse Amy Winehouse lors d’un passage à New York, quelques objets cultes ont déjà disparu. Il s’agit notamment d’une petite carte du Liechtenstein, qui servait à indiquer la place où s’asseyait de son vivant le peintre Roy Lichtenstein, que Florent Morellet a décrochée « pour la sauver de la kleptomanie », et d’objets dont les fanatiques ont commencé à s’emparer après l’annonce de la fermeture, les menus notamment. « Ce quartier me plaisait il y a 23 ans, le restaurant était fréquenté par un mélange de bouchers, de prostituées. Il a été très vite à la mode parce qu’à New York, dès que tu dis que c’est dans un coupe-gorge, ils foncent », se souvient-il. « Le gratin aventureux, excentrique et curieux est venu tout de suite. Mais la nostalgie est trompeuse, nous avons connu des années difficiles, l’épidémie de crack surtout vers 89-90, on devait organiser des patrouilles avec les Guardian Angels (milice de volontaires créée à New York en 1979) pour chasser les dealers et empêcher les gens de se défoncer dans la rue », rappelle-t-il. Tout a changé aujourd’hui dans ce quartier où les crochets des bouchers ont pratiquement disparu et qui est devenu le dernier endroit à la mode, avec des restaurants comme le Spice Market du chef étoilé Jean-Georges Vongerichten, les boutiques de Stella McCartney ou de Diane von Furstenberg, la terrasse de l’hôtel Gansevoort fréquentée par mannequins et banquiers d’affaires, et la piscine sur le toit du club SoHo, immortalisée dans le feuilleton télévisé Sex and the City. « L’âme de New York est dans le changement et pas dans la nostalgie », conclut sans regret cet infatigable défenseur des droits des homosexuels, lui-même séropositif depuis 1987, militant de la préservation historique du quartier et militant pacifiste, qui s’apprête à raconter son aventure dans un livre.
Symbole de la transgression new-yorkaise, le restaurant Florent ferme fin juin parce que le Meatpacking District, le quartier des boucheries qu’il a contribué à lancer il y a 23 ans, est devenu inabordable et encombré de jeunes milliardaires au volant de 4x4.
Au 69, rue Gansevoort, entre la 12e et la 13e rue, au sud-ouest de Manhattan, l’ambiance n’a pas changé : la...