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Le Hezbollah mis à nu …

Dans le trop long et lassant feuilleton du conflit libanais, les tristes incidents d’hier auront eu au moins le mérite de clarifier davantage les enjeux, s’il en était encore besoin. En effet, au train où vont les choses, le Hezbollah risque d’épuiser rapidement le stock de feuilles de vigne qu’il arbore régulièrement depuis de nombreuses années pour dissimuler, assez mal d’ailleurs, ses objectifs stratégiques et ceux de ses amis iraniens. En fait de feuilles de vigne, c’est plutôt de strip-tease qu’il s’est agi hier. La journée avait été placée sous le signe des revendications sociales. Elle s’est achevée sur l’occupation et le bouclage des accès de l’aéroport. Lors de précédentes prestations sur le mode social, le parti de Dieu prenait toujours soin de s’en tenir vaille que vaille à l’alibi qu’il se choisissait pour lui-même, comme, par exemple, lors des incidents de Chiyah-Mar Mikhaël, en janvier dernier. À l’époque, il était encore de bon ton, pour les responsables du parti, de répéter : « Nous n’avons rien à voir. Ce sont des mouvements spontanés de la part d’une population excédée. » Hier, l’écran de fumée qu’étaient censés incarner quelques slogans ouvriers ânonnés par les caciques de la CGTL a été dissipé avant même que d’être formé. Vu la tournure prise par les événements, les colères sociales de Ghassan Ghosn et de ses collègues sombraient dans le pathétique. En termes de discrédit, on ne voit vraiment pas comment la confédération syndicale pourrait s’en remettre cette fois-ci. Des voitures brûlées, des camions déversant du sable sur les voies publiques pour les rendre impraticables, des blitzkriegs à moto dans les rues de Beyrouth, des permanences saccagées, des bandes de miliciens ne prenant même plus la peine de dissimuler leurs armes face aux caméras, cela n’a évidemment plus rien à voir avec des revendications salariales. Sachant qu’à la base, s’il faut s’en prendre à quelqu’un pour avoir entravé l’économie de ce pays, c’est bien au Hezbollah et à lui seul. D’ailleurs, au fil des incidents de la journée d’hier, il est apparu clairement que la question des salaires était loin d’être le motif pour lequel le parti de Dieu s’est ainsi mis à nu. La bataille – la véritable bataille –, c’est, bien entendu, celle qui vient de commencer autour du contrôle de l’aéroport. D’autres feuilles de vigne sont également tombées hier. Parmi elles, cette chose que l’on nomme « l’opposition ». S’il est vrai qu’il y a depuis longtemps des oppositions à la majorité en place, les incidents du 7 mai 2008 ont démontré que lorsqu’on se rapproche des enjeux réels du conflit qui se déroule au Liban, le Hezbollah peut se retrouver désespérément seul. De deux choses l’une : ou bien les appels musclés du général Michel Aoun à participer au mouvement de protestation ont résonné dans un désert total, ou bien le général a lui-même changé d’avis avant l’aube, en concertation ou pas avec les formations organiquement liées à la Syrie, demeurées étonnamment sages hier. Reste un seul appoint pour le Hezbollah, Nabih Berry, dont les partisans, placés délibérément en première ligne face à ceux du Courant du futur, ont donné le change en cherchant à se faire remarquer dans les rues de la capitale. Mais cet appoint paraîtrait anecdotique et totalement négligeable si M. Berry ne continuait à revêtir les habits de président de la Chambre, une tenue qui lui sied de moins en moins. S’ils n’étaient pas tragiques, les incidents fomentés en trompe-l’œil à Beyrouth même paraîtraient aussi anecdotiques, dans la mesure où le Hezbollah n’avait les yeux braqués que sur un seul objectif : l’aéroport. *** À présent que le gouvernement s’est décidé à affronter le parti de Dieu là où il faut l’affronter, c’est-à-dire dans son infrastructure para-étatique, tout recul serait fatal pour lui, pour la majorité, pour la Révolution du Cèdre, pour le Liban tout entier. S’il faut impérativement que la confrontation demeure politique, elle doit néanmoins être totale. Désormais, l’ambiguïté n’est plus acceptable. Ce pays est doté d’une Constitution ; il est signataire de traités, de conventions et d’armistices ; il est membre fondateur des Nations unies et se doit de mettre en œuvre les résolutions internationales qui le concernent. S’il est nécessaire d’appliquer tous ces textes sans provoquer d’effusion de sang, cela ne signifie en aucun cas que l’on doive en perdre de vue la finalité par quelque compromis que ce soit. Désormais, le concept même de « résistance » privée, tel qu’il est mis en œuvre par le Hezbollah, doit être considéré comme hors la loi tant que la Syrie n’aura pas fait le nécessaire pour démontrer la libanité des fermes de Chebaa et même au-delà puisque, le cas échéant, toute décision à caractère militaire n’est censée être prise que dans le cadre d’une stratégie de défense établie par tous les Libanais et pour tous les Libanais. Et pour commencer, le gouvernement doit tenir bon sur la question de l’aéroport. Il y va de la sécurité physique de nombreux Libanais autant que de la pérennité de l’État. Il y va tout simplement du Liban. Élie FAYAD
Dans le trop long et lassant feuilleton du conflit libanais, les tristes incidents d’hier auront eu au moins le mérite de clarifier davantage les enjeux, s’il en était encore besoin.
En effet, au train où vont les choses, le Hezbollah risque d’épuiser rapidement le stock de feuilles de vigne qu’il arbore régulièrement depuis de nombreuses années pour dissimuler, assez...