Rechercher
Rechercher

Actualités

Perspective d’avenir pour un développement durable au Proche-Orient II- Asymétrie Nord-Sud Fady Comair

III- Perspective d’avenir pour l’Union méditerranéenne L’avenir de l’Union doit se fonder sur la vision à long terme d’une Méditerranée « durable », c’est-à-dire politiquement stable, prospère et pacifique. Cette vision se fonde sur le choix volontariste d’un scénario « gagnant-gagnant », qui entend favoriser le codéveloppement du Nord et du Sud tout en exploitant les synergies positives de la gestion rationnelle de l’environnement, du développement et de la gestion économique. Des efforts conjoints sont indispensables pour progresser dans la gestion durable des ressources naturelles et humaines et valoriser les diversités culturelles de la région. Une dynamique de complémentarité et d’échange devra ainsi être développée autour d’un concept fort de « destin partagé » et de responsabilités communes. La région devrait évoluer vers un modèle de coopération fortement intégrée au sein d’un espace méditerranéen élargi, prospère et stable en vue de concrétiser une Union forte en Méditerranée. Le développement de cette nouvelle entité se fondera sur la reconnaissance des valeurs mutuelles et de la diversité, où l’ensemble des pays s’investiront dans des processus de gouvernance favorisant le développement durable, la croissance économique et l’amélioration des niveaux de vie (voir L’Orient-Le Jour du lundi 4 mars 2008). Selon ce scénario, la nouvelle Méditerranée saura s’inscrire avec succès dans la mondialisation en valorisant ses spécificités, ses complémentarités et ses synergies avec les pays voisins de l’Union européenne et de la Ligue des États arabes. Les fractures économiques et sociales entre les pays pourront se réduire progressivement, et les objectifs du millénaire pour le développement seront atteints. Les biens publics essentiels devront être protégés et gérés dans le cadre d’un concept de transparence. De plus, la gestion et la valorisation des ressources naturelles doivent être nettement améliorées. Les populations de la région seront amenées à prendre d’avantage conscience de l’immense potentiel que constitue la diversité et la qualité de leur patrimoine pour l’essor d’un tourisme spécifique et diversifié, développé en synergie avec l’agriculture et d’autres activités économiques. Les villes deviendront de véritables vecteurs de développement régional, tandis que des emplois pourront être créés dans de nouveaux créneaux porteurs, notamment la recherche et le développement, l’accès aux services de base, les industries et technologies propres, la sensibilisation pour assurer les économies d’eau et d’énergie, les produits agricoles et agroalimentaires de qualité, la valorisation de la biodiversité et les transports en commun non polluants. L’UE et ses voisins du bassin méditerranéen auront compris leurs intérêts mutuels et reconnu le caractère fructueux de leurs complémentarités et de leurs échanges au sein d’un monde globalisé et concurrentiel. III-1 Objectifs du développement de la Méditerranée Les quatre objectifs suivants visent à promouvoir des progrès en termes de durabilité dans les domaines de l’économie, du social et de l’environnement ainsi que dans celui de la gouvernance. Objectif 1: Promouvoir le développement économique durable La croissance économique et la protection de l’environnement sont considérées en tant qu’actions compatibles qui visent à renforcer le développement économique tout en diminuant la pression sur les ressources naturelles. Sur le plan investissement financier, on devrait aboutir à un équilibre entre la satisfaction des besoins des populations, les exigences des activités économiques et la protection de l’environnement et ainsi répondre à la demande d’emplois et aux besoins sociaux. Cet objectif pourrait être atteint en renforçant les financements internationaux et économiques pour répondre aux besoins des pays du Sud-Est de la Méditerranée. Objectif 2 : Réduire les disparités sociales et renforcer les projets d’éducation Le développement des ressources humaines et le renforcement des capacités de tous les acteurs constituent une exigence fondamentale. La protection de l’environnement, le développement économique et le progrès durable ne pourront en effet être obtenus tant qu’une partie aussi importante de la population jeune des pays des rives sud-est n’a pas accès à l’éducation secondaire ou technique. Il est aussi indispensable de renforcer les campagnes de sensibilisation aux droits de l’homme visant à réduire les inégalités entre les sexes. La promotion des échanges culturels est essentielle pour consolider le tourisme culturel et la mise en valeur des patrimoines culturels nationaux. Objectif 3 : Imposer le concept de la gestion durable des ressources naturelles Le changement climatique que connaîtra le bassin méditerranéen freinera le développement économique des pays du bassin et affectera les biens collectifs des populations. La priorité doit être donnée à la protection de la mer, du littoral, du climat et de la qualité de l’air, des ressources en eau, des sols et de la biodiversité. De plus, une action complémentaire doit être menée dans le domaine de la gestion durable du patrimoine culturel et paysager, de même qu’à la réduction de la vulnérabilité aux risques naturels tels qu’inondations, incendies, sécheresses, séismes et tsunamis. La dégradation continuelle des sols, des paysages et du littoral doit aussi être stoppée et les objectifs du sommet de la Terre de Rio de Janeiro doivent être appliqués afin de préserver la protection et la valorisation de la biodiversité marine, littorale et continentale. Objectif 4 : Améliorer la gouvernance à l’échelle locale, nationale et régionale Le développement durable de la Méditerranée ne peut être appliqué sans une gouvernance adéquate. Ce concept exige que l’exercice du pouvoir des gouvernements des pays des rives sud-est se pratique dans le cadre d’une démarche de participation, de responsabilité, d’efficacité et de cohérence. Les États du Bassin doivent entamer l’application du Plan de Johannesburg, selon lequel des politiques environnementales, sociales et économiques doivent être mises en œuvre sur des bases saines. Les institutions doivent veiller à répondre aux besoins des populations. Un État de droit doit être instauré, avec des mesures anticorruption. L’application du concept de l’égalité des sexes serait une opportunité favorable au développement social. Ces exigences constituent les bases indispensables du développement durable des pays de l’Union. En effet, sans une gouvernance efficace et une participation dynamique des divers acteurs, aucun objectif du plan d’action ne pourrait être atteint. Enfin, une partie importante de ce plan consiste à développer des synergies entre les pays pour renforcer les processus de mise en œuvre des Conventions globales des Nations unies et des directives de l’Union européenne. IV- Actions prioritaires pour l’élaboration de la feuille de route II est indispensable de traduire les objectifs cités précédemment en projets concrets afin d’élaborer la feuille de route qui doit traiter les six domaines d’actions prioritaires et interdépendants, à savoir : • Maîtrise de l’énergie et des transports pour atténuer les effets du changement climatique ; • Gestion intégrée des ressources en eau ; • Environnement et santé ; • Développement agricole et gestion des territoires ; • Économie et société ; • Gouvernance. Ces six domaines prioritaires sont pertinents en termes d’action et présentent des carences en matière de gouvernance et d’intégration qu’il convient de corriger si l’on veut que la région puisse s’engager dans un processus de développement durable. La section suivante propose d’expliciter ces thèmes en vue de lancer des forums de concertation nationaux au niveau de chaque pays. Cette démarche constitue le cadre logique pour élaborer la Charte de l’Union. IV- 1 Maîtrise de l’énergie et des transports pour atténuer les effets du changement climatique Les statistiques énergétiques montrent que la consommation des pays méditerranéens dépend, jusqu’à ce jour, très largement des sources d’énergie fossile. Cette consommation énergétique qui a plus que doublé depuis 30 ans augmente la contribution des pays méditerranéens au total mondial des émissions de gaz à effet de serre. Si cette tendance continue à se produire, le taux de carbone passera de 7 à 9 % et la dépendance énergétique de la région pourrait s’accroître considérablement surtout que le bassin méditerranéen est une écorégion particulièrement vulnérable au changement climatique. De plus, de nombreux pays méditerranéens présentent une structure tarifaire et fiscale qui n’incite pas à l’économie d’énergie et par conséquent l’utilisation des énergies renouvelables n’est pas suffisamment encouragée par les gouvernements du bassin malgré le potentiel significatif que dispose cette région en énergies naturelles renouvelables (solaire et éolien). La réduction de la consommation énergétique des pays méditerranéens ainsi que du taux de gaz à effet de serre nécessite une utilisation de l’énergie de manière rationnelle. La mise en œuvre rapide d’une politique méditerranéenne globale qui encourageait l’utilisation des énergies renouvelables non polluantes serait un objectif primordial à atteindre. Ces orientations freineront l’effet du réchauffement climatique au niveau du bassin méditerranéen et encourageront les progrès techniques industriels. De plus, cette démarche permettra la création d’emplois et augmentera de ce fait la productivité des secteurs économiques. Une mise en œuvre résolue de la Convention des Nations unies sur le changement climatique et du Protocole de Kyoto fournirait également des bénéfices locaux et régionaux à court et long terme, notamment en renforçant la coopération nord-est et en finançant des projets de développement durable dans les pays méditerranéens en développement. En ce qui concerne le secteur du transport, la gestion de la demande de passagers et de fret augmente plus vite que la croissance économique et démographique dans la région. Face à cette tendance, une étude portant sur les systèmes de transport dans les pays sud-est du bassin méditerranéen a montré que la gestion de ce secteur se fait d’une manière non durable à long terme et très polluants. Ils enregistrent une consommation énergétique très élevée en carburant, ce qui est très nocif pour la santé publique. Dans des pays comme le Liban, le transport ferroviaire est inexistant et la circulation dans la capitale Beyrouth et les grandes agglomérations du pays devient problématique et constitue un frein à l’économie nationale. Les tendances du transport dans les pays du Sud soulèvent les mêmes inquiétudes. Elles sont souvent aggravées par des investissements publics, des subventions et des fiscalités favorisant la mobilité automobile individuelle et la route plutôt que le transport collectif. Les transports terrestres sont dominés par la route, qui représente 88 % du trafic voyageurs et 82% du trafic fret. Les transports constituent un tiers du total de la consommation d’énergie et, de ce fait, contribuent considérablement aux émissions des gaz à effet de serre et à la pollution. Les coûts de la congestion due au trafic motorisé sont en constante augmentation. Vu que l’analyse de ce secteur soulève des problèmes complexes, notamment de nature environnementale, sociale et culturelle, ces tendances pourraient être gérées de façon durable si l’on adoptait des politiques régionales et nationales aptes à anticiper les évolutions prévues. La plupart des pays du Sud-Est sont obligés d’adopter de nouvelles politiques, plus viables, en matière de transports. Des normes obligatoires sur les véhicules à moteur doivent être appliquées à l’instar des États de l’UE. Le lancement des projets-pilotes de transport associant la mer, le rail et la route pourront donner des résultats prometteurs. IV-2 Gestion intégrée des ressources en eau Dans le bassin méditerranéen, l’eau est une ressource rare, fragile et inégalement répartie dans l’espace et le temps, et le changement climatique devrait accentuer l’irrégularité des pluies et diminuer leur volume. En raison de ces précipitations aléatoires et de l’aridité des pays situés sur les rives sud-est du Bassin, l’alimentation en eau constitue une contrainte majeure pour le développement économique et pour l’agriculture. Le secteur agricole est le plus gros consommateur d’eau et représente 60 à 80 % des ressources en eau renouvelables des pays méditerranéens. La population disposant de moins de 1 000 m3 par habitant et par an s’élève à 108 millions d’habitants et pourrait atteindre 165 millions en 2025. Certains pays du Bassin sont dans une situation critique de « stress hydrique » selon le classement des Nations unies. Les stratégies nationales ont privilégié des politiques de l’offre en multipliant les infrastructures hydrauliques (barrages et lacs) et les forages. De nombreux barrages dans les pays du Sud et de l’Est vont cependant perdre l’essentiel de leur capacité du fait de la diminution des précipitations due au changement climatique et aussi à l’envasement et seuls quelques pays ont encore un potentiel hydraulique à exploiter sur le long terme. Les nappes aquifères sont surexploitées ou irréversiblement dégradées par des intrusions salines. Cette situation s’applique aussi sur les nappes fossiles non renouvelables. Les réseaux hydrauliques se détériorent du fait de la surexploitation des bassins versants et de la dégradation des écosystèmes des rivières. La gestion des cours d’eau transfrontaliers constitue une source potentielle de conflits du fait de la non-application de la convention des Nations unies concernant « le partage équitable et l’utilisation raisonnable » des eaux internationales, surtout au Proche-Orient. La plupart, des pays méditerranéens, sont donc confrontés simultanément à plusieurs questions liées à l’exploitation de la ressource en eau et qui sont : comment gérer durablement les ressources hydriques ? Comment assurer l’accès à l’eau potable aux populations non encore desservies ? Comment habituer les usagers à des pratiques et des comportements économes en eau ? Le premier défi qui se pose sur les agences des eaux concerne les politiques de gestion de la demande. Le second défi appelle la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement en matière d’accès à l’eau potable et à l’assainissement. Le troisième défi appelle au renforcement des partenariats entre utilisateurs et organisations locales de gestion de l’eau, ainsi que des campagnes de sensibilisation aux économies d’eau auprès des usagers. Certains pays du Nord comme du Sud ont commencé à assurer une gestion plus efficiente de l’eau comme l’a recommandé le sommet de Johannesburg. L’UE a lancé une initiative pour l’eau dont la composante méditerranéenne représente un cadre de coopération pour contribuer à atteindre dans la région les Objectifs du millénaire pour le développement. Il est utile de noter que le Liban a déjà mis en application cette stratégie en 2005. Fady Comair Directeur général des ressources hydrauliques et électriques Article paru le mercredi 5 mars 2008 Demain : Protéger un environnement très vulnérable
III- Perspective d’avenir pour
l’Union méditerranéenne
L’avenir de l’Union doit se fonder sur la vision à long terme d’une Méditerranée « durable », c’est-à-dire politiquement stable, prospère et pacifique. Cette vision se fonde sur le choix volontariste d’un scénario « gagnant-gagnant », qui entend favoriser le codéveloppement du Nord et du Sud tout...