Du marbre d’Italie, quatre minarets, 82 dômes, plus de 1000 colonnes et le plus grand tapis du monde Les Occidentaux se pressent aux portes de la Grande Mosquée d’Abou Dhabi

Des dizaines d’Occidentaux, dont des femmes toutes vêtues de noir, se pressent quotidiennement aux portes de la Grande Mosquée cheikh Zayed à Abou Dhabi, une merveille d’architecture dotée de dômes, tapis et lustres présentés comme les plus grands au monde. «C’est la troisième plus grande mosquée du monde après les Haramaïn», les mosquées de La Mecque et Médine (Arabie saoudite) et les deux principaux lieux saints de l’islam, lance avec fierté Khawla al-Suleimani, vice-directrice du projet. Mais contrairement à ces deux autres mosquées, celle-ci n’est pas interdite aux non-musulmans, bien au contraire. Les femmes doivent simplement se draper de la tête aux pieds dans des abayas (longues robes noires) qu’on leur remet à l’entrée. «Les non-musulmans ne doivent pas non plus toucher au Coran», dont des exemplaires sont empilés dans chaque salle de prières, avertit l’un des guides. Équipés d’appareils photo, les visiteurs «viennent de l’intérieur, mais aussi de l’étranger», affirme Mme Suleimani. «Ils se comptent par centaines chaque semaine depuis l’ouverture au 1er jour d’al-Adha», la fête musulmane du sacrifice, célébrée le 19 décembre, précise-t-elle. Lancé en 1998 par le fondateur et premier président de la fédération des Émirats arabes unis, cheikh Zayed ben Sultan al-Nahyane, qui était aussi le souverain du richissime émirat pétrolier d’Abou Dhabi, le projet doit être complètement achevé vers novembre 2009. Décédé en novembre 2004, cheikh Zayed repose dans une cour adjacente à la mosquée. «La mosquée est dédiée au père de la nation, dont la vision était fondée sur le dialogue des religions, des civilisations et des cultures», peut-on lire dans des brochures de l’Autorité du tourisme d’Abou Dhabi (Abu Dhabi Tourism Authority, ADTA) distribuées aux visiteurs. L’ADTA a commencé le 10 janvier des visites organisées avec des guides spécialement formés. «Outre les fidèles qui viennent y prier par milliers, la mosquée est visitée par des non-musulmans: Allemands, Français, Britanniques, Italiens, mais aussi Russes, Américains, Argentins et Indiens», précise l’une des guides de l’ADTA. Pour Abou Dhabi, qui, contrairement à l’émirat voisin de Dubaï, veut développer un tourisme très haut de gamme à vocation culturelle, la mosquée constitue un attrait supplémentaire pour les visiteurs étrangers recherchant autre chose que la plage et le shopping. «Selon le vœu de cheikh Zayed, la mosquée a été érigée sur un promontoire de 9,5 mètres pour qu’elle soit visible de loin, sur une superficie de 22000 m carrés, et peut accueillir plus de 40000 fidèles», explique l’ingénieur Mohammad Ali al-Ameri. Les travaux sont terminés à 95%, déclare-t-il, expliquant qu’il ne reste plus à faire que la clôture, le jardin et les parkings. «Construite à 100% en marbre d’Italie, la mosquée compte quatre minarets d’une hauteur de 107 m et 82 dômes de sept tailles différentes. Elle possède 96 colonnes, dont 24 principales, à l’intérieur et 1048 à l’extérieur», énumère fièrement M. Ameri. La construction a mobilisé des «milliers d’ouvriers», en quasi-totalité originaires du sous-continent indien, mais les sculpteurs étaient marocains, dit-il. Des milliers de pierres rares et semi-précieuses ont été utilisées pour les décors, certaines étant incrustées dans les marbres, raconte encore l’ingénieur. Mais la mosquée est surtout réputée pour un fabuleux tapis iranien, fait main, de près de 6000m2, ce qui en ferait le plus grand au monde. «Plus de 1200 ouvrières dans la région de Khorassan, dans l’est de l’Iran, ont été mobilisées pendant deux ans pour tisser ce tapis de 45 tonnes dont le coût est estimé à plus de 8,5 millions USD», affirme M. Ameri. Le tapis couvre le sol de la principale salle de prière, qui peut accueillir jusqu’à 9000 fidèles. Deux salles voisines pouvant accueillir chacune 1500 fidèles sont réservées aux femmes, qui, dans l’islam, ne prient pas avec les hommes. Deux téléviseurs géants y ont été installés pour leur permettre de suivre les prêches de l’imam. Autre marque de grandeur: le dôme principal culmine à 75m de haut et mesure 32,2m de diamètre, ce qui en fait là encore, selon M. Ameri, «le plus grand du monde». La dernière palme revient à l’un des sept lustres en cristal et en acier inoxydable, de fabrication allemande, dont le coût est estimé à plus de 8 millions USD. L’imposant joyau mesure 10 m de diamètre, 10 m de haut et pèse 9 tonnes. L’ingénieur refuse de parler du coût total de la mosquée, mais Mme Suleimani l’estime à «plus de deux milliards de dirhams», c’est-à-dire au moins 544 millions USD.