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Actualités - OPINION

La spirale infernale

Notre classe politique étant constituée en majorité d’acteurs et non de décideurs, il fallait s’attendre à ce que tous nos problèmes ainsi que toutes les solutions proviennent des pays comme les USA, la France, la Syrie, l’Arabie, l’Iran, etc. Sans oublier les Nations unies avec leur concert de rapports trimestriels, de déclarations présidentielles, de résolutions inappliquées, d’un tribunal international qui tarde à voir le jour, d’où un scepticisme croissant légitime vis-à-vis de la volonté réelle des États à le créer. Une rétrospective rapide des trois dernières années montre que l’attentat dont a été victime le ministre Hamadé suivi de l’attentat qui a coûté la vie à l’ancien Premier ministre Rafic Hariri ont été le point de départ d’une spirale infernale, qui a commencé par scinder le pays en trois : le groupe du 14 Mars d’un côté, celui du 8 Mars de l’autre, et entre les deux, la majorité de la population libanaise qui tente tant bien que mal de survivre, alors que la crème de notre jeunesse a quitté le Liban, ou serait sur le point de le faire, amère et déçue. Les institutions ont commencé à se défaire l’une après l’autre, avec en premier, l’élimination du Conseil constitutionnel, considéré à tort ou à raison comme inutile et inefficace au temps de l’hégémonie syrienne. Aucune réaction ne s’en est suivie à l’époque. Ce n’est qu’aujourd’hui que nous réalisons l’importance que cet organisme aurait eu, dans la « folie constitutionnelle » que vit le Liban. Son élimination devient a posteriori compréhensible et nécessaire avant la bataille entre les institutions. Il fallait éliminer l’organe destiné à trancher les conflits pour être sûr de ne pas les résoudre afin précisément de rester en conflit, origine de toute déstabilisation. La voie étant libre, le démantèlement des institutions pouvait continuer. À commencer par l’institution de la présidence de la République et des services sécuritaires, accusés de tous les maux, ouvrant la voie à toute une série d’attentats toujours impunis à ce jour. Puis ce fut le tour du Conseil des ministres, partiellement neutralisé par la démission d’une communauté majeure, entraînant par là même la paralysie du gouvernement, sans compter les décrets et actes contestés ainsi qu’un vaste débat sur la constitutionnalité ou la légitimité du gouvernement, qui ne doit sa survie qu’à l’appui de la communauté internationale. Cette cascade d’événements constitue les maillons d’une chaîne, tous reliés les uns aux autres par un lien invisible formant une spirale infernale, ponctuée de temps à autre par un attentat par-ci, un autre par-là prenant pour cibles sur leur passage députés, généraux, journalistes ou autres victimes innocentes. Pour parachever cela, il fallait paralyser l’institution parlementaire déjà bloquée depuis plus d’un an à travers les réunions folkloriques et hebdomadaires en vue d’une élection présidentielle à laquelle personne ne croit. Pour couronner le tout, à l’absence totale d’un président viennent s’ajouter un centre-ville « occupé » et désert, une économie chancelante, des problèmes sociaux et financiers insolubles, une crise sociale en gestation, et j’en passe. Que reste-t-il de nos institutions ? Reste l’armée et la Banque centrale. Nahr el-Bared a failli être le piège fatal de l’armée, qui a su malgré tout préserver la paix et l’unité nationale dans toutes les épreuves. Sommes-nous à l’abri d’une nouvelle tentative ? Espérons que la candidature du commandant en chef de l’armée (hier contestée et aujourd’hui réclamée par les contestataires d’hier) ne soit une deuxième tentative de déstabilisation de celle-ci, en transformant son commandant en chef en homme politique, en immisçant par là même l’armée et son commandement dans une arène et un champ de bataille politique miné duquel il lui sera très difficile de s’en sortir. L’armée qui a assuré une stabilité sécuritaire en jouant le rôle d’arbitre impartial et juste ne risquerait-elle pas de le perdre en devenant elle aussi acteur ? Demeure encore et toujours la Banque centrale, pierre angulaire de tout le système bancaire libanais et support de l’économie, qui a su résister à ce jour et avec succès à toutes les tentatives et attaques de déstabilisation aussi bien financières que politiques. La BDL reste le champion de l’unité et de l’impartialité, servant le Liban et ses institutions malgré les catastrophes hélas répétées et le chaos qui nous guette. La spirale infernale qui dure depuis plus de trois ans, qui est déjà venue à bout de nos valeurs et de nos institutions, risque de détruire le peu qu’il nous reste. Essayons donc tous ensemble de nous en sortir avant qu’elle ne nous soit fatale. MICHEL J. TUENI Avocat
Notre classe politique étant constituée en majorité d’acteurs et non de décideurs, il fallait s’attendre à ce que tous nos problèmes ainsi que toutes les solutions proviennent des pays comme les USA, la France, la Syrie, l’Arabie, l’Iran, etc. Sans oublier les Nations unies avec leur concert de rapports trimestriels, de déclarations présidentielles, de résolutions...