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La diffusion d’une vidéo sur le site du jeune homme a conduit à la condamnation de policiers Waël Abbas, un bloggeur engagé pour la défense des droits de l’homme en Égypte Émilie SUEUR

Deux policiers égyptiens ont été condamnés à trois ans de prison pour avoir sodomisé avec un bâton Emad al-Kabir, un conducteur de bus. C’est en arrivant lundi à Beyrouth, où il participait à une conférence sur les médias dans les contextes conflictuels, que Waël Abbas a appris la bonne nouvelle. « J’étais tellement heureux ! » affirme le jeune Égyptien, qui, d’un geste de la main, semble dire qu’il ne trouve pas plus de mots pour définir son état d’esprit. Discrétion ou humilité d’autant plus notables que c’est en grande partie grâce à ce jeune homme de 33 ans que cette sentence a été prononcée. Sentence qui aurait pu ou dû être plus lourde puisque les policiers risquaient 15 ans de prison, mais le juge a justifié sa clémence en invoquant le fait que « les accusés sont jeunes et manquent d’expérience... ». « C’est vrai, la sentence est légère, mais c’est tout de même un précédent », souligne Waël. Cette sentence est en effet la peine la plus lourde prononcée contre des policiers égyptiens depuis 20 ans, selon l’avocat de M. Kabir. L’affaire Kabir a commencé il y a quelques mois quand Waël a placé sur son blog (http://misrdigital.blogspirit.com) une vidéo montrant la scène de torture. « Apparemment, les policiers avaient filmé la scène avec un téléphone portable. La vidéo a filtré et quelqu’un me l’a transmise après avoir tenté sa chance, sans succès, auprès des principaux médias », explique Waël. L’affaire a rapidement fait boule de neige, des organisations de défense des droits de l’homme reprenant le cas Kabir et un journal indépendant égyptien, al-Fagr, se lançant dans une enquête. Waël a créé son blog en 2004, alors que l’Égypte était agitée par un mouvement de protestation plaidant pour une démocratisation du régime. « J’ai créé ce blog car j’estimais que la couverture de ce mouvement par les médias traditionnels n’était pas à la hauteur de l’événement. Internet est un espace de liberté pour moi, un support sur lequel j’échappe à la censure et aux pressions », explique Waël. Armé d’une petite caméra, il se glisse partout, dans les manifestations d’opposants, dans les sit-in de juges dénonçant, en mai 2006, les fraudes électorales. Alors que les services de sécurité égyptiens saisissent les images tournées par les cameramans des principales chaînes de télévision, Waël leur échappe, et enchaîne les scoops. Sur son blog, il poste des vidéos montrant la répression des forces de l’ordre contre les manifestants, des images d’activistes égyptiennes agressées par les membres des services de sécurité. En 2006, durant les fêtes du ramadan, il diffuse des images de femmes se faisant harceler sexuellement dans le centre du Caire. Avec la notoriété, il entre aussi dans le collimateur de la police. « Des mandats d’arrêt ont été lancés contre moi. On m’accuse d’avoir insulté le président, d’inciter à l’insurrection, de bloquer la circulation... Après le sit-in des juges, j’ai dû éviter de rentrer chez moi pendant une semaine. Le problème des forces de l’ordre, c’est qu’elles veulent m’attraper “la main dans le sac”, au cours d’une manifestation. Et ça, elles n’ont jamais réussi à le faire », souligne Waël, un sourire en coin. D’autres bloggeurs, moins chanceux, ont toutefois fini derrière les barreaux. Aujourd’hui, malgré sa belle victoire dans l’affaire Kebir, Waël ne cache pas son amertume. « En 2004, j’avais de grands espoirs, je pensais que nous pouvions vraiment changer cette société. Aujourd’hui, les résultats sont maigres », reconnaît-il. Ces dernières semaines de nombreux journalistes ont notamment été arrêtés par les forces de l’ordre pour avoir évoqué la santé du président Moubarak. Si seulement 6 millions d’Égyptiens ont accès à Internet, Waël veut croire que son blog a un impact. « Je reçois en moyenne un million de visiteurs par mois », explique le jeune homme qui a choisi de rédiger ses billets en arabe dialectal pour toucher les jeunes. « Je veux de l’interactivité, je veux leur donner l’information et je veux qu’ils réagissent », explique-t-il. « Je sais que mon audience est limitée, que je manque de ressources, mais je ne vais pas baisser les bras car je pense que les Égyptiens ne méritent pas moins que les Européens en termes de droits. » Le combat de Waël est en outre loin d’être achevé. Hier, l’AFP indiquait, citant une source sécuritaire anonyme, qu’un jeune Égyptien serait mort, mardi, des suites de blessures infligées par des policiers à l’issue de trois jours de tortures dans un commissariat d’un quartier du Caire. Et ce alors même que la justice avait ordonné la remise en liberté, faute de preuves, de ce jeune homme de 22 ans.
Deux policiers égyptiens ont été condamnés à trois ans de prison pour avoir sodomisé avec un bâton Emad al-Kabir, un conducteur de bus. C’est en arrivant lundi à Beyrouth, où il participait à une conférence sur les médias dans les contextes conflictuels, que Waël Abbas a appris la bonne nouvelle. « J’étais tellement heureux ! » affirme le jeune Égyptien, qui,...