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Actualités - OPINION

Suffrage universel « consensuel »

«Les propos de Hassan Nasrallah suscitent un tollé dans les rangs de la majorité », titre L’Orient-Le Jour du 8 courant. Quand donc cessera-t-on d’utiliser les tribunes à des fins démagogiques ? Si la question du suffrage universel a été soulevée en cette phase délicate que traverse le pays, il m’apparaît utile de relever le défi et de replacer le débat à un niveau autrement plus réfléchi. Nous publions souvent des critiques littérairement valables, mais n’arrivons jamais à en sortir une proposition concrète. Il y a donc urgence pour une trêve de protestations stériles. Le ras-le-bol atteint un niveau tel, que nous aurions le droit d’exiger une vision plus objective, plus pragmatique des choses, quitte à prendre le risque d’une option qui pourrait sembler ne pas avantager suffisamment l’un des deux camps actuels. Ce qui nous incite à inviter « l’imagination au pouvoir ». Que l’on me permette, par conséquent, de soumettre ci-après et sans autre forme de procès, le schéma particulier qui va suivre. Si, toutefois, nos édiles pouvaient prêter une attention sérieuse aux propos du citoyen anonyme. Ainsi, après le ballon d’essai du général, c’est aujourd’hui le Hezbollah qui prône le suffrage universel, sans doute pour les raisons que nous supposons. Eh bien d’accord, messieurs, pour le suffrage universel ! À condition toutefois que nous nous soumettions tous à une logique rigoureuse selon les critères que je vais énumérer soigneusement : 1. Élection présidentielle au suffrage universel, d’après le système dit « à la proportionnelle » avec un scrutin à un seul tour lorsqu’il s’agit de deux candidats seulement et à deux tours s’il s’en présentait davantage, comme il est souvent d’usage. De sorte que les électeurs n’ont à choisir, au deuxième tour, qu’entre les deux candidats finalistes. 2. Octroi du droit de vote aux Libanais de la diaspora. 3. Abaissement de l’âge légal à 18 ans. 4. Mise « hors la loi préalable de toutes formes de milices, conformément aux résolutions de l’ONU. 5. Découpage du corps électoral en autant de groupes qu’il y a de communautés religieuses au Liban. Soit sept groupes ainsi catalogués : maronite, sunnite, grec-orthodoxe et grec-catholique, chiite, minoritaire, druze, arménien. 6. Vote électronique sous surveillance internationale. D’où installation dans les bureaux de vote de sept isoloirs correspondant aux sept groupes susmentionnés. L’appareillage à presse-boutons avec photo du candidat à l’appui permettant à l’électeur de se diriger vers l’isoloir étiqueté de sa communauté après vérification d’identité. Le résultat, automatiquement enregistré, s’aditionne illico avec ceux de tous les isoloirs du même genre à travers le territoire. À recueillir les résultats « en pourcentage » par rapport aux suffrages exprimés dans l’ensemble des bureaux de vote, nous aurions le tableau comparatif suivant : Sera évidemment élu celui qui aura bénéficié du plus grand nombre général de points. Analysons à présent les risques et avantages d’un pareil projet. Le seul risque ici serait de voir un vote en masse de la part d’une communauté donnée, façon robot. Ce risque est à prendre, malgré ses apparents aléas. Car si l’une des communautés se risquait à cette pratique-là, il ne faut pas oublier que la loi de la proprotionnelle reste maîtresse du jeu, et que la plus petite des communautés peut faire pencher la balance en faveur de l’un ou l’autre des deux candidats si, à son tour, elle votait en masse. Quant aux avantages, ils sont multiples : a) Nous plaçons le Liban sur une trajectoire moderne, digne des grandes démocraties et établissons un compromis équitable entre la démocratie du nombre et le respect scrupuleux du système confessionnel en vigueur chez nous. b) Nous coupons court au déséquilibre démographique puisque ne joue que la proportion des suffrages et non le nombre d’électeurs. D’où il ressort que toutes les communautés ont, entre elles, un poids électoral équivalent. Ce constat nous mène ainsi vers une forme de « juste équilibre social », depuis longtemps revendiqué par tous. Et si la mise en pratique semble ancrer davantage dans nos mœurs le système confessionnel en son aspect officiel, en réalité nous serions en train de pousser les communautés à se courtiser entre elles afin de gagner en pourcentage le plus grand nombre de points. Nous posons de cette façon-là un premier jalon vers la disparition du confessionnalisme, ne serait-ce que dans l’action politique quotidienne. c) Nous pourrions bloquer toutes les « magouilles en cercle fermé » à l’intérieur même du Parlement. d) Nous forçons enfin les candidats à faire face au peuple et à se démarquer des groupes de pression locaux, régionaux et étrangers. Cela dit, j’ose espérer que ce projet de loi puisse servir de plate-forme d’entente entre les différentes factions libanaises, tout en sollicitant nos députés, hommes de loi et juristes d’user de leurs compétences pour l’affiner techniquement et l’insérer, comme il se doit, dans notre Constitution. Roy INGEA
«Les propos de Hassan Nasrallah suscitent un tollé dans les rangs de la majorité », titre L’Orient-Le Jour du 8 courant.
Quand donc cessera-t-on d’utiliser les tribunes à des fins démagogiques ? Si la question du suffrage universel a été soulevée en cette phase délicate que traverse le pays, il m’apparaît utile de relever le défi et de replacer le débat à un niveau...