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Actualités - REPORTAGE

Le défi de Save the children-Sweeden, assurer les droits et scolariser un millier d’enfants irakiens réfugiés au Liban Camp d’intégration pour 30 jeunes libanais, irakiens et palestiniens, au Hermel

Des chants et des rires d’enfants brisent le silence du jurd du Hermel. Dans les confins de la montagne, à l’ombre de genévriers, un camp de vacances a réuni, l’espace de 4 jours, une trentaine d’enfants irakiens, palestiniens et libanais du Hermel, en pleine nature. Financée par l’organisation Save the children-Sweeden et organisée avec le support de l’Association culturelle du Hermel qui n’en est pas à sa première initiative, cette colonie a pour objectif l’intégration des enfants et leur ouverture les uns vers les autres, à travers des loisirs et des activités individuelles ou de groupes. Une initiative qui brise des tabous tout en étant un prélude à la scolarisation par l’organisation suédoise d’un millier d’enfants irakiens réfugiés au Liban. Réunis en groupes mixtes de 6 personnes regroupant les trois nationalités, des enfants de 9 à 13 ans mettent une dernière touche à la scène qu’ils joueront dans quelques minutes devant les organisateurs de la colonie. L’ambiance est détendue, les jeunes semblent se connaître depuis toujours. Ce soir, chacun d’entre eux rentrera auprès de sa famille, après avoir noué de nouvelles amitiés, malgré les tabous liés à l’acceptation de l’autre. « Je ne pensais pas que je pourrais me lier d’amitié avec une Palestinienne. Je la reverrai certainement après le camp », lance une adolescente libanaise du Hermel. « Je n’avais jamais rencontré d’enfants irakiens. Ce camp a été pour moi l’occasion de découvrir mon pays, à travers mes nouveaux amis », précise à son tour Youmna, une adolescente libanaise dont le père est d’origine irakienne. L’espace de 4 jours, à travers des ateliers de danse, de travaux manuels, de théâtre et de chant, les trente jeunes libanais, palestiniens et irakiens ont réfléchi, seuls ou en groupes, sur les thèmes des droits de l’enfant, découvert les cultures de leurs trois peuples et discuté de la guerre. Ils ont aussi parlé de leurs rêves, de leur pays, de leur famille, de leur maison et partagé de longues marches dans la montagne. Des conditions de vie difficiles Si le camp a permis aux jeunes libanais du Hermel de s’ouvrir à d’autres enfants venus d’ailleurs, il a aussi été l’occasion pour les adolescents irakiens et palestiniens d’extérioriser leurs problèmes et leurs peurs, de rencontrer des Libanais de leur âge et de vivre loin des tensions familiales, dans un cadre agréable, l’espace de quelques jours. « J’ai été mis en prison, mais juste pour 5 minutes, parce que je n’avais pas de papiers », raconte Amer, un Irakien de 13 ans, qui précise que le problème a été rapidement réglé grâce à l’intervention du HCR (Haut-Comissariat des Nations unies pour les réfugiés). Amer ira-t-il à l’école à la rentrée d’octobre ? Il le voudrait bien, mais il « ne sait toujours pas », car cet été, il a dû « travailler pour aider son père », répond-il, le regard triste. Parallèlement, les jeunes palestiniens ont réussi à mettre en valeur la culture de leur peuple, trop souvent assimilée au terrorisme : « J’ai passé 4 jours très agréables, pleins d’activités intéressantes. J’aimerais tant revenir », observe une jeune blondinette palestinienne. Les répétitions sont terminées. La représentation peut avoir lieu, ponctuée de sketches, de mimes, de danses, de rires et de défilés de mode, à partir de matériaux naturels... avec, en point d’orgue, les chants de Mounir sur la Palestine et la voix envoûtante de Mohammad, nostalgique de son Irak natal. Le camp tire à sa fin. De véritables amitiés sont nées. Les enfants s’échangent leurs coordonnées et se promettent de se revoir, tout en espérant que d’autres initiatives similaires verront le jour. Certes, l’objectif principal de ce camp reste l’intégration, mais il a également permis à de jeunes irakiens, palestiniens et libanais, dont une importante partie est issue de milieux défavorisés, de vivre 4 jours de détente et de loisirs, dans un environnement sain et agréable. Une initiative qui n’est que le début d’un processus de soutien de Save the children-Sweeden aux enfants d’Irak réfugiés au Liban, et plus précisément de leur scolarisation et de la défense de leurs droits. « Vu l’impossibilité d’opérer en Irak même, nous devons assumer la responsabilité de faire respecter les droits des enfants irakiens dans les pays d’accueil, au Liban, en Syrie et en Jordanie, notamment leur droit à l’éducation et leur accès à l’école », observe à ce propos Sanna Johnson, représentante régionale de Save the children-Sweeden. Se cacher de peur d’être expulsé Elle précise aussi qu’un certain nombre d’enfants ont quitté l’Irak depuis plusieurs années, certains depuis 5 ans même, alors que d’autres ne sont arrivés au Liban que depuis quelques mois. Quant aux conditions dans lesquelles ils vivent, elles sont souvent « difficiles, et tendent à empirer avec le temps, car nombreuses sont les familles qui n’ont d’autres rentrées que leurs maigres réserves financières ». Les enfants irakiens sont donc souvent confinés entre quatre murs, dans des appartements exigus, sans loisirs, sans école pour nombre d’entre eux. Scolariser un millier d’enfants irakiens réfugiés au Liban, au sein d’écoles publiques et semi-privées et leur assurer une remise à niveau et un suivi extrascolaire, tel est le défi de Save the children-Sweeden, qui collabore avec le HCR et tente d’obtenir le soutien de la Banque mondiale pour réaliser ce projet. « D’autant que certains enfants ont quitté le système éducatif depuis 4 ans déjà », constate Sanna Johnson. Sans oublier qu’un certain nombre travaille pour assister ses parents. Le défi est de taille car, depuis le début de l’été, seulement 200 enfants ont déjà été identifiés par l’organisation, qui a concentré son action dans les quartiers de Bourj el-Barajneh et Sadd el-Baouchrieh. Certes, au sein de certains quartiers, des centres d’accueil ont vu le jour, apportant un soutien aux familles dans le besoin et répertoriant les enfants non scolarisés. « Mais il reste compliqué de recenser les familles irakiennes réfugiées au Liban », précise Mme Johnson, « car nombre d’entre elles se cachent et refusent de coopérer, de crainte d’être rapatriées. » Seules quelques estimations approximatives établies par l’organisation norvégienne Fafo permettent à l’heure actuelle de donner une idée du nombre d’enfants irakiens réfugiés au Liban. Ils seraient 15 000 environ, compte tenu que le nombre total de réfugiés irakiens au Liban devrait se situer entre 40 000 et 50 000 personnes. Chiffre dérisoire par rapport à la Syrie, où le nombre de réfugiés irakiens a atteint 2 millions de personnes et qu’en Jordanie, les estimations parlent d’une fourchette variant entre 250 000 et 750 000 personnes. Des chiffres sur lesquels l’organisation se base provisoirement, dans l’attente imminente des résultats d’une étude statistique plus précise menée par le Conseil danois pour les réfugiés. Compte tenu également qu’une grande partie des réfugiés vivent dans la clandestinité et refusent de s’inscrire sur les listes du HCR, de peur d’être expulsés du pays. Anne-Marie EL-HAGE
Des chants et des rires d’enfants brisent le silence du jurd du Hermel. Dans les confins de la montagne, à l’ombre de genévriers, un camp de vacances a réuni, l’espace de 4 jours, une trentaine d’enfants irakiens, palestiniens et libanais du Hermel, en pleine nature. Financée par l’organisation Save the children-Sweeden et organisée avec le support de l’Association culturelle du...