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Ils surfent, chattent, jouent... et s’isolent totalement de leur entourage La lente descente des accros du Web

Joseph fait partie de ces cyberdépendants, totalement accro d’un jeu en ligne, « World of Warcraft », au grand désespoir de sa mère qui ne sait plus comment le prendre, ni comment le convaincre de lâcher ce monde virtuel pour découvrir le monde extérieur. Le jeune homme vient d’avoir 18 ans et a obtenu son bac de justesse. C’est in extremis qu’il a été admis à l’université. Rien ne l’intéresse plus, pas même la découverte du nouveau pays qu’il habite avec sa mère, depuis la guerre de juillet 2006. Prenant sa solitude pour prétexte, l’adolescent s’isole encore plus, totalement pris par ce jeu de guerre et d’aventure sur Internet où il doit constamment franchir de nouvelles étapes et qui ne finit jamais. « Je n’en peux plus, lance sa mère, exaspérée. Il ne fait rien d’autre que ce fichu jeu, ne participe pas aux programmes et activités que ses amis lui proposent, refuse de faire du tourisme, de penser à son avenir ou de s’intégrer à son nouvel environnement. Résultat, ses amis le lâchent progressivement. Son année scolaire, il l’a carrément bâclée. Sans compter qu’il ne prend aucune responsabilité et ne donne même pas le moindre coup de main à la maison, ou alors, il se contente de faire le strict minimum, avec une mauvaise volonté affichée. » Un enfer pour les parents Et si par hasard cette mère, taraudée par l’anxiété, tente de ramener son fils à la raison, de l’encourager à sortir ou à s’investir dans des occupations plus constructives, elle se heurte à la grande irritabilité de ce dernier. « Non seulement il s’énerve et s’emporte, mais il s’enferme dans un mutisme complet. C’est l’enfer pour moi. Je me débats toute seule. Je n’ai plus aucune autorité sur lui », constate-t-elle, impuissante. Le plus dur pour cette mère est de constater que son fils n’est pas encore mûr pour vivre seul à l’étranger. Elle devra encore sacrifier son travail et sa vie de couple au moins une année, avant de retourner au Liban. « Si je le laissais seul, il risquerait de ne rien faire d’autre que ce jeu », dit-elle. Difficile pour les adolescents de l’âge de Joseph de mettre un nom sur leur addiction ou de réaliser que celle-ci peut les mener à la dérive. « Vous ne pouvez pas imaginer combien ce jeu est génial », observe Karl, ajoutant qu’il a tissé tout un réseau international d’amitié en jouant lui aussi au jeu en ligne qu’il appelle familièrement WOW (World of Warcraft). « Virtuel ? Cela n’a rien de virtuel », observe-t-il. « Je connais la vie de centaines de personnes aux États-Unis, en Europe, en Australie. Mais il est vrai, finit-il par avouer, que beaucoup d’entre eux passent leurs nuits à jouer, qu’ils négligent leurs épouses, leurs enfants et leurs obligations professionnelles. Un d’entre eux m’a même avoué que sa femme n’arrêtait pas de s’énerver à cause de son attachement au jeu. Certains vont même jusqu’à ne plus dormir. Ils se lèvent de l’ordinateur pour se rendre directement à leur travail. » Ils jouent... jusqu’à l’épuisement L’adolescent, à peine âgé de 15 ans, passait lui aussi ses jours et ses nuits à jouer à ce jeu de rôle et d’aventure, durant la guerre de juillet 2006. Ses camarades ne l’intéressaient plus. Le sport non plus. Il s’était promis, à la rentrée scolaire, de se limiter aux week-ends, mais l’appel du jeu était si fort qu’il a carrément raté son premier trimestre scolaire. Il n’a eu d’autre choix que d’accepter la décision parentale de bloquer son accès à ce jeu. Depuis, l’adolescent a totalement changé. S’il lui arrive encore de jouer à l’ordinateur, de chatter avec ses amis ou de surfer sur Facebook, il en a terminé avec les nuits blanches à en oublier d’aller se coucher. Finies aussi les remarques désobligeantes des copains qu’il ne voyait plus, leur préférant son jeu, qui n’avait pas de fin, et ses amitiés virtuelles. Certes, les adolescents sont d’une grande vulnérabilité face à cette nouvelle forme de dépendance, d’autant qu’elle n’est ni taboue ni interdite. Mais plus grande encore est la vulnérabilité des adultes. « J’étais devenu comme drogué et passais le plus clair de mon temps sur Internet », avoue Kamal, 35 ans, qui exerce un métier lié à l’ordinateur. « J’étais devenu accro à tout à la fois, aux jeux, aux sites de rencontres, aux films et à la musique que je téléchargeais. » Une dépendance qu’il traîne depuis l’adolescence, lorsqu’étudiant à Paris, il était déjà accro du Minitel. « Non seulement je m’enfermais dans ma bulle et n’avais plus de vie sociale, car je laissais systématiquement tomber les copains pour terminer un jeu, pour chatter ou pour surfer sur Internet, mais cette dépendance commençait à se répercuter sur ma vie professionnelle, raconte-t-il encore. Je passais des nuits entières à mon lieu de travail. Je ne m’arrêtais que vers 6 ou 7 heures du matin, lorsque la femme de ménage arrivait. Résultat, je n’étais plus productif. Certes, je réalisais que je vivais dans le virtuel, mais je n’arrivais pas à m’en déconnecter, car le virtuel me semblait nettement plus attrayant que la réalité. J’étais devenu tellement accro que j’en étais épuisé, je dormais peu, j’avais des douleurs terribles à la nuque, au dos et même aux doigts. J’en suis arrivé à ressentir un immense soulagement lorsque les pannes de courant me forçaient à me lever pour aller me coucher. » Seules les douleurs physiques ont eu raison de la dépendance de Kamal qui avoue céder encore à l’appel du virtuel, mais de façon moins intensive. « Si mon métier n’était pas lié à l’ordinateur, et que je n’en avais pas eu carrément ras le bol, je n’aurais jamais pu m’arrêter », finit-il par avouer.
Joseph fait partie de ces cyberdépendants, totalement accro d’un jeu en ligne, « World of Warcraft », au grand désespoir de sa mère qui ne sait plus comment le prendre, ni comment le convaincre de lâcher ce monde virtuel pour découvrir le monde extérieur. Le jeune homme vient d’avoir 18 ans et a obtenu son bac de justesse. C’est in extremis qu’il a été admis à...