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Actualités - OPINION

Les leçons du Metn

Il est incontestable que les élections partielles du Metn-Nord, aussi atypiques qu’elles aient été, ont eu de grandes significations en matière de politique intérieure et de grandes répercussions sur l’avenir de notre pays. Il faut en tirer les leçons adéquates surtout que les Libanais, notamment les chrétiens, traversent plus que jamais, et parfois sans s’en rendre compte, une des périodes les plus critiques et existentielles de leur histoire. Il est vrai que l’aspect positif de ces élections réside dans la manifestation très saine de l’attachement des Libanais au régime démocratique. Mais l’occasion est d’une importance telle qu’il s’avère vital de procéder à une analyse objective et de relever les observations suivantes : 1. La campagne électorale menée par le 14 Mars contre le général Michel Aoun aurait dû être beaucoup plus décisive dans ses résultats. En effet, le président Amine Gemayel est le fils de Pierre Gemayel avec tout le symbolisme que porte le nom, chef suprême du parti Kataëb, fer de lance de la poigne chrétienne, père du jeune ministre Pierre, martyr de la nation, pleuré tant par le public du 14 Mars que par celui de leurs adversaires, frère de feu le président Bachir Gemayel… Par ailleurs, les thèmes de la campagne taxant à tort mais avec force la politique de Michel Aoun de prosyrienne et pro-iranienne ont eu un impact aussi négatif qu’efficace dans les milieux chrétiens du Metn. En effet, une telle accusation a toujours été considérée et demeure encore comme l’une des tares les plus fatales pour un homme politique dans la société chrétienne et surtout dans le cœur du Mont-Liban. Cette accusation à laquelle le camp chrétien est traditionnellement allergique aurait dû porter ses fruits plus largement. Malgré tous ces facteurs, qui auraient dû provoquer un raz-de-marée chrétien en faveur du camp Gemayel, noyant le vote arménien et la force électorale de Michel Murr, rien n’a été tranché et les forces en présence, en raison d’une moindre participation chrétienne qu’en 2005, hormis le vote arménien, se sont trouvées à égalité. Ce qui a permis au général Aoun de l’emporter malgré tous les éléments qui ont joué en sa défaveur mais dont l’efficacité est restée limitée. 2. Dans cette optique, quelques interrogations se posent au sujet des alliés du chef du CPL et sur leur comportement durant ces partielles. Comportement d’autant plus curieux qu’il a suscité certaines ambiguïtés demeurées jusqu’à présent inexplicables. Ainsi, pourquoi le Hezbollah, si fin stratège et redoutable tacticien, a tenu à lancer une campagne prorésistance au slogan percutant, doublé d’une note de défi en parsemant le Metn, et seulement le Metn, de panneaux publicitaires et ce à quelques jours des élections ? Une démarche qui a eu un impact négatif sur le vote d’un nombre innombrable de chrétiens centristes très sensibles à ce genre de défi. Ce qui semblait en apparence un appui à la campagne Aoun a-t-il constitué en réalité un atout considérable à la campagne Gemayel ? Faut-il le concevoir comme tel, surtout que la réaction s’est faite sentir instantanément dans les milieux populaires chrétiens ? D’autre part, le généreux appui des deux Kanso, qui n’était certes pas dénué de « bonne volonté », a semblé bien bizarre. Leur intervention a été d’une gravité majeure puisqu’elle a semblé confirmer les accusations lancées par les adversaires de Michel Aoun. Depuis quand la vision politique du général concorde-t-elle avec celle du Parti social national syrien ? Cela relevait du surréalisme qui laissait pointer dans cet horizon confus un semblant de mauvaise foi… 3. Pourquoi le Hezbollah s’est-il abstenu d’appuyer le candidat de Najah Wakim, lequel lui a toujours été d’une fidélité à toute épreuve, face au candidat haririen ? Question d’autant plus importante qu’elle confirme une entente entre les deux principaux « représentants politiques » des communautés sunnites et chiites, scellée quelque part entre Ryad et Téhéran… Loin de toute intention confessionnelle, nous considérons cette attitude transposant le conflit sur la scène chrétienne comme étant elle-même communautariste et confessionnelle. Tout en affirmant bien fort notre rejet de tout conflit intermusulman, nous refusons catégoriquement que l’antagonisme sunnito-chiite se règle par chrétiens interposés. Cette manipulation ne doit en aucun cas être passée sous silence. Pour ces raisons, je pense que les chrétiens n’ont pas compris le fond de cette manipulation infernale et destructrice. La bonne volonté des Metniotes et leur sens poussé du discernement ont cependant permis d’éviter en cette journée cruciale un affrontement populaire. Les victoires à la Pyrrhus, d’où les belligérants sortent extenués, seraient dans cette conjoncture profitables aux autres. Qui sont les autres ? Sommes-nous devant une pacification de la plate-forme musulmane au Liban dans sa dualité communautaire et un embrasement de la scène chrétienne avec sa dualité politique et un affaiblissement de son leadership ? Ceci n’est point une accusation, mais une observation objective et sans états d’âme de cette bataille électorale et de la période qui a suivi. Les gagnants certes n’étaient pas les belligérants au Metn, ni la communauté chrétienne. Nous le disons sans parti pris, mais pour sortir le Liban de cette logique confessionnelle destructrice. Notre pays n’est pas né de la violence et ne sera jamais voué à la violence. Nadine V. MOUSSA Avocate
Il est incontestable que les élections partielles du Metn-Nord, aussi atypiques qu’elles aient été, ont eu de grandes significations en matière de politique intérieure et de grandes répercussions sur l’avenir de notre pays. Il faut en tirer les leçons adéquates surtout que les Libanais, notamment les chrétiens, traversent plus que jamais, et parfois sans s’en rendre...