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Actualités - CHRONOLOGIE

EXPOSITION - « Less Roses » à la galerie Sfeir-Semler, jusqu’au 1er novembre Peinture, sculpture et photographie : des résonances et des connexions... Zéna ZALZAL

Déjà le titre est étrange : « Less Roses » (Moins de roses). Il en émane quelque chose d’insolite, d’énigmatique et de baroque tout à la fois. À l’image de certaines pièces présentées dans le cadre de cette nouvelle exposition à la galerie Sfeir-Semler (immeuble Tannous, 4e étage, secteur Jisr-La Quarantaine), qui, jusqu’au 1er novembre, réunit une palette d’œuvres spécialement réalisées à cette occasion par six plasticiens internationaux. Pour le photographe allemand Elger Esser, artiste participant et commissaire de l’exposition : «“Less Roses” est un titre que j’ai emprunté à un poème de Mahmoud Darwish. Il est aussi étrange que le fait d’organiser une exposition au Liban, un pays constamment secoué par des perturbations politiques. Il exprime certes une idée de déperdition, mais “Less” peut également signifier une concentration sur la qualité, souligne-t-il. Tandis que les roses sont le symbole par excellence de la beauté naturelle », poursuit-il. Une ambivalence délibérée que l’on retrouve dans les œuvres présentées par les artistes allemands Felix Schramm, Moritz Altmann, les Américains Peter Hopkins et Glen Rubsamen, ainsi que la Franco-Marocaine Yto Barrada, sans oublier Elger Esser lui-même. Ambivalence dans « la transposition d’un médium dans un autre médium » ou ambiguïté dans le ressenti du spectateur. Lequel peut se sentir déconcerté face à la charge expressive et émotionnelle de certaines pièces réellement étonnantes. Comme cette installation en placoplâtre de Felix Schramm qui, dès l’entrée, surprend le visiteur. L’artiste allemand (dont certaines œuvres trônent en bonne place au MoMA de San Francisco) a, en effet, construit une immense et troublante « peinture dans l’espace » qui, de prime abord, ressemble à un mur démoli, mais qui, au fur et à mesure qu’on l’observe, dégage ses différentes facettes. Peinture en trois dimensions d’un intense expressionnisme abstrait. Incarnation de l’idée de blessure, de déchirure ou encore de tension. Mais également « re-création » de l’espace dans lequel s’inscrit cette œuvre par un jeu de faux murs, de perspectives et de structures en trompe-l’œil. Photos « colorisées » Faisant écho au travail de Schramm, deux représentations photographiques de naufrages, signées Elger Esser, jouent les résonances avec la peinture et exhalent un romantisme nostalgique, très XIXe siècle. La démarche du photographe allemand, né en 1967, est cependant résolument moderne, puisqu’il a composé ces tableaux à partir de détails d’anciennes cartes postales, agrandis et « colorisés » par endroits de teintes passées. Dans un autre registre, cet artiste renommé, dont certaines pièces ont été acquises par les musées Guggenheim et Metropolitan de New York, a élaboré, à la suite d’un précédent passage au Liban, en 2005, une installation composé de dix vitrines, consignant en peintures et photographies ses « fragments de souvenirs et d’impressions » captés du pays du Cèdre. Des images quasi désuètes de gares désaffectées, de paysages perdus qui n’ont rien de spécifiquement libanais, de spécimens d’orchidées en perdition, assemblées et mises sous vitres... Une installation qui évoque dans une certaine mesure les vitrines des musées, écrins conservant des objets fragiles, universels et aujourd’hui disparus... Toujours dans ce même esprit de connexion entre peinture et photographie, Glen Rubsamen, artiste américain né en 1957, et actuellement installé en Allemagne, présente un travail pictural mêlant hyperréalisme, romantisme et impression de négatif photographique, au moyen de l’utilisation du noir sur fond de couleurs dans ses peintures de paysages quotidiens à l’acrylique. Peinture sans peinture Son compatriote, Peter Hopkins, né en 1955 au Massachusetts, vit et travaille à New York, a choisi pour sa part d’élaborer de magnifiques peintures monochromes, aux reflets et couleurs changeants suivant l’angle de captation de la lumière, à partir de toutes sortes de produits et d’éléments autres que les tubes et les pinceaux. Dans le même esprit que les premiers colons américains qui fabriquaient des couvre-lits à partir de patchworks de tissus, Hopkins peint avec des tissus, des huiles, des agents nettoyants, des cosmétiques... Bref, toutes sortes de produits récupérés. Des objets périmés, dépréciés, altérés qui, ainsi recyclés, deviennent de l’art. Esthétique. Une préoccupation esthétique qui diffère totalement de celle de Moritz Altmann. Fraîchement diplômé de l’école des beaux-arts de Hambourg, ce jeune sculpteur qui expose ici plusieurs sculptures en porcelaine aux formes baroques matinées de naturalisme et de surréalisme, traite, semble-t-il, des connexions entre l’art et le dégoût, voire entre l’art et le mauvais goût. Yto Barrada Enfin, dernière invitée de marque de la sélection d’Elger Esser, Yto Barrada, photographe vidéaste franco-marocaine qui aborde dans son travail des sujets comme l’immigration, les frontières, l’identité. En l’occurrence, sa double identité, nord-africaine et européenne. Dans l’installation qu’elle présente à la galerie Sfeir-Semler qui est la même que celle qui se trouve actuellement et jusqu’au 21 novembre à la Biennale de Venise de 2007 (elle a été réalisée en cinq éditions), elle revisite « à la marocaine » et sur tout un pan de mur le fameux déjeuner sur l’herbe de Manet. Orientalisé donc et modernisé tout à la fois, donc utilisant des techniques et démarches occidentales. D’où l’éternel dilemme. L’ambivalence...
Déjà le titre est étrange : « Less Roses » (Moins de roses). Il en émane quelque chose d’insolite, d’énigmatique et de baroque tout à la fois. À l’image de certaines pièces présentées dans le cadre de cette nouvelle exposition à la galerie Sfeir-Semler (immeuble Tannous, 4e étage, secteur Jisr-La Quarantaine), qui, jusqu’au 1er novembre, réunit une palette...