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Actualités - OPINION

ÉCLAIRAGE - Le Bulgare était accusé d’avoir participé à l’attentat contre Jean-Paul II en 1981 Antonov, trouvé mort à Sofia, symbole des mystères de la guerre froide

Le sort de Sergueï Antonov, accusé d’avoir participé à l’attentat contre le pape Jean-Paul II en 1981 et retrouvé mort mercredi à Sofia, symbolise aux yeux des Bulgares les mystères de la guerre froide. Antonov avait été mêlé à cet attentat par son auteur turc, Mehmet Ali Agça, qui affirmait avoir reçu de lui le pistolet avec lequel il avait grièvement blessé Jean-Paul II sur la place Saint-Pierre à Rome. Arrêté en 1982, Sergueï Antonov avait été acquitté en 1986 en Italie pour « insuffisance de preuves ». Souffrant de troubles psychiques, le Bulgare, rentré ensuite dans son pays, n’a jamais parlé aux médias et vivait depuis dans l’isolement. Son corps a été découvert dans son appartement quelques jours après son décès à l’âge de 58 ans, « de mort naturelle », selon les médecins. Selon ses anciens amis, il était « incapable de mener une conversation » et était un maniaque de la propreté. Aux dires de ses voisins, il lui arrivait d’écouter, debout dans son appartement, l’hymne national diffusé à minuit par la radio bulgare à la fin de son programme quotidien. La presse faisait hier un parallèle entre « l’injustice » infligée à cet homme, dont aucune culpabilité n’a été prouvée même à l’ouverture des archives des services secrets communistes, et la détention pendant huit ans en Libye de cinq infirmières bulgares et d’un médecin palestinien naturalisé bulgare, accusés d’avoir provoqué une épidémie de sida. « Une semaine après la libération des praticiens bulgares, un autre martyr symbole, Sergueï Antonov, est mort seul et dans l’oubli. Lui était victime de la guerre froide entre l’Occident capitaliste et l’Est communiste », a souligné l’éditorialiste de Troud, le plus grand quotidien bulgare. « Tombé par hasard entre les pierres du moulin de la guerre froide, cet homme modeste et de bonne foi a totalement été écrasé », selon Monitor. Une des infirmières libérées, Valia Tcherveniachka, a déclaré la semaine dernière avoir « toujours craint de subir le sort d’Antonov », qui a sombré dans l’oubli et les troubles psychiques. Les praticiens bulgares, condamnés à mort en Libye, ont toujours plaidé leur innocence, en se référant à des expertises internationales. Le pape Jean-Paul II avait, lui, pris la défense de la Bulgarie lors d’une visite en 2002. « Je n’ai jamais cru à la prétendue filière bulgare, et cela en raison de mon affection pour le peuple bulgare et de mon respect pour lui », avait-il alors déclaré. Selon Agça, Sergueï Antonov, responsable du bureau de la compagnie aérienne Balkan Air à Rome, avait agi pour le compte des services secrets bulgares, Sofia étant à l’époque l’allié le plus proche de l’URSS. On soupçonnait Moscou d’avoir tenté d’éliminer Jean-Paul II, le pape polonais, en raison de son soutien au mouvement dissident Solidarnosc en Pologne. « J’avais estimé le régime (du dictateur bulgare) Todor Jivkov, laquais de Moscou, capable de commettre un tel crime, mais il n’y a aucune preuve à l’appui d’une telle hypothèse », avait déclaré Jelio Jelev, père de la dissidence bulgare et premier président démocratique du pays, en poste de 1990 à 1997. En mars 2006, une commission parlementaire italienne a publié un rapport sur la base des « archives » d’un ex-agent du KGB passé à l’Ouest au début des années 90, Vassili Mitrokhine. Selon cette commission, l’attentat avait été « planifié » par « les autorités militaires soviétiques », et les services secrets bulgares auraient servi de « couverture ». Le rapport faisait notamment état d’une photo montrant prétendument Sergueï Antonov sur la place Saint-Pierre à Rome au moment de l’attentat, alors qu’une expertise de la photo, présentée par la défense bulgare lors du procès, prouvait que l’homme sur le cliché était un touriste américain. Vessela SERGUEVA (AFP)
Le sort de Sergueï Antonov, accusé d’avoir participé à l’attentat contre le pape Jean-Paul II en 1981 et retrouvé mort mercredi à Sofia, symbolise aux yeux des Bulgares les mystères de la guerre froide.
Antonov avait été mêlé à cet attentat par son auteur turc, Mehmet Ali Agça, qui affirmait avoir reçu de lui le pistolet avec lequel il avait grièvement blessé...