SOCIÉTÉ - Une relation plus puissante que la dépendance à une drogue Retrouver son premier amour, c’est jouer avec le feu

Le souvenir du premier amour crée plus de dépendance que n’importe quelle drogue et beaucoup d’adultes ne peuvent rien faire pour éviter de retomber amoureux des bien-aimés de leur jeunesse. Le premier amour est ineffaçable dans les mémoires, assurent des chercheurs, qui préviennent que reconquérir cet amour perdu peut engendrer des conséquences irréversibles, pouvant aller jusqu’à détruire des mariages. « Ce n’est pas comme une liaison normale », souligne Nancy Kalish, une psychologue de l’Université de Sacramento en Californie, qui a étudié pendant 14 ans ce genre de relations. « Ça passe du téléphone à l’hôtel. » Jeannie T. connaît bien cette situation. « C’était comme si un éclair m’avait frappé lorsque nous nous sommes revus », raconte-t-elle, après sa rencontre avec son ancien petit ami Ben, à une réunion d’anciens élèves d’une école à Joplin (Missouri, sud) il y quelques mois. Ils ne s’étaient pas vus depuis le départ de Ben pour le Vietnam en 1965. Mais dès qu’ils se sont retrouvés, leur amour a repris. « Il s’est agenouillé et m’a dit que me quitter avait été la chose la plus difficile qu’il avait jamais faite », indique Jeannie, 60 ans et aujourd’hui agent immobilier en Floride. Une panique s’est instaurée et « j’avais besoin de lui dire ce qu’il représentait pour moi », ajoute-t-elle. Elle ne l’a pas fait pendant la réunion. C’est pour cela qu’ils s’en sont remis à l’Internet. Mike T., le mari de Jeannie depuis 13 ans, dit que sa femme et Ben se sont d’abord envoyés des courriels puis se sont mis aux SMS. Des chercheurs affirment que leur expérience est typique des amoureux adolescents qui se retrouvent des dizaines d’années plus tard. « C’est plus puissant que la dépendance à une drogue », affirme l’universitaire Helen Fisher, auteur d’un livre intitulé Why We Love  (Pourquoi nous aimons). Donna Hanover est au fait de ce sentiment. Elle était autrefois amoureuse de Rudolph Giuliani, qui est candidat à l’élection présidentielle de 2008 aux États-Unis. Trente ans plus tard, lorsqu’ils se sont retrouvés, Donna a ressenti « une attirance immédiate pour lui ». « La même que lorsqu’on était enfants ». Elle a publié son histoire avec 49 autres, comme celles des actrices Carol Channing et Suzanne Pleshette, dans Mon amoureux est de retour. Le problème de fond se pose lorsque les deux partenaires sont déjà mariés, relève Nancy Kalish. Et souvent, ce sont les époux qui souffrent le plus. Et l’Internet ne fait qu’aggraver les choses. Selon une étude réalisée par Nancy Kalish en 1997, baptisée « Les amants perdus et retrouvés », les veuves et divorcées réussissent souvent à retrouver leur prince charmant. L’Internet facilite les retrouvailles. Il suffit de cliquer sur le nom de son ancien partenaire sur classmates.com, reunion.com, ou tout autre site de retrouvailles. « Il écrit, puis elle écrit... et là, les ennuis commencent », résume Nancy Kalish. À l’occasion d’une autre étude réalisée en 2004-2005, elle s’est rendu compte que sur 1 600 couples ayant retrouvé leur premier amour, 62 % étaient mariés. Avant l’avènement de l’Internet, ils n’étaient que 30 %. Jeannie et Mike, son mari, sont d’accord pour dire que leur mariage se portait bien il y a un an. Aujourd’hui, il bat de l’aile et ils tentent de le sauver avec une thérapie. Jeannie avoue être hésitante sur quel homme choisir. La seule façon de passer à côté de ce désastre, c’est d’éviter ce premier courriel : « C’est pareil que manger une première chips », explique Nancy Kalish. Pour les réunions d’anciens élèves d’une école, Jeannie n’a qu’un seul conseil pour les époux : « Allez-y ensemble. »