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Actualités - interview

Premier étranger à être élu au conseil d’administration des anciens de MIT Nicolas Chammas : Mon ambition est de contribuer à faire redécoller l’économie du Liban

Nicolas Chammas. Un nom qui fait désormais la différence au Massachusetts Institue of Technology (MIT), puisqu’il est le premier non-Américain à être élu au conseil d’administration des anciens de cette prestigieuse école qui a formé, depuis sa création en 1861, plus de 60 prix Nobel et contribué à des inventions aussi importantes que le radar, l’ordinateur et le séquençage du génome humain. Élu parmi huit candidats au district 11 pour un mandat de deux ans (1er juillet 2007-30 juin 2009), Nicolas Chammas rêve non moins que « d’utiliser les ressources et le réseau d’enseignement de MIT pour bâtir l’économie du savoir au Liban » dans une contribution à « faire redécoller l’économie » du pays. L’élection de Nicolas Chammas au conseil d’administration de MIT n’est pas un simple fait du hasard. En effet, depuis l’obtention de sa maîtrise en génie en 1987, il n’a pas hésité un seul instant à se mettre au service de cette grande école. Il a ainsi fondé le MIT Club of Lebanon, « l’un des plus anciens dans les pays arabes », dont il est également le président honoraire, il a fondé et préside le conseil de surveillance du MIT Entreprise Forum, et il a enfin fondé et préside la structure du conseil éducatif dans les pays arabes. Sans compter le Distinguished Service Award qui lui a été décerné par la MIT Association en 2004. « Cette année, le MIT a décidé de s’ouvrir aux 14 % de ses anciens vivant à l’étranger et qu’il avait ignorés jusque-là », explique Nicolas Chammas, précisant que « d’un point strictement économique, les anciens de MIT ont contribué à la création d’un million d’emplois dans le monde, selon une étude menée en 1997 par la Bank of Boston ». « Aujourd’hui, on estime que les anciens du MIT ont cumulativement créé 1,5 million d’emplois, remarque-t-il. Si les anciens de MIT devraient constituer une économie, elle serait la 24e à l’échelle mondiale. » Le rôle joué par la communauté libanaise du MIT au cours des vingt dernières années a contribué à « l’ouverture » de cette école sur le monde, « créant à cet effet le district 11 ». En effet, les anciens de MIT ont fondé en 1987 le MIT Club of Lebanon, qui compte actuellement près de soixante membres. « Nous œuvrons aussi à créer de nouvelles entreprises dans le cadre du MIT Entreprise Forum qui comprend 25 chapitres dans le monde, dont six à l’international, y compris le Liban, poursuit Nicolas Chammas. Le but de ce forum est d’encourager les jeunes à créer leurs propres sociétés. En fait, le MIT ne se concentre pas uniquement sur le gros business, mais également sur les petites et moyennes entreprises (PME) aux États-Unis et dans le monde. » Au Liban, le coup d’envoi de cette activité a été donné l’an dernier avec le lancement du Business Plan Competition, « qui consiste à mettre en concurrence des dizaines d’équipes qui vont présenter un plan d’affaires ». « Le meilleur projet qui sera retenu recevra un prix pouvant atteindre 100 000 dollars, note-t-il. Et pour une première édition, c’était un coup de maître avec la candidature de 1 500 personnes. Seules 30 équipes ont été retenues, dont 19 libanaises. » « Sur un troisième plan, nous avons créé une structure pour identifier les meilleurs candidats pour MIT, ajoute Nicolas Chammas. Pour être accepté en licence, l’étudiant doit passer une interview conduite par les anciens du MIT. Au Liban et dans les pays arabes, l’équipe est formée de trente-cinq personnes. Nous cherchons les candidats non seulement au sein des grands collèges, mais aussi dans les coins perdus du pays et du monde arabe, parce qu’au MIT, nous croyons à l’égalité des chances. » Les efforts déployés portent déjà leurs fruits. « Il y a près de six ans, un seul étudiant libanais a été accepté au MIT, souligne-t-il. Cette année, trois élèves poursuivront leurs études à Massachusetts. Ce qui est extraordinaire, puisque seuls 146 étudiants étrangers ont été acceptés cette année au MIT, dont dix des pays arabes. Et le choix des étudiants libanais est disproportionné au poids démographique des pays arabes, parce que nous sommes en train de choisir les candidats les plus prometteurs. En effet, il ne s’agit pas uniquement d’être accepté au MIT, mais il faudrait que l’étudiant puisse survivre dans ce milieu exigeant. » Énergie, environnement et biotechnologie Porte-parole du MIT au Liban et dans le monde arabe, Nicolas Chammas explique qu’actuellement, l’énergie et l’environnement constituent une priorité de cette école, mais aussi la biotechnologie. « Il s’agit ainsi de trouver des moyens pour mieux exploiter les gisements pétroliers qui existent déjà, ainsi que des énergies renouvelables, explique-t-il. Sur le plan de la biotechnologie, il s’agit de trouver un moyen d’améliorer la qualité de vie des seniors, d’autant plus que la moyenne d’âge est désormais de 82 ans. La biotechnologie doit venir à la rescousse de la médecine traditionnelle, sachant qu’il est de plus en plus difficile aux géants de la pharmacie de trouver des réponses aux maladies chroniques. Ainsi, MIT se consacre à l’alzheimer, au parkinson, au cancer et au diabète. L’ambition n’est pas de prolonger la vie des gens, mais de faire en sorte que les dernières dix à vingt années soient paisibles et plaisantes. Et le MIT est aujourd’hui une pépinière de la biotechnologie avec une “grappe” réunissant une centaine de sociétés installées autour du campus. » Comment son élection au sein du conseil d’administration du MIT va-t-elle aider le Liban ? « Le fait d’occuper pour la première fois ce poste, au moment où les États-Unis entretiennent des relations privilégiées avec plusieurs autres pays de l’Europe, de l’Asie ou de l’Amérique latine, montre que malgré l’épreuve douloureuse qu’il traverse, le Liban est sur “l’écran radar” des plus grandes organisations internationales, répond Nicolas Chammas. L’essentiel, c’est de pouvoir arrimer le Liban à une institution telle que le MIT, d’utiliser les ressources et le réseau d’enseignement du MIT pour bâtir l’économie du savoir au Liban, pour aider à faire re-décoller l’économie. » « Les deux dernières années ont démontré que l’économie traditionnelle ne peut plus assurer la croissance nécessaire au Liban, déplore-t-il. Il faudrait se diriger d’une manière résolue vers l’économie du savoir et se brancher à l’économie que propose le MIT : l’informatique dont le marché mondial est estimé à 200 milliards de dollars par an, le consulting en stratégie et en management, avec un marché mondial de 150 milliards de dollars, la biotechnologie, les produits bancaires sophistiqués… Ces domaines sont susceptibles d’aider le Liban à dépasser la morosité économique dans laquelle il se débat, d’autant qu’ils créent de fortes valeurs ajoutées et de nouveaux emplois. Le Liban risque de rester de nombreuses années entre l’enclume des uns et le marteau des autres, et l’économie ne peut plus attendre la stabilité politique pour se redresser. Ce projet va naturellement nécessiter de nombreuses années. Mais nous avons la chance aujourd’hui de faire parvenir la voix du Liban au MIT. Il faut savoir saisir l’occasion. Mais cela nécessite une réelle volonté politique. J’ai déjà proposé, il y a plus d’un an, à M. Fouad Siniora et au ministre assassiné Pierre Gemayel la possibilité de créer une grappe technologique au Liban avec le MIT. Je suis resté sans réponse, peut-être à cause de la guerre. Mais la proposition est toujours sur la table. » Et Nicolas Chammas de conclure : « Les Libanais ont déjà fait leurs preuves au MIT et ils y sont accueillis à bras ouverts. Il s’agit de trouver un domaine de coopération, comme celui effectué récemment entre le MIT et Abou Dhabi. Je suis disposé à soumettre à cette institution toute proposition intéressante de coopération. J’aimerais être l’ambassadeur du MIT au Liban et du Liban au MIT. Cette double casquette me permettra de faire œuvre utile pour le pays. » Propos recueillis par Nada MERHI
Nicolas Chammas. Un nom qui fait désormais la différence au Massachusetts Institue of Technology (MIT), puisqu’il est le premier non-Américain à être élu au conseil d’administration des anciens de cette prestigieuse école qui a formé, depuis sa création en 1861, plus de 60 prix Nobel et contribué à des inventions aussi importantes que le radar, l’ordinateur et le...