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Sauver les réfugiés irakiens au Liban

On nous a répété depuis notre plus tendre jeunesse que le Liban avait été créé pour tous ceux qui, en Orient, ont soif de liberté. Et comme le disait Béchir Gemayel, « pour tous, mais surtout pour les chrétiens en quête de liberté et de sécurité ». Jamais autant qu’aujourd’hui, les chrétiens d’Irak ne furent en danger de mort. Ils fuient par centaines de milliers l’insécurité, les enlèvements, les demandes de rançon et les attentats meurtriers. Seulement 4 000 d’entre eux sont actuellement au Liban et demandent l’asile. L’État libanais, qui a reçu 400 000 Palestiniens et naturalisé des centaines de milliers d’autres personnes récemment, leur a refusé toute forme de légalisation de leur séjour. On prépare leur expulsion, hommes, femmes et enfants. Et pourtant les monastères maronites sont suffisamment nombreux pour pouvoir accueillir et loger, non seulement les 400 000 réfugiés actuels, mais tous les chrétiens d’Irak qui désireraient se joindre à eux. Les structures maronites existantes pourraient même leur trouver des emplois à tous. Concierges de monastère ou d’immeuble, sacristains, ouvriers sur les chantiers ou les stations d’essence, médecins, infirmiers et enseignants au sein d’associations maronites diverses. Tout cela est possible à condition, bien entendu, que l’Église syriaque-maronite puisse redécouvrir son devoir et sa mission chrétienne. L’abandon des autres populations et Églises syriaques à leur triste sort ne pourra conduire qu’à la perte et à l’autodestruction de l’Église syriaque-maronite. En leur tournant le dos, elle ne fait que creuser sa propre tombe. Les chrétiens de Haute-Mésopotamie ont toujours vu dans le Liban une terre promise. Trente ans avant ceux du Nord irakien, c’était ceux du sud de la Turquie qui avaient demandé au Liban de les adopter. Les syriaques-orthodoxes, syriaques-catholiques et assyro-chaldéens ont supplié pour obtenir l’aide de leur « grande sœur », l’Église syriaque-maronite. La réponse de l’un des principaux partis politiques de l’époque fut tranchante : « Soyons clairs, nous préférons le musulman libanais comme nous, au chrétien turc. » Le musulman est libanais comme nous, il est vrai, mais le chrétien n’était nullement turc. Il fuyait la Turquie ; c’était un syriaque tout comme le maronite qui semblait ne plus vouloir s’en souvenir. La réponse de l’Église syriaque-maronite fut, elle, plus diplomatique : « Nous refusons de voir l’Orient se vider de ses chrétiens, ce qui arriverait s’ils venaient tous au Liban. » Menacés dans leur existence même, ces chrétiens désertèrent leurs villages de la Haute-Mésopotamie turque. Ils sont aujourd’hui plus de 300 000 syriaques entre la Suède, l’Allemagne, la Belgique et quelques autres pays européens, car l’Église syriaque-maronite a fermement refusé de voir l’Orient se vider de ses chrétiens. D’autres populations, d’autres personnes furent naturalisées à leur place. Si le Liban est malade, si les syriaques-maronites et leurs frères Roums connaissent aujourd’hui une grave crise, c’est parce qu’il y a une trentaine d’années, ils en étaient venus à oublier les plaies béantes de leurs parents de la Haute-Mésopotamie turque. Ils semblent d’ailleurs vouloir persévérer dans leur politique de l’autruche en agissant de même envers leurs parents de la Haute-Mésopotamie irakienne. Ils précipitent ainsi, sans aucune hésitation, leur propre chute. La gangrène de la dhimmitude semble se propager. Des autorités temporelles aux autorités spirituelles et du sommet de la société jusqu’à sa base. Le reniement de l’identité de cette Église et de ses ouailles est devenu on ne peut plus normalisé depuis l’acceptation forcée des accords de Taëf, en Arabie saoudite. En ce temps où nous commémorons l’anniversaire du génocide arménien, pensons sérieusement à transformer ce souvenir douloureux en sentiment de fierté. Car sans le Liban qui ouvrit grandes ses portes à ces fils de l’Orient chrétien, ces Arméniens auraient rejoint les flux de l’hémorragie chrétienne orientale. Le Liban ne doit pas et ne peut pas faillir à sa vocation sans laquelle il perdrait sa raison d’être et son âme. Ce n’est nullement le sort de 400 000 assyro-chaldéens qui est en jeu en ce moment, mais c’est le sort du Liban même, et celui de notre présence à tous dans cet Orient qui vit naître le Christ et la religion de l’amour et de la compassion. Amine Jules ISKANDAR Architecte Membre du Comité de la culture syriaque

On nous a répété depuis notre plus tendre jeunesse que le Liban avait été créé pour tous ceux qui, en Orient, ont soif de liberté. Et comme le disait Béchir Gemayel, « pour tous, mais surtout pour les chrétiens en quête de liberté et de sécurité ».
Jamais autant qu’aujourd’hui, les chrétiens d’Irak ne furent en danger de mort. Ils fuient par centaines de...