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Actualités - CHRONOLOGIE

Abed Balaa, responsable de l’antenne de relais, se souvient...

Abed Balaa était responsable de l’antenne de relais du Canal 11 dès son installation. Il était aussi le dernier à quitter les lieux avant sa destruction. Lui aussi aime appeler le mont Kneissé Tell al-Manara, probablement pour le symbolisme de cette antenne dont il était en charge et « qui émettait jusqu’à Alexandrie, à l’autre bout de la Méditerranée, bien avant la création des chaînes satellite, dit-il un brin de fierté dans la voix. Nous étions les premiers à émettre à partir d’une montagne aussi élevée ». C’est au début des années soixante que l’antenne avait été installée, l’étude ayant été effectuée par une compagnie anglaise. Les ingénieurs anglais avaient passé leur savoir-faire à l’équipe libanaise. Abed raconte également : « L’étude des Anglais présentait une faille, elle n’avait pas pris en considération le fait que la neige ne fondait pas en haute montagne avant le mois d’avril au Liban, comme c’est le cas souvent au mont Kneissé. Une ou deux années après l’installation, après un hiver trop rigoureux, l’antenne de relais qui mesurait une centaine de mètres est tout simplement tombée. » M. Balaa se souvient de la vie sur le mont Kneissé, dans la grande villa construite par Canal 11 à l’intention de l’équipe. « Nous travaillions par équipes de deux. Nous étions toujours deux techniciens à passer dix jours sur place. Nous avions avec nous un cuisinier », dit-il. « En été, nous montions jusqu’au mont Kneissé dans des jeeps. L’hiver, c’était un hélicoptère de l’armée qui nous déposait avec nos ravitaillements. Mais parfois le brouillard était trop épais et il était impossible à l’hélicoptère d’arriver jusqu’à Kneissé. Nous faisions le chemin à pied dans la neige et le froid. Le trajet nous prenait environ quatre heures », raconte-t-il. Abed se souvient lorsque le cuisinier avait trébuché sur un bloc de glace, glissant sur 500 mètres. Il se rappelle aussi d’une boisson qu’il aimait beaucoup au début du printemps, préparée par le cuisinier originaire de la région : du lait de chèvre mélangé à de la neige. En été, Abed avait l’habitude d’amener sa famille au mont Kneissé. Son épouse et ses enfants restaient avec lui durant dix jours. Quand sa famille n’était pas avec lui, comment passait-il son temps ? « Il n’y avait ni chaînes satellite ni télévisions qui émettaient 24 heures sur 24 », dit-il. « Je passais mon temps à jouer aux cartes, à écouter la radio surtout, et à m’occuper du matériel, des émetteurs et des générateurs. En hiver, nous n’avions pas le chauffage central, mais des chaufferettes. Le chauffage avait été installé plus tard, quelques années avant la fermeture de la station de relais », ajoute-t-il. Et c’est Abed qui a été le dernier à éteindre cette station de relais. Il était tout seul au mont Kneissé. C’était en 1976. « Ce jour-là, j’avais quitté les studios de la télévision à Hazmieh, jusqu’à l’antenne de relais. C’était la guerre, il y avait une panne... J’ai tout arrangé, mais la station manquait de mazout. J’ai parlé dans l’un des émetteurs pour prévenir Hazmieh du fait qu’il fallait envoyer du carburant au plus tôt. J’ai lancé appel sur appel, mais personne ne m’a répondu », se souvient-il. Abed Balaa a donc éteint tous les émetteurs de l’antenne de relais et les générateurs. Il a fermé la porte de la villa. Il est descendu à pied du mont Kneissé, jusqu’à Dahr el-Baïdar, pensant que le mazout serait vite envoyé et que la station de relais se remettrait à émettre. Il croyait aussi qu’il reviendrait bientôt au mont Kneissé. Depuis ce jour, l’antenne du Canal 11 n’a plus jamais fonctionné. Quelques mois plus tard, Abed est parti pour les pays arabes, passant 17 ans à Abou Dhabi, aux Émirats arabes unis. Aujourd’hui, il habite à nouveau Beyrouth. De temps à autre, il passe à Hammana et Falougha pour s’enquérir des personnes qu’il avait côtoyées avant le début de la guerre, à l’époque de l’âge d’or de la télévision libanaise... Pat. K.

Abed Balaa était responsable de l’antenne de relais du Canal 11 dès son installation. Il était aussi le dernier à quitter les lieux avant sa destruction. Lui aussi aime appeler le mont Kneissé Tell al-Manara, probablement pour le symbolisme de cette antenne dont il était en charge et « qui émettait jusqu’à Alexandrie, à l’autre bout de la Méditerranée, bien avant la...