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Quatre questions à Guita Hourani, directrice du Centre libanais pour la recherche sur l’émigration (LERC)

Pour quelles raisons les Libanais souhaitent-ils émigrer en 2007 ? «Lorsque les personnes interrogées ont été invitées à identifier les raisons qui les poussent à émigrer, 39,3% ont répondu qu’elles partaient pour un avenir plus sûr, ou pour “ assurer ” l’avenir de leur famille (10,7%). Une tranche de 25,3% ont mis en cause l’insécurité au Liban, 9,6 % d’entre elles ont mentionné la situation politique, 7,3% la situation économique et 3,4% le contexte social. Seulement 2,2% ont dit partir pour du tourisme, 0,6% pour des affaires et 0,5% pour des formations. Enfin, 1,1% des personnes interrogées n’ont pas donné de réponse. Concernant leur perception de la situation politique au Liban, 16,2% ont dit craindre que l’insécurité politique ne mène à la chute du gouvernement, 14,2% étaient inquiètes des groupes armés, 14% avaient peur d’une guerre interne, 11,9% ont parlé de guerre sectaire et 10,6% ont dit craindre une guerre de religion.» Quelles sont les destinations privilégiées de ceux qui partent avec l’idée de ne plus revenir ? « La plupart des personnes interrogées (28,5%) ont exprimé un intérêt pour l’Europe – principalement la France, l’Allemagne, l’Angleterre, la Suède et l’Italie. Le Canada (19,7%) et les États-Unis (19,4%) arrivent en seconde position – ou en première, si l’on note que ces deux pays se trouvent en Amérique du Nord (39,1%). La troisième destination la plus populaire est les pays du Golfe (16,5%), principalement les Émirats arabes unis, puis c’est l’Australie (12%). Nous ne pouvons pas prétendre savoir si ceux qui partent s’en vont avec l’intention de ne plus revenir. L’étude menée nous permet d’affirmer cependant que beaucoup de Libanais partent mus par des sentiments de déception et de frustration, et que beaucoup resteraient ici au Liban si la situation politique et sécuritaire était meilleure. Nombreux sont ceux qui partent avec l’intention de revenir lorsque la situation sera meilleure. Cependant, le “danger” est qu’ils s’en vont vers des pays où on leur fournit la nationalité du pays, où ils ont la sécurité, un travail et jouissent de bonnes conditions de vie. Ils risquent de s’y installer, ce qui rend leur retour improbable. Signalons aussi que beaucoup de personnes parties durant les trente dernières années espèrent toujours retourner lorsque “la situation sera meilleure” et espèrent que cela aura lieu tant qu’elles sont encore en vie.» Les raisons qui poussent les Libanais à émigrer aujourd’hui sont-elles les mêmes qui les poussaient à partir il y a plus d’un siècle ? «Les raisons peuvent être comparables, c’est-à-dire qu’il s’agit de la situation politique, de la situation économique et des problèmes sociaux. Cependant, plusieurs différences sont à relever et l’on ne peut pas comparer les deux situations pour les raisons suivantes: Les Libanais qui émigraient entre 1880 et 1914 étaient des “sujets” de l’Empire ottoman. Bien que le Liban jouissait d’une autonomie à l’époque, la responsabilité de l’Empire ottoman envers ses “sujets” était de les pousser au travail forcé, vers le service militaire et de collecter leurs impôts. Si l’empire tentait d’empêcher l’émigration, c’était pour ne pas perdre une main-d’œuvre gratuite et des taxes. En comparaison, les Libanais qui partent de nos jours sont les citoyens d’un État souverain et indépendant qui est responsable de leur bien-être. La principale différence entre l’Empire ottoman et la République libanaise est donc la responsabilité politique vis-à-vis des habitants du pays. De plus, sous l’empire, la mobilité était sujette à des restrictions. Sous la République, il n’y a aucune restriction, surtout depuis l’abolition du service militaire. Remarquons aussi que ceux qui partaient étaient des pionniers qui ont lentement établi ce que nous désignons aujourd’hui par “toiles” ou “networks”. Ceux qui partent aujourd’hui ont derrière eux plus d’un siècle de chaînes de contacts qui facilitent leur émigration. Enfin, ceux qui s’en vont n’ont plus le même profil que celui des ancêtres. Les pionniers étaient des paysans, de petits propriétaires fonciers et des artisans qui étaient jeunes aussi. Aujourd’hui, les émigrés sont des professionnels éduqués et jeunes. Les femmes émigraient également mais pas autant qu’aujourd’hui. L’émigration s’est féminisée. Auparavant, les hommes partaient et laissaient leur famille au pays. Aujourd’hui, nous assistons, entre autres, à une émigration de familles.» Quels sont les différents moyens auxquels ont recours les émigrants libanais pour partir du pays? Comment peut-on émigrer? «Les Libanais qui émigrent ont soit la double nationalité, soit un permis de séjour permanent ou encore des visas valides (de travail, d’étudiant, de touriste, etc.). Ceux qui émigrent le font à travers un processus dit de “réunification familiale”, d’autres épousent un partenaire ayant la nationalité du pays où ils désirent s’installer, d’autres encore trouvent un travail à l’étranger. Certains partent pour faire des études, ou en prétendant faire des études. Certains partent pour des affaires ou prétendument pour des affaires. D’autres Libanais postulent pour un visa d’émigration vers les pays qui offrent encore cette possibilité, comme le Canada. Certains ont recours aux services “d’agents d’émigration”, qui s’avèrent parfois être des escrocs illégaux qui proposent une émigration clandestine et s’en vont avec l’argent du candidat à l’émigration. Il est en tout cas très triste de se rendre compte à quel point les Libanais sont prêts à tout pour fuir l’insécurité de leur pays.»
Pour quelles raisons les Libanais souhaitent-ils émigrer en 2007 ?
«Lorsque les personnes interrogées ont été invitées à identifier les raisons qui les poussent à émigrer, 39,3% ont répondu qu’elles partaient pour un avenir plus sûr, ou pour “ assurer ” l’avenir de leur famille (10,7%). Une tranche de 25,3% ont mis en cause l’insécurité au Liban, 9,6 % d’entre...