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Actualités - OPINION

Le torrent rebelle Samira FAKHOURY

La nature a toujours eu le dernier mot avec l’homme. Nous en avons de nombreux exemples dans le monde : des digues soigneusement élevées qui cèdent (Fréjus) ; des stations balnéaires envahies par la mer (La Nouvelle-Orléans), ou détruites par des vents de 270 kilomètres-heure, etc. Moi, je veux simplement parler d’un torrent que j’ai toujours connu comme destination de promenade en été, difficile à remonter, mais ombragé et conduisant à un panorama splendide qui vous permet, d’un seul coup d’œil, d’admirer la verte vallée de Hammana. Mais l’hiver est une autre histoire, car l’utiliser comme sentier au cours de cette saison pouvait être dangereux. Enfin, tout cela est du passé, un passé lointain, le passé récent s’est chargé, lui, d’éloigner les habitants du village de la terre. C’est que l’agriculture, avec ses vergers, ses potagers, n’est plus à la mode. La vente des terres est plus rentable. Et puis, à quoi bon garder un lopin de terre s’il ne produit plus rien ? Ainsi, le notaire local voit son bureau devenir le point d’attraction de personnes de tous bords, et les projets d’aménagement poussent comme des champignons. Les vignobles ? Sacrifiés au profit de réseaux routiers qui permettent d’accéder à quelque parcelle. Les pommeraies ? Il y a belle lurette qu’elles ont disparu, depuis 1975 en fait. D’ailleurs, à quoi bon s’en occuper quand la récolte était faite par l’armée syrienne ? Donc de projet en projet, le torrent (notre héros du jour) s’est vu aplani, ratissé. Les responsables ont fait leur devoir ; ils ont même planté une plaque d’identification à l’entrée de cette nouvelle rue. Ah, la nostalgie des vieux noms ! Ce torrent s’appelait « boughaz du Nahr el-Fawar », devenu maintenant « Purple Zone, rue 7 ». En ce mois de juin 2006, notre torrent sommeillait, il était absent, donc il n’avait pas eu connaissance de sa nouvelle identité. Et le 26 février 2007, le voilà qui rentre dans son lit, vibrant de toutes ses eaux, charriant des arbres et des rochers, sans parler de la terre et des cailloux. Rien ne l’entrave, ni les habitations qu’il envahit, ni les boutiques, ni les câbles téléphoniques (dont le nôtre), ni les hauts cris poussés par les habitants. Le torrent avance sur le parcours qui était le sien depuis des centaines d’années. Tout cède sur son passage, rien ne lui résiste. C’est une matinée que les habitants de Hammana n’oublieront pas de sitôt. Il en est toujours ainsi au Liban : les citoyens paient pour la myopie, la bêtise, l’ignorance et l’appât du gain facile de nos dirigeants. Libre à vous, lecteurs, d’établir un parallèle entre cet incident et la politique actuelle ainsi que le comportement de nos hommes politiques. Moi, je me pose une seule question : quel torrent engloutira-t-il le Liban ? Samira FAKHOURY Hammana Article paru le Vendredi 9 Mars 2007
La nature a toujours eu le dernier mot avec l’homme. Nous en avons de nombreux exemples dans le monde : des digues soigneusement élevées qui cèdent (Fréjus) ; des stations balnéaires envahies par la mer (La Nouvelle-Orléans), ou détruites par des vents de 270 kilomètres-heure, etc. Moi, je veux simplement parler d’un torrent que j’ai toujours connu comme destination de...