Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Pour une démocratie émanant de la nature du Liban

Par le Dr Adnan HAÏDAR* Chaque communauté au Liban a sa place et son espace dans la structure nationale. Il suffit de prendre cette vérité en considération pour pouvoir initier une réforme convenable pour le pays à condition qu’elle soit fondée sur des bases réellement démocratiques. La communauté chiite, qui a fait ces dernières décennies d’importants progrès et développements sociaux, intellectuels et économiques, est toujours prête à collaborer pour atteindre ce but, qui est la sauvegarde pour le redressement du pays à condition d’être appliqué par toutes les confessions libanaises, sur un même pied. Une réserve toutefois : toute réforme démocratique ne peut être appliquée tant que les religions et la politique demeurent enchevêtrées. Pour pouvoir les dissocier, il faut avoir la conviction et le consentement de tous les politiciens et chefs religieux pour obtenir sécurité et stabilité. En un mot, il faut instaurer la démocratie sur tout le territoire libanais, abstraction faite de toute intervention intérieure ou extérieure. Dans cette optique, l’imam Moussa Sadr a déployé un effort notable durant toute sa vie. Il a établi des relations avec toutes les confessions et tous les chefs religieux, ainsi qu’avec les chefs politiques libanais. Il parvient à juguler le fanatisme durant la période qui a précédé la guerre de 1975. Sa disparition a traumatisé les Libanais et les Arabes. À mon avis, le complot qui a été tramé contre l’imam était bien réel. Ses idées dépassaient les frontières libanaises. L’imam avait un accent iranien à son retour, à la fin de la décennie 1950, mais ses racines sont bien libanaises. Il a enseigné au début de sa carrière au Collège Amilite à Beyrouth. Durant cette période, il m’a rendu visite à mon hôpital. En ma qualité de président de la société el-Nidal qui représentait presque tous les jeunes intellectuels de la communauté chiite. J’ai été attiré par sa présence, son charisme, son langage et je me suis lié d’amitié avec lui. Ses visites se sont répétées et nous avons fini par travailler pour la même cause. Il s’agissait en premier lieu de relever le niveau de notre communauté dans tous les domaines pour donner aux jeunes la chance et l’occasion de collaborer avec l’Administration et pour être sur un pied d’égalité avec les autres communautés. Il importait ensuite de mettre fin au féodalisme (el-iktia). Tel était à notre avis le premier pas sur la voie de la démocratie. Nous avons travaillé avec l’imam Moussa Sadr pour organiser d’abord la communauté. Nous avons créé une organisation mixte, civile et religieuse, un Conseil suprême islamique chiite présidé par un imam élu et comprenant douze membres religieux choisis parmi les meilleurs cheikhs, et douze civils élus parmi les intellectuels (médecins, avocats, ingénieurs, universitaires, députés, ministres, etc). Deux vice-présidents assistaient l’imam, l’un religieux, l’autre civil. À la première élection en 1969 furent élus président l’imam Moussa Sadre et vice-présidents cheikh Sleiman el-Yahfoufi et moi-même. À la deuxième élection en 1975, cheikh Mohammad Mehdi Chamseddine remplaçait cheikh Yahfoufi et je fus réélu vice-président civil. La réforme de la communauté a été agréée et confirmée par le Parlement et ses articles ont été certifiés, sauf celui relatif au nombre de 24 membres du Conseil suprême. L’un des députés chiites, M. Mahmoud Ammar, a proposé une rectification qui consistait à considérer tout député chiite comme étant membre du Conseil suprême. Cette proposition a été agréée à l’unanimité par tous les autres députés. La politique a ainsi atteint ce corps qui se doit d’être impartial et indépendant dans toutes ses sentences. Il n’a été procédé à aucune nouvelle élection depuis 1975. Cheikh Chamseddine a joué le rôle de président après la disparition de l’imam Moussa Sadr en 1979 et est devenu imam 18 ans plus tard. L’imam Moussa Sadr était un géant et un génie qui alliait charisme, intelligence, vigueur, raisonnement, diplomatie, bon sens et sens de pouvoir. En l’accueillant et en le choisissant comme mentor, la société Hayat el-Nidal – qui avait vu le jour dix ans avant son arrivée au Liban – lui a permis de faire entendre sa voix d’abord au sein de notre communauté puis dans le Liban tout entier et bien au-delà de nos frontières. Alors que le Liban se débat dans des conflits politiques, sociaux et économiques qui menacent de lui être fatals, je tiens à rendre hommage à deux éminentes personnalités que j’ai bien connues : l’ancien président de la République Fouad Chéhab, qui posa la première pierre de la structure démocratique de l’État, et l’imam Moussa Sadr qui a œuvré pour la cause de tous les déshérités libanais afin qu’ils obtiennent les mêmes droits que tous leurs concitoyens. Le Liban est riche en hommes intellectuels, indépendants et sincères, à même de servir l’État de façon équitable sans céder aux tentations pécuniaires ou autres coercitions. Notre démocratie doit émaner de la nature intrinsèque du pays et non de l’extérieur. * Vice-président du Conseil supérieur islamique chiite.

Par le Dr Adnan HAÏDAR*

Chaque communauté au Liban a sa place et son espace dans la structure nationale.
Il suffit de prendre cette vérité en considération pour pouvoir initier une réforme convenable pour le pays à condition qu’elle soit fondée sur des bases réellement démocratiques.
La communauté chiite, qui a fait ces dernières décennies d’importants progrès...