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Actualités - OPINION

L’inégalité du mérite

Plus d’un mois que la démagogie donne la main à la théocratie au centre-ville de Beyrouth. Voilà que le CPL nous engage à nouveau dans une autre guerre inutile. Lui, qui nous berçait de lendemains idylliques et nous promettait un État de droit, se retrouve intimement uni à l’aristocratie du régime du mandat syrien, celle qui attendait tout du pouvoir et sacrifiait sa liberté d’esprit aux prébendes distribuées par la Sublime Porte, sans qu’elle ait eu besoin de s’assumer elle-même. Évidemment, devant une belle toile de fond esquissant un gouvernement d’union nationale, l’opposition plurielle s’est jetée comme sur du pain béni sur la noblesse de la revendication, tant elle espère retrouver un dénominateur commun à ses idéologies antinomiques. Sans véritable projet politique cohérent, les différents partis du centre-ville s’arc-boutent les uns sur les autres, chacun concoctant sa petite cuisine personnelle. Il n’empêche que beaucoup de jeunes, de bonne foi probablement, bivouaquent toujours sur le bitume de la place Riad el-Solh, mais pour réclamer quoi en fin de compte? Que rien ne change et que tout persiste dans le même ordre imposé par le joug syrien? Réalisent-ils qu’ils scandent haut et fort leur haine aux États-Unis et à la France, qu’ils jurent fidélité au régime baassiste et qu’ils absolvent le bourreau en dénigrant le tribunal international? Réalisent-ils qu’ils réclament la dissolution d’un gouvernement et d’un Parlement qui ont pris leurs distances avec la famille régnante syrienne, qu’ils encouragent l’armement des partis et qu’ils font de nouveau basculer le pays dans une lutte armée sans fin avec l’ennemi israélien? Réalisent-ils qu’ils ragaillardissent la «pax syriana»? Il est rageant de retrouver parmi les frondeurs bien intentionnés du centre-ville des cohortes de récupérateurs et autres spécialistes du théâtre d’ombre, ceux qui guettent la faille pour se créer un grand soir et d’autres qui, faute d’être représentatifs, misent tout sur leur capacité de nuisance. Ceux qui seront présents pour cueillir au moment opportun le fruit de la lutte des abusés. Car, pendant que jaspinent les professionnels de la démagogie, les déficits s’amplifient et les ardoises s’accumulent, dont seuls bénéficieront les extrémismes. Malheureusement, le CPL a clairement choisi son camp. Reniant toutes ses promesses, il s’est harnaché de lourdes prothèses du Hezb pour se sortir de l’immobilisme et du marasme dans lesquels il s’est embourbé, depuis sa sortie de son cocon naturel, pour s’aligner sur des théories aux antipodes de son engagement. Confiant que ces nouvelles instrumentations lui garantiront une nouvelle accélération dans la vie politique libanaise, il découvre déjà à ses propres dépens, et beaucoup aux nôtres, qu’elles handicapent ostensiblement sa simple déambulation. Ici et là, des mises à l’ordre jugulent l’ambitieux élan de leur chef quant à l’investiture du palais gouvernemental ou, une autre fois, l’occupation des grandes voies de la ville. Ce qui laisse présager une alliance avec une opposition, dont le cahier des charges reste on ne peut plus suspect, entachée de concessions douloureuses et de pénibles contorsions. Si nous encourageons le CPL à œuvrer en vue d’un gouvernement national tout à fait légitime, il n’en demeure pas moins que nous stigmatisons ses alliances et ses moyens. Après tout, le CPL a refusé à deux reprises sa participation au gouvernement pour des raisons sûrement défendables à ses yeux. Mais le CPL ne devrait en aucun cas, et sous prétexte de corriger l’inégalité des conditions, instituer une détestable inégalité du mérite en ramenant dans son sillage les inconditionnels de la Syrie. Bonne année, quand même. Dr Joseph MANTOURA
Plus d’un mois que la démagogie donne la main à la théocratie au centre-ville de Beyrouth. Voilà que le CPL nous engage à nouveau dans une autre guerre inutile. Lui, qui nous berçait de lendemains idylliques et nous promettait un État de droit, se retrouve intimement uni à l’aristocratie du régime du mandat syrien, celle qui attendait tout du pouvoir et sacrifiait sa...