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Steve Brill organise un tour de cueillette en plein cœur de New York Central Park se visite, et il se mange aussi

« Je préfère me nourrir de produits locaux », explique un jeune homme, en arrachant une poignée de pissenlits pour son dîner. En fond, s’élèvent d’imposants gratte-ciel : nous sommes à Central Park. En ce dimanche, ils sont une trentaine d’amateurs de cueillette, penchés sur l’herbe ou secouant les arbres sous la houlette de Steve Brill, dit « the wildman » (l’homme sauvage), qui depuis 20 ans explore, plus ou moins légalement, les richesses inattendues du parc new-yorkais. « Elles sont là depuis toujours, cachées. Et elles sont délicieuses ! » lance ce grand barbu au casque d’explorateur, qui conduit régulièrement des parcours-découvertes. L’expérience rassemble : jeunes entre copains, couples avec bébés, retraités en tenue de randonnée, dame en manteau léopard... Tous réjouis à l’idée de mettre Central Park dans leur casserole. « Je ne peux pas avoir de jardin mais j’ai un grand parc près de chez moi! » dit Jonah Tully, 28 ans, qui travaille dans l’édition. Le jeune homme explique qu’il aime « bien manger » : « Personne ne m’a appris que c’était un plaisir. Tant de gens de mon âge ont grandi en mangeant des McDo. J’ai bu du lait cru pour la première fois à 23 ans ! Aujourd’hui, je veux une alimentation riche, sans pesticides et locale. Je ne veux pas manger chinois tous les soirs ! » À peine entré dans le parc, encore à l’ombre de l’immeuble Dakota de John Lennon, le groupe s’arrête pour une dégustation de l’« oseille du mouton », une herbe citronnée dont la feuille rappelle la forme de l’animal. « Comme c’est mignon ! » dit une dame, tandis que d’autres goûtent. « C’est super en salade et en soupe », commente Steve Brill. Arrive le tour du « pissenlit commun », puis du « sassafras », racine qui donne une infusion aux vertus antioxydantes, puis la « ciboulette des champs », « plus nourrissante que celle du commerce », et les noix du gingko, toxiques si on ne les cuit pas 20 minutes. Avec le réchauffement climatique, ces plantes sont désormais disponibles en décembre, relève M. Brill. La troupe s’enfonce, loin des calèches et des joggeurs. Soudain apparaît le dos du Metropolitan Museum. Et non loin, plusieurs arbres à kakis et un pommier sauvage, aux fruits plus petits que ceux vendus en magasins. « Qui croirait qu’on va à la cueillette à New York ? » s’amuse Sarah Lincoln-Harrison, retraitée. « Nous devrions tous savoir ce qui s’offre à nous, apprendre à ne pas dépendre de l’industrie agroalimentaire. C’est désastreux, nous n’apprenons pas aux enfants d’où vient la nourriture ! » Le guide, « the wildman », se présente comme un amoureux de gastronomie. À l’origine de sa vocation : sa vision dans les années 1980 d’une vieille dame grecque, toute de noir vêtue, collectant dans un parc du Queens les feuilles de vignes nécessaires aux célèbres bouchées farcies. « Il faut faire savoir qu’il y a des moyens simples d’être en harmonie avec son environnement », dit-il, estimant que « de plus en plus de gens se lassent du mode de vie consumériste ». Son entreprise ne s’est pourtant pas faite sans mal, passant notamment en 1986 par son arrestation par deux gardes-forestiers, venus incognito en visiteurs. « J’avais à peine croqué un pissenlit que tous les gardes-forestiers de New York sont sortis du bois ! » se souvient-il. Mais aujourd’hui, sa présence est tolérée et sa passion devenue activité à plein temps, avec aussi l’écriture de livres sur les plantes sauvages. À Central Park dimanche, les cueilleurs ont garni leurs sacs, pris des notes précises. Certains, comme Matt Sutton, ingénieur du son, s’imaginent très bien poursuivre la cueillette près de chez eux. Steve Brill travaille aussi de plus en plus dans les écoles, espérant convaincre toute une nouvelle génération de petits citadins.
« Je préfère me nourrir de produits locaux », explique un jeune homme, en arrachant une poignée de pissenlits pour son dîner. En fond, s’élèvent d’imposants gratte-ciel : nous sommes à Central Park.

En ce dimanche, ils sont une trentaine d’amateurs de cueillette, penchés sur l’herbe ou secouant les arbres sous la houlette de Steve Brill, dit « the wildman »...