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Actualités - CHRONOLOGIE

THÉÂTRE - Il a conté des « récits de l’été 2006 » dans la salle expérimentale du Monnot Jihad Darwiche réveille les héros dans l’ombre

Il est venu rien que pour un soir. De Paris où il vit depuis quelques années déjà, Jihad Darwiche ne pouvait rater le rendez-vous des manifestations du Théâtre du Rond-Point. Faisant abstraction des tensions que vit le pays, Darwiche est venu conter au public libanais, dans la salle expérimentale du Monnot, des récits fabuleux. Ceux de l’été 2006. Durant une heure, le public est resté accroché à son regard, à ses mains qui faisaient des circonvolutions dans l’air comme pour dessiner l’espace, et cette bougie dont la flamme semblait égrener les instants. Jihad Darwiche, ce conteur généreux, friand des mots et des gestes, a retracé entre larmes et sourires, en quelques récits vivants et tellement humains, le sanglant été dramatique des Libanais. «J’ai toujours été fasciné par ceux qui subissent la guerre. Par ceux qui, pour une raison ou une autre, n’ont pas quitté leur pays, a-t-il dit au début de son spectacle. Parce qu’ils n’ont pas pu, parce qu’ils n’ont pas voulu et parce que, finalement, quitter sa terre c’est un peu mourir.» «C’est pour ceux-là, poursuit-il, que j’ai glané des témoignages qui constituent la trame de mes récits. Un spectacle encore inachevé puisque je l’écoute en même temps que vous et que j’espère enrichir au plus tôt. Car au Liban, les événement se succèdent tellement rapidement qu’on a à peine le temps de réfléchir sur un sujet qu’un autre a déjà pointé le nez.» Bayyada, Marwanieh, Markaba, Saïda ou Hart Hreik, des régions parfois inconnues que seule la guerre nous a appris à connaître car, dit Darwiche, «la géographie, on l’apprend à travers les massacres et les batailles». L’étoffe des héros Des régions, mais également des êtres humains qui n’ont pas cessé de vivre malgré les bombardements. Ces hommes et ces femmes sont les vrais héros du conteur. Certes ils n’ont pas accompli de grandes prouesses. Ils ne possèdent pas non plus le verbe grandiloquent qui martèle les foules mais, par leurs petits actes quotidiens accomplis durant la guerre, ils ont su donner cette part d’humanité à ce qu’on appelle l’héroïsme. C’est ce citoyen lambda à l’ombre des sunlights que peint Jihad Darwiche avec une verve entraînante, douce et amère. Car ce conteur fabuleux a de la tendresse pour ces frères handicapés, perchés au cinquième étage d’un immeuble de la «Dahié», qui s’accrochent à n’importe quoi pour leur donner du réconfort. Il a de la tendresse pour Oum Nahed qui donnait à manger aux résistants, pour cette femme qui ne voulait pas quitter son homme bien que très malade, pour celle qui a su toujours garder le sourire et qui a voulu toujours arroser ses plantes même aux pires moments. Le dompteur de mots, l’escrimeur du verbe, qui sait faire mouche en ne versant jamais dans la sensiblerie. Cet équilibriste, qui parvient en toute pudeur à trouver le lien infime entre la larme et le sourire, a su réveiller, durant une soirée, non seulement des moments tragiques, mais des souvenirs de personnes aux destins oubliés qui constituent le tissu humain libanais. Pour Jihad Darwiche, ce sont ceux-là mêmes qui, après une guerre meurtrière et injuste, peuvent affirmer avec fierté qu’ils retiennent le souvenir de régions hospitalières qui leur ont réservé un accueil chaleureux et que désormais ils peuvent porter le nom d’Ahl Loubnan et non «Ahl al-Jounoub». Colette KHALAF
Il est venu rien que pour un soir. De Paris où il vit depuis quelques années déjà, Jihad Darwiche ne pouvait rater le rendez-vous des manifestations du Théâtre du Rond-Point. Faisant abstraction des tensions que vit le pays, Darwiche est venu conter au public libanais, dans la salle expérimentale du Monnot, des récits fabuleux. Ceux de l’été 2006.

Durant une heure, le...