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Actualités - REPORTAGE

Les filles sont souvent forcées à devenir des esclaves sexuelles ou même des combattantes Les enfants dans les conflits armés, ou l’innocence perdue

Les enfants sont les premières victimes directes ou indirectes des conflits armés. Même s’ils ne sont pas tués ou blessés, ils font face à des situations difficiles telles que l’enlèvement, le déplacement forcé, la pauvreté ou la perte de leurs parents. Pire encore, les enfants sont souvent forcés d’assister à des crimes ou même de perpétrer eux-mêmes des crimes de guerre. Les filles, plus vulnérables, sont également sujettes au viol et aux mauvais traitements. Elles deviennent de plus en plus nombreuses à faire, elles aussi, l’expérience de la guerre sur les lignes de front. À l’occasion de la Journée mondiale de l’enfance, « L’Orient-Le Jour » revient sur le sort de ces enfants qui paient de leur innocence la folie des plus adultes. Au cours de la période qui a suivi la fin de la guerre froide, entre 1990 et 2003, l’ONU a recensé 59 conflits armés importants qui se sont déroulés dans 48 endroits différents. Quatre d’entre eux seulement peuvent être qualifiés de guerres opposant des pays entre eux, le reste relèvant de conflits internes, à caractère ethnique. Bien qu’il n’existe pas de statistique précise sur le nombre d’ « enfants soldats » dans le monde, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) a estimé dans un rapport récent qu’ils se comptent probablement en centaines de milliers. Enlevés ou contraints de rejoindre les rangs de groupes armés, des enfants de moins de dix ans peuvent devenir de véritables machines à tuer. La plupart d’entre eux sont également forcés de devenir esclaves sexuels, domestiques ou même espions. Les groupes armés choisissent de les enrôler parce qu’ils sont plus faciles à entraîner et à obéir aveuglément que les adultes. Selon l’Unicef, c’est en Afrique et en Asie que l’on trouve le nombre le plus élevé d’enfants participant directement à des conflits en tant que « soldats ». En 2003, par exemple, des milliers de mineurs ont été enlevés par le groupe rebelle de l’Armée de résistance du Seigneur dans le nord de l’Ouganda et se sont retrouvés contraints de servir comme combattants. Au Myanmar, on compte encore des dizaines de milliers d’enfants dans les forces armées, tandis qu’en République démocratique du Congo, l’Unicef a fait état de très nombreux cas d’atrocités, de viol et de passage à tabac impliquant des enfants. Les filles soldats Alors que le terme « enfants soldats » fait plus souvent référence aux garçons, les filles ont été enrôlées dans des groupes armés gouvernementaux, d’opposition et de milices dans 55 pays entre 1990 et 2003, toujours selon le dernier rapport de l’Unicef. Ces filles auraient combattu et servi d’officiers de renseignements, d’infirmières ou même d’esclaves sexuelles dans des pays comme l’Angola, le Burundi, le Rwanda, le Mozambique, la Colombie, le Cambodge, le Sri Lanka et l’ex-République fédérale de Yougoslavie. Dans les conflits de Bosnie-Herzégovine et de Croatie, au début des années 90, les adolescentes et les femmes étaient délibérément violées et obligées de mettre au monde des petits appelés souvent les « enfants de l’ennemi ». Plus récemment, dans la province soudanaise du Darfour, les janjawid, milice progouvernementale, ont systématiquement eut recours au viol et à l’agression sexuelle, surtout aux alentours des camps de réfugiés, lorsque les femmes s’aventuraient hors du camp pour chercher de l’eau et du bois. Par ailleurs, afin d’échapper à la pauvreté et l’insécurité liées au conflit, il est fréquent que des filles soient amenées à se prostituer. En Colombie, par exemple, des filles de moins de 12 ans se seraient données à des groupes armés pour garantir la sécurité de leur famille. Un impact profond Mais l’impact des conflits armés sur les enfants se ressent également bien au-delà du champ de bataille. Les destructions causées par la guerre signifient généralement que les enfants sont privés des services essentiels, tels que l’éducation et les soins de santé. Les écoles peuvent parfois se retrouver prises directement dans un conflit armé. On se souvient, par exemple, de la crise des otages dans la ville de Beslan en septembre 2004 où plus de 150 enfants ont trouvé la mort. Dans les territoires palestiniens occupés, près de la moitié des élèves ont vu leur école assiégée par des soldats israéliens et plus de 10% d’entre eux ont été témoins de la mort d’un enseignant, tué dans l’enceinte de l’établissement scolaire. Le déplacement des familles a également un profond impact sur les jeunes. Trop souvent, la période d’exil se compte en années, voire en décennies. Des enfants passent parfois toute leur vie dans des camps, comme c’est le cas de centaines de milliers de Palestiniens répartis entre la Jordanie, la Syrie et le Liban. Défis et progrès Bien que, depuis dix ans, l’Unicef se soit largement concentrée sur le problème de l’utilisation des enfants dans les conflits armés, le nombre d’enlèvements d’enfants par les acteurs de conflits a sensiblement augmenté ces dernières années. La semaine dernière, les Nations unies ont accusé les forces de sécurité du Sri Lanka de recruter des enfants pour le compte de la faction Karuna, un groupe paramilitaire combattant avec eux les rebelles tamouls. C’est la première fois que l’ONU accuse de la sorte le gouvernement de Colombo. La prise de conscience des répercussions que les guerres ont sur les enfants a certainement beaucoup progressé au sein de la communauté internationale, mais, des Philippines au Pérou, en passant par le Myanmar, le Soudan et la RDC, des centaines de milliers d’enfants continuent à être exploités, dans l’attente de mesures plus concrètes. R. M.
Les enfants sont les premières victimes directes ou indirectes des conflits armés. Même s’ils ne sont pas tués ou blessés, ils font face à des situations difficiles telles que l’enlèvement, le déplacement forcé, la pauvreté ou la perte de leurs parents. Pire encore, les enfants sont souvent forcés d’assister à des crimes ou même de perpétrer eux-mêmes des crimes de...