Rechercher
Rechercher

Actualités - RENCONTRE

RENCONTRE - De passage à Beyrouth dans le cadre de Docudays Jean Perret: «Visions du réel, un festival élitaire pour tous»

De passage au Liban à l’occasion du festival Docudays qui vient de se clôturer à Beyrouth, Jean Perret, lui-même responsable du Festival international de Nyon, livre sa propre vision du film documentaire et d’un cinéma qui rejette le consumérisme et revendique son statut d’«élitaire pour tous», d’après une expression si chère à Jean Vilar. Sa visite à Beyrouth avait un double objectif: sélectionner des films dans le cadre du festival de documentaires Docudays, mais également prendre connaissance de la production cinématographique libanaise et arabe, et se mettre en contact avec les organisateurs, penseurs et décideurs de cette production. C’est pour Jean Perret une manière de confronter d’autres cultures et d’autres besoins, avec un intérêt constamment mêlé de curiosité. Issu du milieu journalistique et maniant des expressions différentes avec la même approche humaine, ce touche-à-tout réussit à les mettre au service de ce festival de Nyon dont il est en charge depuis 1995. «Créé en 1969, le Festival international de Nyon avait pour objectif de présenter les films documentaires venus de toutes parts. S’il a été dans un premier temps un carrefour privilégiant les contacts entre l’Allemagne scindée en deux ainsi que les camps capitaliste et communiste, il a dû cependant cesser ses activités en 1994, explique Perret. En 1995, à la suite de la décision prise par les instances gouvernementales de relancer ce festival, j’en ai assumé la responsabilité tout en le baptisant “Visions du réel”.» «Pourquoi cette appellation? se demande-t-il. Parce que la définition du mot documentaire me semblait trop traditionnelle, figée et obsolète. Il me semblait plus approprié qu’on s’intéresse à des œuvres qui portent la marque d’une signature et qui reflètent par ailleurs des visions différentes du monde.» Un réel, un vécu Nyon, petite ville de dix-huit mille habitants et havre de paix de la Suisse, allait bientôt accueillir chaque année des centaines de films à différentes orientations. On y viendrait pour perdre du temps, pour passer du bon temps. Deux tendances allaient se partager le festival. D’une part, un travail de repli sur soi et d’autobiographie et, de l’autre, une évasion et des reportages pour une exploration de l’ailleurs. «Avec la technologie d’aujourd’hui, quiconque peut accéder à l’élaboration d’un film avec des caméras légères ou encore des 16 ou 32 mm. Dans ce festival, aucune condition n’est requise, tant dans le matériel employé que dans le sujet ou la longueur du film, dit Perret. Rechercher une identité personnelle, aller à la rencontre de l’autre et découvrir de nouvelles sensibilités, voilà ce que ce cinéma du réel va proposer.» Le festival de Nyon est donc très vite devenu une plate-forme d’échanges où le travail s’effectue en profondeur. Un travail qui permet de comprendre la complexité du monde et sa diversité, contrairement au flux de films que déversent chaque année les médias et qui favorisent l’aveuglement du spectateur et son abêtissement. «En effet, affirme Jean Perret, si la télévision fait du spectateur un consommateur apathique et passif, le cinéma du réel veille, par contre, à respecter ce spectateur et à le traiter en adulte intelligent et éveillé. Pour “Visions du réel”, le monde n’est pas un village global. Il est un lieu où la diversité et l’altérité sont à l’honneur.» Engagé à défendre cette idée du cinéma depuis douze ans déjà, Jean Perret parcourt le globe en quête de ces diverses visions humaines du monde. Ces fines pellicules, semblables aux tissus humains, auxquelles s’ajouteront l’an prochain des témoignages radiophoniques (nouveauté du festival), ne sont que l’expression des multiples expériences humaines. Fustigeant le rouleau compresseur de l’audiovisuel qu’il traite de «manipulation mondiale de l’opinion publique», Perret tente d’établir, accompagné de son équipe, un réseau de films, un marché ouvert à tous, distributeurs, cinéastes et spectateurs, qui formerait une chaîne infaillible aux attaques de l’image en masse. «Il faut à tout prix arrêter de consommer la culture comme tous les autres produits. Former le regard à une vision nouvelle, créer une mémoire et se battre contre l’amnésie créée par les images dévastatrices, telle est la bataille menée par “Visions du réel” et qui, je l’espère, gagnera rapidement du terrain.» Colette KHALAF

De passage au Liban à l’occasion du festival Docudays qui vient de se clôturer à Beyrouth, Jean Perret, lui-même responsable du Festival international de Nyon, livre sa propre vision du film documentaire et d’un cinéma qui rejette le consumérisme et revendique son statut d’«élitaire pour tous», d’après une expression si chère à Jean Vilar.

Sa visite à Beyrouth...